Verset 7 : Le jour où la tour s’effondra

ShiroiRyu
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Verset 7 : Le jour où la tour s’effondra

« Mana… Mana… Je n’y arrive plus… » murmura Alan, le visage tourné vers le sol.

« Tu n’arrives plus à quoi ? » lui demanda t-elle alors qu’il passait sa main ensanglantée sur son propre visage, le barbouillant de sang.

« Je n’arrive plus à pleurer… Je n’y arrive plus… Je crois que … Je suis mort… intérieurement… Ah… Je suis triste… Mylène est morte mais… Je n’arrive pas à pleurer… Je le voudrais tellement… Je voudrais tellement pleurer… crier… geindre… la serrer dans mes bras… mais je n’y arrive pas… Qu’est-ce qui se passe Mana ? »

« Je ne… sais pas du tout… Je ne peux pas t’aider, Alan. »

Oh que si, elle le pouvait mais la vérité était parfois difficile à accepter. Comment lui dire que ses sentiments venaient de prendre un dernier virage pour disparaître presque définitivement de son existence ? Il avait tellement pleuré, tellement souffert, tellement… de choses… qu’au final… Il s’était mis à devenir insensible.

« Mylène… est morte… Mais j’ai préservée sa beauté… au visage… »

« Est-ce que… Mylène était ta première pokémon, non ? »

« C’est exact… Mylène était une petite fille aux cheveux bleus… En fait… Je l’ai découverte peu de temps après que j’ai connue Zena… Normalement… Nous n’avons pas de pokémons aussi jeune… Mais dans mon cas, Mylène… »

« Ah… Ah… Ah… Ah… Ca faisait sacrément mal… Elle n’y a pas été de main morte ! » marmonna une voix avant que le corps d’Airoinos ne se soulève.

« Encore vivant ? Je vais m’occuper de ça tout de suite. C’est la moindre des choses… après ce qu’Alan subit de jour en jour à cause d’êtres comme vous. » annonça Mana tout en s’avançant vers Airoinos.

« Êtres comme nous ? Il n’y avait aucun problème avant ton apparition ! Et celle du roi noir ! Auparavant, tout était calme et tranquille ! »

« Dans un monde stérilisé… Un monde parfait n’existe pas… car il n’évolue pas. Si rien ne change, tout se bloque… et cela emmène peu à peu à la détérioration de la planète. »

« Comme si tu connaissais quelque chose à ce que tu disais, ça me fait bien rire de l’entendre de ta part ! On commence à se dire que tu n’es pas une gamine ordinaire !  Mais ça… Ce n’est pas à moi d’en parler… Plitana ou Oricalk s’occuperont de vous mais avant… J’emporte le roi noir avec moi ! Que… »

Airoinos s’arrêta de parler alors que Mana se retournait vers Alan. Celui-ci faisait quelques pas lentement vers l’homme à la moustache bleue, s’approchant de lui d’un air robotique. Mylène était morte… C’était alors à lui d’au moins venger sa mort… Ce n’était pas à quelqu’un d’autre de s’en occuper… Pas du tout… Ce n’était pas à Mana… Pas du tout…
Diverses mains blanches commencèrent à apparaître autour d’Airoinos, fonçant en direction d’Alan avant de disparaître complètement.

« Comme avant… Pourquoi ? » murmura Mana alors que ses mains noires et celles des enfants reculaient.

Personne ne savait ce qui se passait exactement mais Alan se positionna devant Airoinos, celui-ci ne pouvant reculer, se trouvant contre le mur dans lequel il s’était enfoncé à cause de l’attaque de Mylène. Soudainement, les deux mains d’Alan se placèrent au niveau du cou d’Airoinos, commençant à l’enserrer en même temps que l’homme se retrouvait soulevé au-dessus du sol. Alan murmura d’une voix calme :

« Une vie pour une vie… hein ? Mylène… était importante pour moi… Au même niveau que Zena… Mana et les enfants…. »

Elle ? Et les enfants ? Il mettait les enfants et elle au même niveau que Zena ou Mylène ? C’était comment dire… Euh… Intéressant de le savoir…

«  Ne sont pas encore à ce stade… Je crois qu’ils ne le seront jamais… Zena… était très importante à mes yeux… Mylène… l’était tout autant… Mylène était si gentille… Si agréable à vivre… Elle n’aimait pas se battre… Elle trouvait que ses tentacules étaient affreuses… Et pourtant… Pour une personne comme toi… Elle a été obligée d’utiliser cette tactique… »

« Je… Je n’arrive plus à respirer… Je… Je… Arg… Arg… »

Airoinos tentait de se débattre mais rien ne marchait. La poigne d’Alan était bien plus forte que ses débattements. De plus, ses mains blanches disparaissaient à chaque fois qu’elles tentaient de toucher le jeune homme… Qu’est-ce qui se passait ? C’était ça le roi noir ?! Un roi insensible à leurs attaques ?! Mais à cette allure, il allait…

« Je vais juste te faire disparaître de leurs vies… Comme tu as fait disparaître Mylène de la vie… Comme vous l’avez fait avec Zena… »

« Je… Je n’ai rien fait avec… cette Zena ! ARGL… Aggg… »

Oxygène… Il avait besoin d’oxygène et vite ! Mais les mains continuaient de serrer son cou et cela avec de plus en plus d’insistance et puissance. Ah… Il commençait à défaillir… Pourquoi devait-il … mourir comme ça ? Pourquoi… Pour…

« Mort. »

Il fit tomber le corps sans vie d’Airoinos au sol, se tournant lentement vers les enfants et Mana. Il se dirigea vers eux, puis vers le cadavre de Mylène, passant une main dans ses cheveux bleus avant de murmurer qu’il était désolé de ne pas pouvoir pleurer pour elle. Il les redressa, abandonnant le corps de Mylène avant de dire :

« Pourquoi est-ce que vous faites cette tête d’enterrement ? Nous devons monter encore plus haut… Je crois que nous devrions nous rendre sur le toit… Je crois que c’est la meilleure chose à faire. Oui… Trouvons la sortie de cet endroit, ça sera bien mieux. Je vous suis, Mana, tu peux prendre les commandes de la troupe ? »

« Oui… Je veux bien… Mais non… Les enfants, passez devant… On vous suis derrière. Moi et Alan, on va avoir une petite discussion. Je suis sûre qu’elle va être très intéressante… »

Les enfants hochèrent la tête, guidant Alan et Mana vers ce qui semblait être la sortie. Le temps qu’ils arrivent jusqu’à l’ascenseur, cela allait lui permettre de parler avec Alan. Ce geste accompli… n’était pas n’importe quoi… C’était même bien pire que ça.

« Alan… Je tiens à te signaler que tu viens de tuer un homme… ou un pokémon si tu préfères. Comment ressens-tu ton premier meurtre ? »

« Ressentir ? Je n’ai rien… ressenti de spécial… Je voulais juste que Mylène… repose en paix… Et je crois que j’ai réussi grâce à ça… Elle peut dormir tranquillement… »

« Tu n’as pas mal au cœur ? Tu peux me le dire si tu veux… »

« Je croyais que nous n’étions pas sensé nous intéresser l’un à l’autre ? Enfin… Mana… Je me sens vide… de toute existence… J’ai tout perdu… Tout… Vous êtes déjà morts… Vous ne comprenez donc pas que je vais grandir et vieillir… sans ceux qui ont fait mon existence… Sans ceux qui m’ont aidé à être ce que je suis… »

Elle hocha la tête, semblant le comprendre alors qu’elle gesticulait un peu pour permettre à l’une de ses mains de sortir de sa camisole. Elle tendit sa main vers Alan, celui-ci venant la récupérer sans plus rien dire. Visiblement, la discussion venait de se terminer aussi rapidement qu’elle était venue… Mais après ça…

« On prend l’ascenseur jusqu’à où maintenant, grand frère ? » demanda Hansel.

« Hein ? Ah… Jusqu’au sommet. Cette fois-ci, il n’y aura pas Airoinos pour nous mettre des bâtons dans les roues. Que l’on y aille tout de suite, ça sera mieux. »

« Alors direction le sommet ! Si vous voulez bien rentrer correctement dans l’ascenseur, celui-ci va se refermer d’ici quelques secondes. » annonça Mana d’une voix enjouée.

« Ce n’est pas très drôle, Mana… Je suis au regret de te l’annoncer. »

Et voilà qu’elle tentait de le faire sourire mais cela ne marchait pas. Pfff… Elle était bête ou quoi ? Elle n’avait pas besoin de le faire sourire… comme elle n’avait pas besoin de le faire souffrir. Si seulement… Ses pokémons n’étaient pas morts… Ils avaient été le dernier rempart… La dernière chose qui lui rappelait qu’un jour, il avait eu une existence paisible… Mais maintenant… Ce n’était plus le cas et de loin…

« Ce qui nous attend au sommet de la tour… sera encore plus effroyable qu’auparavant… »

« Comment est-ce que tu pourrais le savoir, Alan ? Tu n’es pas devin. »

« J’ai simplement cette impression… Voilà tout… Ce n’est pas difficile… à deviner. » marmonna t-il alors que l’ascenseur émettait un bip sonore indiquant qu’ils étaient arrivés à destination. Le seul bruit qui alla couvrir le bip fut celui d’un hélicoptère… qui était posté sur le toit… derrière quatre personnes. Oricalk, Plitana et leurs deux propriétaires.

« Nous vous attendions… » annonça le vieil homme.

« Cette tour va s’effondrer d’ici quelques minutes… avec vous. » prononça la vieille femme.

« Et le roi noir disparaîtra…  comme il est apparu… » murmura Plitana en regardant Alan longuement, lui faisant un petit sourire discret.

« Et nous mettrons alors un terme à cette courte ère de révolution. » signala Oricalk.

Alan resta parfaitement immobile, ne bougeant pas un seul instant alors que Mana tremblait légèrement de colère. Plusieurs de ses mains noires allèrent vers les deux humains mais elles furent repoussées par les mains blanches de Plitana, celle-ci disant d’une voix douce :

« Nous avons la jeunesse éternelle… car nous sommes constitués de métal… Nous ne vieillissons pas… Mais seul un groupe pourra gagner ce combat… Mais contrairement au roi noir… Oricalk et moi-même avons combattus le grand spectre… »

« Celui qui a disparu en même temps que le sacrifice d’une personne…. » reprit Oricalk.

« Mais qu’importe… L’heure n’est pas aux paroles… mais au départ… Si vous survivez à l’effondrement de cette tour… Peut-être que nous nous reverrons… De toute façon… Dorénavant… Plus rien ne sera comme avant… Il faut se tourner vers l’avenir… lorsque le passé est ravagé. » dit Plitana tout en regardant Alan.

Se tourner vers l’avenir… le futur… alors qu’il n’avait plus de passé ? Ah… Que c’était drôle… et philosophique… Mais malheureusement, il ne se sentait pas le cœur d’être philosophique ou drôle… Les quatre personnes grimpèrent dans l’hélicoptère, Mana serrant les dents alors qu’Oricalk terminait enfin la discussion :

« Si vous vous en sortez… Rendez vous au centre de la terre… Là où tout s’est terminé. Je pense que Mana saura de quoi je veux parler… »

L’hélicoptère disparut dans les cieux après s’être envolé, la tour commençant à trembler de toutes parts. Les enfants poussèrent des petits cris de surprise tandis que Mana cherchait à reprendre son calme. Oricalk et Plitana… Ils semblaient en connaître pas mal sur cette histoire. Elle se tourna vers Alan :

« Qu’est-ce que tu fais là ? On doit partir d’ici au plus vite ! Ramène-toi vite ! »

« Mana… J’ai une question… Pourquoi est-ce que tu caches tellement de choses ? Oricalk… m’a dit d’oublier le passé… Mais ce n’est pas aussi simple que ça… Est-ce que tu le sais ? Est-ce que tu sais que ce n’est pas simple… que c’est loin d’être facile ? »

« Je ne te cache rien… qui te concerne voilà tout. Donne moi la main, nous quittons cet endroit avant qu’il ne s’effondre. Ca vaut mieux… Allez… Donne la moi. »

D’un petit geste de la main, il repoussa celle de Mana, faisant quelques pas en se rapprochant du bord. Les enfants poussèrent des cris horrifiés alors que Mana haussait un sourcil. C’était quoi cette imbécilité qu’il était en train de commettre ? Elle commença à s’avancer vers lui mais il prit la parole :

« Et en quoi… est-ce que je te concerne ? Tu es née avant moi… Tu es morte avant moi… Nous n’avons rien à nous dire alors… Comme les enfants… Je pensais que je serais capable d’être un grand frère… et voilà le résultat… Voilà le résultat… J’ai perdu Zena… mes parents… Mes pokémons… J’ai tout perdu… Vraiment tout… »

« Mais ne raconte pas n’importe quoi. Bon… Je vais venir calmement vers toi et tu… »

« Tes mains noires dans ton dos… Elles ne pourront rien faire… Alors rappelle-les. »

« Je fais ce que je désire, ALAN ! » cria t-elle alors qu’elle projetait toutes ses mains noires vers lui pour l’empêcher de commettre l’irréparable.
Les mains noires se désintégrèrent en le touchant, comme si elles n’arrivaient pas à l’atteindre. Elle tiqua, faisant un pas assuré vers lui comme pour lui montrer qu’elle n’allait pas se laisser intimider. Les enfants, quant à eux, s’étaient réunis pour ne pas trembler. Ils avaient tellement peur de ce qui se passait… surtout que la tour commençait à sérieusement tanguer, prise par de nombreuses explosions.

« Maintenant, tu vas arrêter tes bêtises, et tu vas gentiment venir vers moi. »

« Pourquoi est-ce que je le ferais ? Donne-moi une raison… qui me pousserait à venir vers toi. Depuis le départ… De toute façon… Ce qui t’intéresse… est le roi noir. Je ne sais pas du tout… qui est cet homme… Et je ne veux pas le savoir… Je ne veux rien savoir… »

Il poussa un profond soupir, levant un pied dans le vide pendant quelques secondes, Mana s’arrêtant de marcher. Il remit correctement son pied droit à côté du gauche, se retournant à nouveau vers Mana qui émit un grand sourire démoniaque :

« Oh oui… Je vois… Je vois très bien ton manège, Alan. Tu veux que je t’avoue quelque chose. Que la mort ne serait pas pareille sans toi… Que tu me manqueras et que tu manqueras aux enfants… Mais ce n’est pas le cas. Tu vois… Tu es pathétique et détestable. Tu veux me faire croire que tu vas te jeter dans le vide mais tu sais quoi… Tu n’as pas le courage pour ça, tu n’auras jamais assez de cran pour ça ! »

« De cran ? De courage… Je ne sais pas… Pourquoi avoir du cran ? »

« Allez saute ! SAUTE ! Puisque c’est ce que tu veux ! Mais non, tu ne le feras pas ! Tu n’es pas capable de ça ! Tu veux jouer au grand et au dur mais tu n’y arriveras jamais ! Tu n’as pas assez de courage ! Alors viens vers moi ! » prononça t-elle avec des trémolos dans la voix.

« Non. » annonça t-il avant de lever un pied en avant, puis le second, plongeant dans le vide.

Qu… Qu… Quoi ?! Il venait de sauter ?! IL VENAIT DE SAUTER ?! Elle cria son nom avec rage, sa camisole se déchirant subitement au niveau des pieds et des mains pour lui laisser une liberté de mouvement optimale. Elle se jeta à sa suite alors que les enfants faisaient de même, des morceaux de béton et de vitre venant les rejoindre en même temps. Alan avait fermés ses yeux, ses bras croisés au niveau du torse, le visage calme et serein.

Tout s’était écroulé autour de lui… Ses fondations, ses relations, ses sentiments…
« Pourquoi régner dans un royaume désert de toute vie ? » murmura le roi noir en contemplant les champs vides devant son château.
L’homme au sang des Grands poussa un profond soupir, s’approchant du bord de la fenêtre de la plus haute tour de son palace.

« Ma Reine… Je viens vous rejoindre. » annonça t-il d’une voix solennelle avant de se préparer à faire un acte que l’on ne pouvait commettre qu’une seule fois dans sa vie.
Ce fut à ce moment là que le cri de sa plus loyale servante se fit entendre… Un cri dont il avait oublié tout le sens… mais grâce auquel il fut sauvé.

Erèbe, lorsque le monde s’écroule, verset septième

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