Chapitre 194 : Elle

« Est-ce que cela sera assez long maintenant, Orié ? » demanda Samus alors que les deux femmes atterrissaient au beau milieu d’une plaine verdoyante.

Le jeune homme se trouvait sur le dos de Samus, ses deux mains autour de son cou, ses deux yeux fermés. Il ne semblait pas conscient mais respirait assez rapidement… La jeune femme aux cheveux blonds restait passablement inquiète tandis qu’Orié murmurait :

« Ca ne sera pas très long justement… Je sais où me rendre à partir de cet endroit. C’est principalement pou toi qu’il faut s’inquiéter… Est-ce que tu te sens capable de le porter pendant encore environ une heure ou deux ? »

« Je le porterai autant qu’il le faudra, il n’y a pas à s’en faire de ce côté. On peut y aller alors. » annonça Samus avant de se mettre à bouger. Orié, de son côté, avait décidé de prendre sa peluche avec elle, Samus ne sachant pas la raison de cette chose.

Pendant plusieurs minutes, elles continuèrent de marcher sur la plaine verdoyante jusqu’à arriver aux abords d’une forêt. Samus se tourna vers Orié, attendant de voir ce qu’elle allait faire. La jeune femme à la peluche de lapin pénétra dans la forêt sans rien dire. Ce fut après une nouvelle demi-heure écoulée qu’elle demanda à Orié :

« Il n’y a aucune créature belliqueuse ici ? »

« Si… Nous en sommes entourées… Mais il n’y a pas à s’en faire… Elles sont belliqueuses entre elles… Car lorsqu’elles voient un humain… Elles préfèrent s’enfuir. Il faut dire qu’elles ont une mauvaise expérience de ma personne… Chasser ou être chassé… »

« Qu’est-ce que tu veux dire par là ? Tu connais cette planète, je veux bien le… »

« J’ai vécu sur cette planète pendant plusieurs années… Puisque c’est là qu’elle m’a fait devenir ce que je suis… Et ce qu’Oria est devenue… »

« Qui est cette elle ? Tu n’arrêtes pas d’en parler… Je… »

« Tu vas le savoir bien assez tôt… Nous arriverons très prochainement devant son laboratoire… Enfin… Laboratoire… Disons que c’est assez bien caché, il faut l’avouer. »

« Je ne vois pas de quoi tu parles… Mais je pense qu’il me suffit d’attendre… »

Orié hocha la tête sans sourire, continuant à marcher à travers les arbres. C’est vrai… que la forêt semblait bien vivante autour d’elles… Mais rien, ni personne, ne semblait venir les déranger. Ils avaient peur… d’elles ? Ou plutôt d’Orié ? Pourquoi ça ? Elle était assez chétive, n’est-ce pas ? Ou alors…

Oui… Cela devait être surement la raison de cette peur… La jeune femme était effrayante en un sens… Ses réactions et ses gestes… comme ses paroles… Son ton… Tout en elle pouvait faire exprimer une crainte bien réelle… C’était même pour cela que la première fois, elle s’était méfiée d’elle… Mais maintenant qu’elle la connaissait mieux, elle savait pertinemment que la jeune femme n’était pas forcément comme ça…

« Et bien… Nous voilà arrivées… Je pense qu’elle sera assez étonnée de me voir… Je ne lui ai plus donné de nouvelles depuis des semaines voir des mois… »

Au beau milieu de la forêt… se trouvait une sorte de minuscule cube fait de métal… Orié s’approcha de celui-ci, appuyant sur une partie du cube. Un petit vrombissement et le cube s’ouvrit, permettant de pénétrer à l’intérieur.

« Si tu veux bien venir dès maintenant… au lieu de perdre du temps… »

« Oui, oui ! Mais il faut avouer que ça surprend quand même un peu ! Qu’est-ce que ça fout dans cet endroit ?! Personne ne pourra le… Ah… C’est justement pour ça… pour que personne ne sache qu’il y a quelqu’un à cet endroit, c’est ça ? »

« C’est exact… Je pense qu’elle doit être encore en train de préparer diverses choses. »

GRRRR… Elle évitait de montrer sa colère… Cette elle… Cette elle ! Toujours elle ! Elle allait bientôt deviner qui était cette elle ! Elle allait bien savoir qui se trouvait sous ce fameux elle ! Mais bon… Sa colère s’estompa aussi rapidement qu’elle était venue, un petit gémissement de la part d’Orion se faisant entendre. Zut… Elle devait se dépêcher ! Bon ! Où était cette personne ?!

Elles se déplacèrent à travers un dédale de couloirs, Orié semblant encore une fois savoir exactement où elles allaient, la jeune femme aux cheveux noirs arrivant devant ce qui semblait être une porte faite de métal… mais salement noircie… Comme si elle avait été le résultat de bon nombre d’explosions.

Orié toqua plusieurs fois à la porte, rien ne se passant avant que des bruits de pas ne se fassent entendre… Des pas assez lents… comme si la personne était du genre imposante et lourde à se déplacer. Plusieurs cliquetis se firent entendre, la porte se mettant à grincer avant qu’une voix féminine ne se fasse entendre :

« Et bien… Je ne pensais jamais te revoir… Orié… Comment cela se fait-il que tu sois revenue ? Est-ce que par hasard, tu… »

« Oui… Mère… Ce qui devait se produire… s’est passé… »

« OH ! Donc tu l’as vraiment ramené… Enfin… Je… Je ne sais pas trop… »

La voix avait une légère intonation étonnée… et un peu apeurée… Elle n’arrivait pas à voir qui se trouvait de l’autre côté… La porte n’avait été ouverte que faiblement… Qu’est-ce que ça voulait dire ?! C’était quoi ça ?! Elle s’écria, Orion sur son dos :

« Si vous pouvez sauver Orion, faites-le au lieu de perdre du temps à vous cacher ! Il est en danger de mort à cause du phazon jaune ! Orié m’a dit que vous pouviez le sauver ! »

« Orion… Théodore… n’est-ce pas ? Il n’est pas conscient alors ? »

« Si il était conscient et en pleine forme, je ne le ramènerai pas ici ! Et puis-je… Attendez un peu… Théodore ? Comment est-ce que vous connaissez le véritable nom d’Orion ? »

« Comment est-ce que je ne pourrai pas connaître le nom de l’enfant que j’ai élevé ? »

Les paroles avaient été prononcées sur un ton extrêmement doux. La porte s’ouvrit complètement, invitant les deux personnes à rentrer à l’intérieur. Quelques minutes après, le jeune homme était en train de baigner dans une cuve remplie d’un liquide jaune. Samus et Orié ? Elles n’étaient pas dans la pièce où Orion se trouvait.

« Vous êtes… Personia ? Je… Orion savait que vous étiez vivante mais… »

« Grand frère se doutait que j’étais envoyée par maman… C’est tout… Il en était même certain… Mais il n’osait pas poser la question… »

« Oui mais bon… Vous êtes vraiment Personia ? »

La personne devant elle hocha la tête alors qu’elles étaient toutes assises autour d’une table… Cette femme… Elle mesurait plus de deux mètres vingt… Et des cornes de bouc violettes… Elle avait des cheveux blancs… un peu comme ses yeux bien qu’elle n’était pas aveugle… Enfin… Cela semblait être sa couleur normale… Et puis… Elle était vraiment imposante… Sa couleur de peau était violette mais malgré sa taille, elle était assez maigre… Enfin, l’unique chose qui n’était pas maigre… chez elle… était plutôt sa poitrine… Elle jeta un regard à la sienne, remarquant qu’elle lui faisait concurrence dans ce domaine.

« Y a-t-il un problème… mademoiselle Samus Aran, c’est cela ? Je ne pensais pas que la chasseuse de primes la plus célèbre de l’univers se présenterait devant moi. »

« Il faut dire que je ne savais même pas que vous existiez… avant de connaître Orion. »

« Orion… sera rétabli… J’ai tout fait pour réussir à le calmer actuellement, vous n’avez pas à vous en faire à son sujet, il s’en sortira. »

« Tant mieux… Pfiou… Enfin une bonne nouvelle après toutes ces emm… »

La jeune femme aux cheveux blonds poussa un profond soupir de soulagement, fermant les yeux alors que la femme à la peau violette lui faisait un léger sourire. Celle-ci posa son regard sur Orié puis sur la peluche qu’elle avait dans ses mains. Tiens… donc… Qu’est-ce que tout cela voulait dire ? Elle lui demanda d’une voix calme :

« Pourrai-je savoir où tu as obtenu cette peluche ? Je ne crois pas que tu en avais une quand tu es partie, n’est-ce pas ? Ou alors, il se peut que je me trompe, ça ne serait pas la première fois.  Même si, je dois avouer que cette peluche… te caractérise bien. »

« Elle m’a été offerte par mon grand frère… Par Orion… Il savait qu’elle m’allait très bien… Et donc… Il me l’a achetée… sans même que je puisse refuser… Je voulais te la montrer. »

« Hum… Et bien… Il est très joli… Je vois qu’Orion est un gentil garçon… Oui… Un très gentil garçon… Je ne m’en suis jamais doutée… » murmura la Dranienne.

« Pourquoi est-ce que vous avez fait ça ? Pourquoi est-ce que vous avez abandonné Orion alors qu’il n’avait que huit ans ? Pourquoi est-ce que vous avez décidé de faire semblant de mourir il y a plus de treize ans ? Qu’est-ce que cela vous a apporté ? » demanda Samus en regardant Personia dans les yeux comme si elle attendait une véritable réponse de sa part.

« Je… Je ne peux pas y répondre… Mais pourquoi vous me posez cette question ? Et puis… Je ne pensais pas qu’Orion… irait en parler à quelqu’un d’autre à ce sujet… J’avoue que… »

« Que quoi ? Pourquoi ça ? Je vais vous le dire ! Je suis la petite amie d’Orion et il est donc normal que je m’occupe de ça ! Que je me préoccupe de ce qu’il a vécu ! Vous êtes quand même sacrément irresponsable pour avoir laissé un gamin de huit ans se débrouiller avec le foutu empire que vous avez monté il y a de cela des années ! »

« Il avait… la force mentale… pour y arriver… »

« OH OUI ! Ca, je ne peux pas le cacher qu’il était doué pour ça ! Tellement doué qu’au final, il a préféré faire semblant de mourir à l’âge de treize ans car il ne supportait pas la pression !

Être capable d’une chose ne veut pas dire qu’on doit forcément la faire ! Telle mère, tel fils ! Sans même le savoir, il a imité le moindre de vos gestes ! Laissez- moi réfléchir, vous n’êtes même pas capable d’aller le voir lorsqu’il se réveillera ! Et vous savez pourquoi ?! Car vous êtes un véritable mur au niveau des sentiments ! Comme Orion ! Mais j’ai réussi à briser ce mur et à le réduire en miettes ! »

« Je… Je… De quel droit est-ce que vous vous permettez de me dire ça ?! Sans moi, Orion serait en train d’agoniser sans que vous puissiez faire quelque chose ! Alors je vous prie de bien vouloir vous calmer, d’accord ?! Je ne suis pas la mère biologique d’Orion et je ne le serai jamais ! Je n’ai pas d’enfants et je n’ai pas de famille ! »

« Hum… Est-ce que je peux discuter avec elle, Samus ? »

Que… Quoi ? Elle venait d’entendre une voix ? La jeune femme aux cheveux blonds hocha la tête, faisant apparaître son armure au niveau de son bras droit alors que la voix de Noxis se faisait entendre une nouvelle fois.

«  Tu n’as pas de famille ? Je ne pensais pas que tu étais ainsi, Personia… »

« No… Noxis ? Qu’est-ce que tu fais avec la chasseuse de primes ? Où est-ce que tu es ? »

« C’est ainsi que tu salues ta grande sœur après ton exil ? Même pas un bonjour ou un bonsoir ? Vraiment… Qu’est-ce qu’il ne faut pas entendre… Je suis dans le vaisseau de Samus… si tu veux tout savoir… »

« Pourquoi est-ce que tu n’es pas venue ? Cela… m’aurait fait plaisir… de… »

« Tu n’as pas très bien compris… Tu es un peu comme Orion… Dès qu’il s’agit des sentiments… Des fois… Vous comprenez très mal… Je suis dans le vaisseau de Samus… Car je suis partie intégrante de ce dernier… »

« Qu’est-ce que ça… Tu… Tu… Noxis ? Grande sœur ? Quand ? A quel… Pourquoi ? » commença à dire Personia d’une voix tremblante.

« Oh… Disons que le cas de conscience que ma sœur avait m’a forcé à penser moi-même à la situation sur notre planète… et sur ses habitants… J’ai donc décidé de partir de celle-ci, de devenir une chasseuse de primes… et puis bon… La vie d’une chasseuse de primes ne dure jamais très longtemps… Surtout lorsque l’on n’est pas entraînée pour ça… »

Samus observa Personia pendant quelques instants, voyant la Dranienne prendre sur elle-même pour se retenir de pleurer. Sa poitrine se soulevait très rapidement, signe qu’elle était en proie à des sentiments qui la traversaient de toutes parts pour lui rappeler qu’il était inutile de mentir lorsqu’il s’agissait de ce genre de choses. La voix de Noxis reprit :

« Tu as bien élevé Orion… Mais un peu trop à ton image… Tu sais aussi bien que moi que… Ce n’est pas ça qui est bon pour lui… Vas le voir à son réveil… et parlez un peu… tout les deux… Je suis sûr que ça vous fera du bien… »

« Non… Je ne peux pas… Noxis… Je suis désolée mais… Je n’ai… Je n’ai pas le courage… de le regarder en face… Surtout pas… Même si… J’avais demandé à Orié de me le ramener… Je pensais que j’étais préparée mais… Ce n’est pas du tout le cas… »

« Il le faut, Personia… Il le faut absolument… Le jeune homme est promis à une mort certaine… Est-ce que tu veux ça ? »

Une mort certaine ? Qu’est-ce que ça voulait dire ? Elle regarda Samus, la jeune femme aux cheveux blonds détournant le regard avant de faire disparaître son armure au niveau de son bras droit. Orion… allait mourir ? Pourquoi ? Comment ? Quand ? Elle… Elle… Elle n’était pas au courant de ça…

Où est-ce qu’il était ? Ses yeux s’étaient ouverts lentement… Et il sentait qu’il n’était plus envahi par le phazon… Il avait un masque sur la bouche pour lui permettre de respirer alors qu’il baignait dans une cuve… Le liquide était en train de diminuer ? Ah… Il allait pouvoir respirer à l’air libre… La cuve descendait à son tour alors qu’il regardait autour de lui.

« C’est quoi cet endroit ? Je ne crois pas le connaître… »

« Nous sommes dans mon laboratoire, Théodore… »

Il sursauta, entendant une voix derrière lui qui le força à se retourner. Il écarquilla les yeux, se demandant qui était cette personne en face de lui… Elle était encore plus grande que lui… Qu’est-ce que… Il avait l’impression de la connaître.

« Théodore est le nom que tu portes… Mais nous avions un petit nom entre nous deux… J’ai cru comprendre que tu as décidé de l’utiliser comme pseudonyme définitif… n’est-ce pas Orion ? Est-ce que je trompe de surnom ? »

« Qui êtes vous… mademoiselle ? Ou madame… »

Il ne savait pas vraiment donner quel âge à cette personne… Mais elle connaissait son nom… Son surnom… Et il avait une drôle d’impression lorsqu’il n’avait regardé… Il sentait qu’il la connaissait… mais… Comment ?

« C’est vrai que… Tu ne m’as jamais vue… comme ça… C’est moi… Personia. »