Chapitre 185 : La mort en face

ShiroiRyu
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Chapitre 185 : La mort en face

« Je n’aime déjà pas ce que tu as prévu, Elyséa. Arrêtons cela et dis-le-moi plutôt. »

« … … … Ce qui est lancé ne peut pas être défait, Kéran, je … »

Elle s’arrêta dans ses paroles, le décor s’assombrissant pendant un court instant, au grand étonnement de Swar. Celle-ci cligna des yeux, essayant de faire revenir la scène, chose qui se fit après quelques secondes. Qu’est-ce que …

« Euh ? Tu as fait quoi, Elyséa sur le coup ? Là, je n’ai pas du tout compris où tu voulais en venir si tu veux tout savoir. Tu peux m’expliquer ? »

« Je ne le sais guère moi-même … Je ne comprends pas … Je ne comprends pas du tout. » bredouilla la femme aux cheveux blancs, un peu étonnée.

« Mademoiselle Elyséa ! Mademoiselle Elyséa ! Où vous étiez ? »

Une petite voix fluette se fit entendre alors que Kéran et Elyséa, celle qu’il connaissait, se retournaient pour avoir affaire à une fille qui devait avoir à peine six ou sept ans. Elle courrait en direction … de la représentation exacte d’Elyséa bien qu’au final, lui et la créature ténébreuse étaient invisibles et immatériels dans cette scène. C’était donc … la véritable Elyséa celle qu’il voyait.

« J’étais à un endroit très spécial … Un endroit où nul ne peut aller … tant que toute cette histoire n’est pas terminée. Est-ce que tu comprends ? »

« Mais euh … Où c’est cet endroit très spécial ? » demanda la jeune fille alors que Kéran remarquait quelque chose d’étrange … chez Elyséa. Il l’avait déjà vu auparavant … mais ce n’était pas la même chose quand même.

« Elyséa, regarde donc … Enfin, regarde toi … Tu n’as pas vu ? »

« Qu’est-ce qu’il y a de spécial avec moi ? » demande Elyséa sans réellement comprendre où voulait en venir le jeune homme aux cheveux gris.

« Tu as l’air … plus chaleureuse et plus humaine. Enfin, je me comprends … Tu semblais si triste et si distante quand je te voyais auparavant. Mais regarde-toi là … Tu as même un sourire aux lèvres. C’est vraiment étonnant mais … c’est mignon. »

Mignon ? Elle haussa un sourcil devant les propos du jeune homme, trouvant cela étonnant de sa part. Mais en même temps, elle n’avait jamais pensé à regarder sa propre personne. Pourquoi ? Pourquoi est-ce que … AH ! Elle fit un pas en reculant.

« Je … Je …. » bafouilla Elyséa, tremblante de tout son corps.

« Tu es en train de sourire ? Toi ? Enfin … Le « Toi » de cette époque ? »

Mais qu’est-ce qui prenait à Elyséa de se comporter de la sorte ? Enfin, il regardait celle du passé … qui souriait tendrement à la jeune fille. Et puis, il regardait celle qu’il connaissait. Celle qui était effrayée, comme une enfant.

« Hého … Je sais que c’est étonnant mais il n’y a pas de quoi en faire un drame, Elyséa. »

« Non ! Ce n’est pas possible ! Je … Je ne sais pas … Je ne sais pas pourquoi je souris ! Je ne sais pas pourquoi je suis heureuse, Kéran ! Normalement, je ne devrai pas l’être ! Je ne devrais pas l’être ! JE NE DEVRAIS PAS ! » commença à crier la femme aux cheveux blancs, tournant la tête de gauche à droite comme pour bien effacer ce souvenir.

« ET POURQUOI ?! Pourquoi tu ne devrais pas l’être hein ? »

« Car je n’étais pas heureuse ! Je ne comprends pas pourquoi je le serai ! CA NE ME CONVIENT PAS ! JE NE DEVRAIS PAS L’ËTRE ! »

« ELYSEA ! ARRÊTE TES BÊTISES ! »

Il commença à la secouer comme pour la réveiller mais elle fermait les yeux. Avec force, il vint l’enlacer contre lui, la serrant puissamment pour qu’elle comprenne parfaitement qu’elle avait le droit de l’être. Qu’est-ce qu’il y avait de choquant à être heureuse ? Qu’est-ce qu’il y avait d’étonnant à ce qu’elle le soit ?

« Je ne pouvais pas l’être … Ce n’est pas normal … A chaque fois que … je tentais de me rappeler de ma mort, ça ne se passait pas comme ça. Je n’avais pas … ça … Je n’avais pas cette vision … Je n’avais pas cela … Je n’avais pas cet instant. Kéran, depuis que tu sais à mon sujet, depuis que tu sais que je suis en toi, tout est différent. Je ne comprends plus rien … Je ne sais pas pourquoi je suis heureuse dans mon passé. Comment est-ce que j’ai pu l’être ? Comment est-ce que j’ai pu … sourire comme ça ? »

Elle tremblait ? Elyséa était en train de trembler ? Est-ce qu’elle était en train de pleurer ? Quand même pas non ? Ce n’était pas possible qu’Elyséa était en train de pleurer, n’est-ce pas ? Il chercha à voir son visage mais elle ne pleurait pas … Sans rien dire maintenant, elle vint enfouir sa tête sur son épaule, chose assez difficile car elle était plus grande que lui.

Bien plus grande même mais … Elle semblait si faible et chétive … Quelque chose l’avait traumatisé. Le fait qu’elle fut heureuse dans le passé … avant qu’elle ne meure. Comment était-ce possible de se mettre dans un tel état alors que l’on était heureuse ? Comment était-ce possible ? Il ne voyait pas … Il ne comprenait pas.

« Tu veux arrêter ce souvenir, Elyséa ? Ca serait la meilleure chose à faire. »

« N … Non … Il faut que tu le voies … Et il faut que je le voies. Il faut que je comprenne. Il faut que je trouve cette raison aussi. Il le faut ! »

« D’accord, comme tu le désires, c’était pour toi, je m’inquiétais. »

« Ne t’inquiète pas … Ne t’inquiète pas du tout à mon sujet mais … Kéran … Est-ce que je peux …rester un peu plus longtemps … s’il te plaît ? » demanda-t-elle d’une voix assez faible alors qu’il était à son tour étonné. Elyséa lui demandait un tel service ? Sans rien dire, il exerça une plus forte pression sur le corps de la femme.

Voilà … Comme ça, il en était sûr. Il en était sûr et certain … et maintenant … Il allait pouvoir assister à ses derniers moments. Les derniers moments de celle qui avait veillé sur lui pendant des années. Il se sentait un peu mal à cette idée.

En fait, il se sentait très mal mais préféra ne rien dire. Il regarda les scènes qui défilaient devant ses yeux. Parfois, dix minutes passèrent en quelques secondes … et il voyait les préparations pour la guerre … puis les affrontements entre les dragons … et tout s’arrêta subitement … comme gelé.

« C’est à ce moment précis que tout a commencé … je crois … Enfin, que tout s’est terminé, Kéran. » souffla la femme aux cheveux blancs dans ses bras.
Ils étaient où ? AH ! Il voyait les deux armées … Du moins, les dragons semblaient plus calmes qu’auparavant bien que certains bavaient et se débattaient comme luttant face à un ennemi invisible. Devant eux se trouvaient deux personnes … Un homme aux cheveux blonds et une femme aux cheveux violets. D’ailleurs, celle-ci … était sacrément fournie au niveau de la poitrine. Oui, c’était pas une bonne chose à regarder, il le savait mais quand même, sur le coup, c’était … assez impressionnant. Et l’homme, il le connaissait puisqu’il l’avait vu il y a quelques heures : Hodan. Là encore, il était impressionnant … Vraiment très impressionnant.

Mais pas autant qu’Elyséa … Car Elyséa se tenait en face de lui, une épée à la main … Une bien belle épée qu’il … avait déjà vue quelque part mais où ? Il ne savait pas … Mais pour le moment, ce n’était pas important, pas du tout même. Il avait peur … car derrière Elyséa se trouvait des centaines d’hommes et de femmes, accompagnés par des pokémons.

« Qu’est-ce que cela veut dire ? Vous allez vous … »

« Non, nous n’allons pas nous entretuer. Hodan n’était pas possédé … comme sa petite sœur Hyathéna. Voilà tout … Et donc, après tout cela, il a réussi à faire que les dragons reprennent le contrôle de leurs corps … du moins, ne soient plus aussi belliqueux malgré cette substance en eux. Et ainsi … Au lieu de nous entretuer, nous avons cherchés à faire la paix. »

« C’est donc une bonne chose, non ? Vraiment, tu avais tout d’une cheffe. »

« Vraiment … J’avais tout d’une cheffe … »

Elle disait avec lassitude avant de baisser un peu la tête. Lui ? Il continuait de regarder la scène, n’arrivant pas à entendre les paroles … Mais il sentait qu’il assistait à un moment historique. Où est-ce qu’Elyséa allait mourir ? C’était tout simplement impossible. La situation n’était clairement pas au massacre et …


Un carreau d’arbalète … Un carreau traversa son armure et son cœur, allant se loger ensuite dans celui d’Hodan. Qu’est-ce que … Ce n’était pas un dragon … mais un humain … Un humain qui avait tué Elyséa. Sauf qu’elle n’était pas morte sur le coup. Et il voyait la femme aux cheveux violets qui était auprès de son frère, celui-ci lui murmurant quelque chose. Elyséa faisait de même. Qu’est-ce que ça voulait dire ? Pourquoi est-ce qu’elle … Enfin, pourquoi est-ce ça c’était passé ainsi ? POURQUOI ?

« Une flèche perdue … Un acte inconcevable et pourtant, ce fut le cas, Kéran. »

« J’ai … J’ai vu ça mais quand même … Je … Attends un peu … Elyséa. »

« C’est ainsi que je suis morte … Aussi stupidement que prévu … C’était stupide, n’est-ce pas ? Vraiment stupide, je le sais … Mais un carreau en a terminé avec ma vie. »

« MAIS QUI A FAIT CA ?! ET SURTOUT POURQUOI ?! »

« Pourquoi ? Pourquoi penses-tu qu’il aurait fait cela ? » murmura calmement la femme aux cheveux blancs, posant ses yeux sur les siens.

« Il ? Ça veut dire que tu connais le nom, n’est-ce pas ?! »

« Kéran … J’étais une cheffe alors que j’avais à peine vingt ans … J’étais une femme … J’étais vraiment plus douée que les autres, sans fausse modestie. Il y a tellement de raisons de vouloir me tuer, Kéran. Tellement de raisons. »

« Mais tout ce que tu as fait … Tout ce que tu as fait a servi à rien alors ?! »

« Non, Kéran. Tu as vu avant que je meure ? Et Hodan aussi ? Nous avons murmuré quelque chose … Nous avons demandé à ce que tout continue … Que tout ne soit pas détruit par un acte isolé. Hodan s’est adressé à Hyathéna. Moi-même, j’ai … Enfin bon … Ne t’en fait pas, l’histoire est bientôt terminée. »

Ah ? Il restait encore une partie ? Mais … Il venait d’assister à la mort d’Elyséa. Il pensait à une mort glorieuse, une mort au combat, une mort après des blessures impressionnantes … Non … Tout ce qu’il avait vu, c’était une mort en traître. Une mort dans le dos … Il ne savait pas pourquoi … Il ne comprenait pas pourquoi mais …

« Kéran ? Pourquoi est-ce que tu pleures ? Allons … »

« Comment est-ce qu’une aussi grande femme que toi … a pu … a pu … »

« Tu pleures pour moi ? » demanda-t-elle avec un peu d’étonnement.

« Bien sûr que oui ! Je sais que c’est bête ! Je sais parfaitement que … »

« Stupide ? Je tiens à le confirmer … Mais la stupidité n’est pas toujours un défaut. »

Loin de là …Peut-être qu’il fallait attendre un peu avant de continuer l’histoire ? Le décor vint s’assombrir, devenant complètement noir. Ils étaient maintenant plongés dans le vide, flottant dans celui-ci. Pourtant, la femme aux cheveux blancs vint se mettre en boule mais autour de lui, comme pour former un cocon protecteur.

« Arrête donc de pleurer pour moi, Kéran. Je ne mérite pas ces larmes, je ne suis qu’une femme comme une autre. »

Elle savait pertinemment que ce n’était pas le cas ! Mais il se laissa envelopper par la douce chaleur issue de la femme. C’était bon … très bon et chaud … Il ferma les yeux. Il pouvait toujours dormir … dans son sommeil. Ca semblait stupide de penser de la sorte et pourtant, c’était exactement cela qu’il allait faire.

« On peut se reposer … s’il te plaît ? Du genre dix minutes … Si tu veux, tu peux aller avec les autres et ensuite … »

« Pourquoi le ferai-je ? Hodan leur raconte la même histoire mais de son point de vue. Et je ne suis pas très sociable, tu le sais parfaitement. »

« Dire que je suis tout ton contraire … Enfin, je crois. »

« Peut-être que oui … Kéran … Peut-être que tu l’es … Fermons les yeux. Nous continuerons mon histoire dans une heure ou deux. Et ne t’en fait pas, Katérina ne pourra pas te réveiller. »

« Euh … Je ne sais pas si ça va lui plaire de ne pas pouvoir me réveiller par contre. » répondit le jeune homme sans pour autant ouvrir les yeux.

Ca ne faisait rien non ? Du moins, c’est ce qu’elle pensait intérieurement alors qu’elle avait sa tête posée contre la nuque de Kéran. Sans rien dire, elle déposa un léger baiser contre celle-ci, ne sachant pas pourquoi … mais elle se sentait nostalgique en ayant Kéran contre elle. Elle n’avait pourtant aucune explication à celui, loin de là même. Mais bon … Cela n’était pas déplaisant alors pourquoi … devait-elle refuser cela ?

« Mouais … Y a quand même des morts plus glorieuses. »

« Pourtant, c’est ainsi que je suis décédé et nullement autrement. » rétorqua Hodan après les paroles de Katérina. Celle-ci haussa les épaules, tout le reste du groupe étant plongé dans son mutisme ou discutant entre eux.

« Mouais …C’est vrai que c’est moche quand même. Et cette Hyathéna qui t’accompagnait, ce n’était pas vraiment ta sœur non ? Tu te l’es faite ? »

« … … … Je ne crois pas que cela te concerne, Katérina. »

Oh ! Elle avait visiblement ciblé un point très mauvais puisqu’elle remarqua une ride de colère de la part d’Hodan au niveau de son front.

« Oh … Je faisais que me renseigner mais après réflexion, c’est vrai que tu n’y connais rien en femmes. » déclara la jeune femme, ne comprenant pas qu’elle venait de signer son arrêt de mort sociale.

« C’est bien pour cela que maintenant, tu possèdes un appareil génital masculin non ? »

« Hein Que … PUTAIN ! Tu ne pouvais pas te la fermer ?! »

Normalement personne n’était au courant à part Kéran ! PERSONNE ! Et lui venait … OH LE SALAUD ! Il se vengeait de la remarque qu’elle venait de lui faire ?! SALETE ! Elle ne méritait quand même pas ce genre de réflexions ! Ca ne se faisait pas !

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