Chapitre 12 : La vérité en face

ShiroiRyu
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Chapitre 12 : La vérité en face

« C’est difficile à croire mais …Cela me semble réel. » annonça l’homme derrière ses lunettes alors que Kéran avait déposé les dix noigrumes devant lui.

« C’est pourtant bel et bien le cas. Vous ne m’aviez pas demandé de les combattre, non ? Mais simplement de les capturer … J’ai réussi à en capturer une dizaine après ce qui me semblait être un combat. Je n’ai fait que profiter de l’occasion. »

« Ah … Tu me sembles un peu plus malin qu’au départ. On ne dirait pas ainsi … Mais tu es plutôt débrouillard. Je me disais bien que tu ne semblais guère blessé malgré la difficulté de la mission. Et surtout, réussir à en capturer une dizaine … Assez impressionnant en soi. »

L’homme ouvrit le bureau, sortant une bourse plutôt imposante avant de la tendre vers l’adolescent aux cheveux blancs argentés. Celui-ci la récupéra, le remerciant d’un hochement de tête avant que l’homme ne reprenne la parole :

« Bien bien bien … Si tu ne mises pas seulement sur la force et la brutalité pour arriver à tes fins, il se pourrait bien que tu réussisses à attirer le regard des guildes sur ta personne. Mais attention, si il s’avère que tu t’es fait aidé pendant cette mission, le jour où tu rentreras dans une guilde mais que tu n’auras pas fait tes preuves car tu es bien trop faible … Cela risque de très mal se passer. Rares sont les personnes vantardes à survivre dans ce monde. »

« Non, non … Je ne me suis pas fait aider. J’ai vraiment juste profité de l’occasion pour capturer ces Snubbulls et des Granbulls, rien d’autre. »

« Hum … Tu me sembles sincère dans tes paroles. Bon, qu’importe, prend donc cet argent, tu l’as bien mérité. Une dizaine de pokémons capturés, ce n’est pas rien, qu’importe la méthode utilisée pour arriver à tes fins. »

« Je vous promet que je n’ai rien fait de tel. Est-ce que … Est-ce que je pourrai revenir si j’ai besoin d’argent ou non ? » demanda l’adolescent, cherchant à contrôler sa nervosité. Avec une telle somme, ils allaient pouvoir tenir pendant plusieurs jours mais après ? Il lui fallait un travail … constant … Quelque chose qui lui permettrait réellement de survivre dans ce monde hostile et rien d’autre. Il ne pouvait pas réfléchir à autre chose.

« Pour ma part, je prends une seule et même personne qu’une fois par quinzaine de jours. C’est simplement pour le marché … et voir de nouvelles têtes prometteuses. Mais bon … Cela ne te concerne guère. Si tu as terminé, tu peux maintenant te retirer. »

« Merci encore pour l’argent et ce que vous avez fait. » répondit Kéran, l’homme faisant un simple geste de la main, terminant la conversation en lui disant :

« Je te conseille d’éviter d’être aussi crédule et gentil dans le futur. Tu ne survivras pas très longtemps dans ce monde avec un tel mode de pensée. »

Hein ? Comment ? Il attendit quelques secondes que l’homme continue à parler mais rien n’arriva. Qu’est-ce que ça voulait dire ça ? Il avait … parfaitement compris que le monde n’était pas si beau et joli … Il n’était pas stupide non plus hein ? Mais bon … Quand même … Il devait retourner à l’auberge avant que Sélia soit de retour. Il lui montrerait alors l’argent.

Lorsqu’il pénétra dans la chambre, elle était là, assise, les bras et les jambes croisées, tapant du pied droit avec nervosité. Et il comprit aussitôt qu’il allait avoir des problèmes, de très gros problèmes même. Elle n’était pas le genre de femmes à apprécier qu’on lui mente … ou alors qu’on ne lui obéisse pas, surtout quand … cela concernait sa sécurité.

« Je vais te poser une seule et unique question : où te trouvais-tu ? »

« Travailler pour avoir de l’argent. » répondit calmement Kéran bien que tout son corps tremblait en la regardant. Ne pas avoir peur d’elle … Ne pas du tout avoir peur … si il ne voulait pas avoir de problèmes. Ah … Plus facile à dire qu’à faire ! Elle le fusillait du regard ou presque ! Il allait sérieusement avoir mal !

« Et quel genre de travail un adolescent pourrait-il bien faire ? Pourquoi est-ce que tu as pris ton épée ? Pourquoi est-ce que tu es parti sans même me prévenir ? »

« Ca … fait plus d’une question, Sélia. » murmura l’adolescent en détournant le regard.

« Et je pense que tu vas y répondre, une par une, est-ce bien compris, Kéran ? »

« … … …. J’ai pris mon épée car mon travail était un travail à faire seul … Et j’avais envie de converser avec Swar, c’est tout. »

« Swar bien entendu ! Depuis quand est-ce que tu as donné un nom au monstre qui habite ton arme ? Mais est-ce que tu réfléchis un peu à ce que tu dis ? A ce que tu fais ? Kéran ! BON SANG ! Un peu de jugeote, c’est trop te demander ? Tu n’es pourtant pas un imbécile ! Je suis revenue bien plus tôt que prévu car je voulais m’excuser de ces derniers jours et voilà ce que je trouve … Ce que je trouve ? RIEN ! RIEN DU TOUT justement ! »

Voilà qu’elle allait commencer à s’emporter. Il ne devait pas avoir peur … Elle ne lui voulait aucun mal, il le savait parfaitement … Mais quand même … Il avait peur … C’était tout. Car il n’avait pas encore répondu à toutes ses questions. Et lorsqu’elle saurait à son sujet … AH ! Rien que le fait d’y penser le faisait trembler !

« Alors ? Tu as perdu ta langue, Kéran ? » demanda la jeune femme aux cheveux azur avant de se relever, se positionnant à quelques centimètres de lui. Elle était toujours plus grande que lui … et plus impressionnante.

« Je … Non … Pas du tout, Sélia. Mais regarde tout ce que j’ai gagné ! »

Il allait peut-être la calmer en faisant une telle chose. Il sortit l’épaisse bourse de sa poche, la montrant à Sélia qui parut surprise puis suspicieuse. Elle récupéra la bourse, l’ouvrant avant d’y jeter un œil à l’intérieur. Son regard ne tarda pas à se poser à nouveau sur l’adolescent, reprenant la parole d’une voix calme :

« Et dis-moi … Quel est le travail que tu as fait pour avoir autant d’argent ? »

« Euh et bien … C’est assez simple. » balbutia l’adolescent, cherchant à exprimer ses paroles de façon correcte et détournée. « C’est un homme qui avait besoin de quelques personnes pour récupérer des pokémons. Il donnait les noigrumes et on devait aller les chercher. »

« Tu es sûr qu’il … avait simplement de chercher et récupérer des pokémons ? Que ce n’était pas autre chose ? Car cela m’étonne qu’une seule personne ait besoin d’autant de pokémons, n’est-ce pas ? Combien de noigrumes avait-il avec lui ? »

« Euh … Euh … Plusieurs caisses … Sélia. » murmura Kéran avant de baisser la tête.

« Et tu as alors évité de réfléchir plus de trois secondes en ne te disant pas que cela pouvait paraître louche, Kéran ? Tu es quand même pourtant loin d’être idiot non ? »

« Je … Je … Ce n’était pas pour ça que j’étais venu ! J’étais venu simplement pour gagner de l’argent ! C’est tout ! Car on en a besoin ! »

« Quitte à capturer de pauvres pokémons sans défense ? » dit-elle sur un ton des plus secs, l’adolescent se tétanisant. On ne pouvait pas lui mentir … On ne pouvait pas lui voiler la vérité. Elle la trouverait facilement. Quoi faire ? Qu’est-ce qu’il devait faire ? « JE T’ORDONNE DE ME REPONDRE, KERAN ! MAINTENANT ! »

« Ils n’étaient pas sans défense ! Lorsque je suis arrivé, ils étaient dans un sale état ! Je n’ai fait que les capturer ! Je ne les ai sauvés ! Ils étaient en train d’agoniser ! Ils se sont faits attaqués par je ne sais quoi et la majorité était déjà morte ! »

« TU VEUX ME FAIRE CROIRE QUE TU LES AS SAUVES ! »

La claque qu’il se prit sur la joue droite le fit pencher sur le côté, l’adolescent poussant un cri de douleur avant d’avoir les yeux légèrement embués. Il n’allait pas pleurer mais se prendre une telle … chose de la part de Sélia, ça faisait encore plus mal que n’importe quel autre coup de la part de n’importe quelle autre personne.

« Arrête un peu tes bêtises, Kéran ! C’est à moi de m’occuper de toi et pas l’inverse, c’est bien compris ! C’est moi qui suis l’adulte dans notre famille ! »

« Tu n’es pas de ma famille, je te rappelle ! Tu es ni ma mère, ni mon père, ni ma sœur, ni rien du tout ! Tu es juste une fille qui a décidé de prendre soin de moi ! Maintenant, je suis aussi un adulte ! Je le suis bientôt ! Et je devrais alors me débrouiller seul ! »

« Retire … Retire … Retire ce que tu as dit, Kéran. » murmura Sélia, la tête baissée alors que l’adolescent tremblait en même temps.

« Non … Je ne le retirerai pas … car je dis la vérité, tu le sais très bien. Je ne suis plus un enfant … Et en même temps … Je … Je … »

« Retire ce que tu viens de dire … Kéran. Je ne te le demanderai pas une troisième fois. Retire ce que tu as dit … sur le fait que … nous ne sommes rien … »

« Mais c’est vrai ! Nous ne sommes pas liés par le sang. Je ne mens pas ! J’en ai juste assez de tout ça, Sélia ! Si tu ne veux pas que je vienne t’aider ou que je me débrouille seul, autant faire comme si il n’y avait jamais rien eut ! Je t’adore … Je t’adore … vraiment Sélia … Tu es vraiment la personne la plus importante à mes yeux … mais si tu continues à me rabaisser alors que je ne fais que t’aider … quand tu en as le plus besoin … Ça ne va plus aller. »

« … … … Tu es mon unique famille, Kéran. » dit-elle tout simplement sans continuer à parler. Elle n’aimait pas … ce que sa famille devenait … ce que … Kéran était en train de faire. Non, ça ne lui plaisait pas du tout, loin de là même.

« Et toi aussi … Or … C’est bien beau d’avoir une grande sœur … Mais elle doit laisser son petit frère sortir du nid car sinon, il n’apprendra jamais à se débrouiller seul. »

« Tu as obtenu une arme possédée, tu as capturé des pokémons sans défense pour de l’argent, tu commences déjà à te diriger vers la mauvaise pente … »

« Alors, tu n’as qu’à me guider … et non pas m’abandonner sur le bord du chemin. Tu es en train de refaire ta vie tout en m’emprisonnant ici, Sélia. »

Elle releva son visage, posant ses yeux rubis sur lui. Maintenant, elle n’était plus en colère. Elle ne laissait transparaître aucune émotion avant de quitter la chaise sur laquelle elle était assise. D’un geste lent, elle tendit ses deux mains vers lui avant de murmurer :

« Viens Kéran … J’ai vraiment besoin de te serrer contre moi pour le moment. »

« Je … D’accord, Sélia. » chuchota l’adolescent avant de s’approcher d’elle, laissant tomber son épée avant d’aller dans les bras de Sélia. Il ferma les yeux, sa tête logée contre sa poitrine alors qu’elle faisait de même. La main de la jeune femme caresses cheveux blancs alors qu’elle lui soufflait avec délicatesse :

« Désolée … C’est toujours très dur … Kéran. Je n’ai toujours pas réussi à tirer un trait sur cette histoire et je ne veux surtout pas que tout recommence. Après la mort de mon pokémon, je ne veux vraiment pas … perdre quelqu’un d’autre. »

« Alors, il faut que tu m’aides tout simplement hein ? Tu verras … Je ne me ferai pas possédé par mon arme … Et si il faut, j’apprendrai à me débrouiller sans … Mais pour ça, il faut que tu acceptes de m’aider, Sélia. Sans toi, j’aurai beaucoup de mal à grandir … Sans toi, je ne réussirai jamais à devenir un adulte. »

Elle comprenait … et elle ne pouvait rien faire pour empêcher cela. L’adolescent allait devenir un homme bientôt, il allait avoir sa majorité et elle devait tout faire pour qu’elle se passe bien. Mais qu’est-ce qu’il allait pouvoir faire ? Elle ne voulait pas qu’il se blesse.

« Sélia … Je veux t’accompagner … comme auparavant. Avant, ça ne te dérangeait pas que je t’accompagne … alors maintenant, ça ne devrait pas te déranger. »

« … … … Restons encore cinq minutes comme ça, Kéran. » murmura simplement la jeune femme, ne semblant pas être prête à lui répondre. Elle avait posé sa tête sur celle de l’adolescente, observant le mur avec neutralité.

Elle devait accepter ce qu’il demandait ! Elle devait accepter qu’il l’accompagne comme avant ! Elle devait vraiment arrêter de penser à son Pyroli ! Il ne disait pas qu’il fallait complètement l’oublier … mais simplement passer à autre chose. Sa capture de pokémons, il savait aussi bien qu’elle que ça n’avait pas été une bonne chose mais … Il s’était senti obligé d’accomplir ce genre de missions pour progresser.

Finalement, au bout de plusieurs minutes, elle arrête de l’enlacer, retirant le corps de l’adolescent du sien avant de le regarder avec délicatesse. Ses yeux rouges posés sur lui, elle reprit la parole sur un ton tendre :

« On va faire comme ça … Demain, toi et moi, nous quittons cette ville pour aller ailleurs. De toute façon, il ne restait plus grand-chose à faire ici. »

C’était donc vrai ? Il regarda la jeune femme pour savoir si elle disait la vérité ou non. D’après ce qu’il voyait, elle était sincère. Il hocha la tête en faisant un petit sourire, lui disant sur le même ton qu’elle :

« Merci beaucoup de me refaire confiance, Sélia. Je suis sûr qu’on pourra redevenir comme avant tous les deux. Ça ne doit pas être bien difficile. Et puis, ainsi, tu pourras toujours tourner le dos à un adversaire, je serai là pour te protéger. »

« Toi ? Me protéger ? Comme c’est mignon … Tu ne penses quand même pas me protéger tout de suite hein ? Il va falloir faire encore plus d’efforts que ça. »

Elle rigola légèrement, plus attendrie par les paroles de Kéran qu’autre chose. Celui-ci fit une petite mine boudeuse, récupérant son épée avant de la présenter à Sélia.

« Dorénavant, je vais éviter complètement de l’utiliser. Mais il faudra quand même m’aider à apprendre à me battre avec une autre arme, Sélia. » dit-il en la regardant.

« Tu n’es pas forcément obligé d’utiliser un autre type d’arme. Dans le pire de cas … Si tu dois utiliser cette épée, il vaut mieux que tu apprennes à te battre à la base avec une épée. Hum … Avec l’argent que tu as récupéré et celui que j’ai mis de côté, il va sûrement être possible de te préparer au combat ou du moins à tes débuts. »

« Des courses ? Avec toi ? C’est vrai ? Ou alors, c’est juste un rêve et je vais me réveiller ? »

Une petite pointe d’ironie gentillette. Elle lui pinça la joue, l’adolescent poussant un petit cri de douleur avant de se frotter la joue, c’était douloureux. Mais pour aujourd’hui, peut-être qu’ils en avaient trop fait ? Elle vint s’asseoir sur l’un des lits avant de lui dire :

« Mais tout ça pourra attendre demain, Kéran. »

« Je veux bien te croire, Sélia. Je crois que j’ai eu ma dose d’émotions aujourd’hui … Et toi aussi, hein ? Mais … Vraiment … Si ça pouvait être … La dernière dispute comme ça. » murmura l’adolescent avec un peu de tristesse.

« On va toute faire pour que ça soit le cas, d’accord ? »

« D’accord, Sélia … Je te fais entièrement confiance. »

Elle ouvrit à nouveau ses deux bras pour que Kéran puisse venir dedans. Ce n’était pas que cela manquait à l’un ou à l’autre mais simplement … Après ce qui s’était passé aujourd’hui, chacun avait l’impression de mieux connaître l’autre. Sélia comme Kéran, les deux personnes s’étaient rapprochées encore plus qu’auparavant.

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