Chapitre 294 : Croire en son existence

« Hum… Cela fait déjà deux jours que tu te trouves ici, n’est-ce pas, jeune garçon ? »

Il hocha la tête d’un air positif alors qu’il mangeait tranquillement, une Gardevoir lui ayant servit son repas. Il avait quelques bandages sur le front et d’autres parties du corps mais ce n’était guère grave, c’était simplement pour lui dire où il devait faire attention. Car oui, malgré le fait qu’il n’était plus blessé, c’était l’intérieur du corps qui avait besoin de se reposer. Il murmura après avoir terminé de manger :

« Est-ce que vous savez quand je dois partir ? Je n’ai pas prévenu ma famille. »

« Nous ne le savons point. Tu as réussi à attirer notre sympathie à cause de ton intellect supérieur pour un jeune garçon de ton âge. C’est pour cela que je crois que le roi et la reine envisagent quelque chose à ton sujet mais nous ne savons pas quoi exactement. »

« Ah ! Est-ce que je peux vous poser une question ? » demanda t-il d’une voix douce et infantile, comme voulant jouer sur son jeune âge.

« Bien entendu, si nous pouvons t’y répondre. Je ne suis pas sûre de cela. »

« Qu’est-ce donc que la Tarsal aux yeux du démon ? Je connais très bien l’Onix de Crystal et toutes ces légendes… Mais la Tarsal aux yeux de démon… »

« Où est-ce que tu as entendu parler de cela ? » demanda la Gardevoir aubergiste en venant s’asseoir en face de lui. AH ! Il était toujours aussi… étonné de voir ces créatures agir de la sorte. Enfin, elles étaient des pokémons psychiques donc normalement très intelligentes à la base et puis… Comme elles étaient humanoïdes aussi…

« Quand je jouais un peu avec les Tarsal et les Kirlia ! Vous savez, hier… Ils m’en ont un peu parlé mais je ne sais pas du tout… Est-ce que ça a un rapport avec la cage ? »

« La cage ? Tu parles de celle près du palais royal ? Tu n’as quand même pas été jeté un œil, n’est-ce pas ? Ne me dit pas que tu as fait cela ? »

« Non ! Non ! Y a même des Gallames devant mais vous savez, quand y a une cage et toutes ces choses, ça donne envie de regarder mais comme je n’ai pas le droit… »

« Tu fais bien ! Ne t’approche jamais de cette cage ! Car tu n’es qu’un humain et surtout un enfant ! Surtout que tu as notre appréciation ! Faire cela serait passible de mort ! »

« D’a… D’accord… D’accord. J’ai parfaitement compris… » murmura t-il d’une voix lente et faussement effrayée alors qu’il baissait la tête.

« Allez… Ne pleure pas et ne fait pas cette tête, Théodore. C’est simplement pour que tu n’aies pas de problèmes. Tu peux aller jouer avec les autres. »

Il remercia la Gardevoir, celle-ci lui faisant un petit sourire alors qu’il quittait l’auberge. Oui… La journée, il allait jouer avec eux… Mais le soir, c’était complètement différent. Oui… Complètement différent mais cela, personne ne le savait, héhéhé.

« Tiens… Tu as faim, n’est-ce pas ? »

La nuit était rapidement tombée et cette fois-ci, il avait récupéré un peu de nourriture pour la donner à la petite Tarsal aux yeux dorés. Ah… Elle avait été apeurée… très apeurée même… Elle l’était encore un peu… Mais bon, c’était différent.

« Ermaga, c’est quand même un drôle de prénom, tu ne trouves pas ? »

« Ca veut dire… apocalypse… Je causerais… du tord à tout le monde… C’est ce qu’ils disent tous… quand ils parlent à côté de moi… »

« … … … Tes parents … … … Ce sont le roi et la reine, hein ? »

« Je crois… Je ne sais pas… Ca fait… Ca fait… cinq ans que je suis ici… Je ne connais que cette cage… réellement… Je ne sais pas… Je ne sais pas… »

… … … Il ne disait plus rien du tout, la regardant manger et dévorer avec appétit ce qui lui restait de nourriture… Ou plutôt ce qu’il avait gardé intentionnellement pour elle. Il ne pouvait pas s’empêcher de sourire en la regardant. Elle était si mignonne comme petite Tarsal. Il en oubliait presque Garmi.

« … … … Pourquoi tu fais ça ? Dis ? » demanda t-elle d’une voix lente en finissant de manger pour l’observer de ses yeux dorés.

« Car j’en ai envie et que je trouve ça un peu monstrueux de leur part. Tu n’es pas un animal non ? Et puis, je ne vois pas où tu as des yeux de démone personnellement… AH ! Je sais ce que je vais faire ! Je vais te nommer autrement ! Je t’appellerai Héméra dorénavant ! »

« Hémé… ra ? Pourquoi tu m’appelles comme ça ? »

« Car tu as des yeux aussi beaux que l’aurore, voilà tout ! J’adore tout ce qui a une connotation un peu… mythique. Et je trouve que ça te va très bien. »

« … … … C’est joli comme nom, je trouve… J’aime bien le nom… »

« Tant mieux alors. Pourquoi est-ce que tu n’essayes pas de te téléporter de cet endroit ? »

« Je ne peux pas… La cage est psychique… Je ne peux pas m’en aller… Je ne peux pas… Utiliser mes pouvoirs… Et puis… Pour aller où ? »

Arf… Elle ne pouvait pas ? C’était vrai tout ça ? Il passa sa main à travers les barreaux, la tendant vers la petite Tarsal qui posa la sienne dedans. Ah… Elle avait très froid hein ? Elle était presque gelée sa petite main ! Il prit sa seconde main, lui demandant de mettre les siennes à l’intérieur avant de les frotter doucement pour les réchauffer.

Elle l’observait de ses yeux dorés, murmurant qu’elle aimait bien cette chaleur… C’était doux… Et elle sentait des palpitations dans son cœur. Il lui souriait, s’arrêtant peu à peu avant d’essayer d’ouvrir les barreaux de la cage. Il croyait… vraiment y arriver ? C’était tout simplement impossible. Il n’aurait jamais assez de force pour cela…

« … …. … … … AHHHH ! »

Il venait de s’écrier très légèrement alors que les barreaux… s’espaçaient ? Elle écarquilla les yeux, reculant un peu dans sa cage alors qu’il était un peu en sueur.

« Viens avec moi. On va se promener un peu pendant la nuit. Visiblement, tout le monde dort à cette heure… Ils n’ont même pas besoin de rester éveillés pour surveiller. »

Elle ne savait pas quoi dire. Ce n’était pas … C’était quoi en fait ? Elle ne savait pas du tout ce qu’il était. Elle lui posa la question alors qu’il la sortait de la cage. Il lui annonça qu’il était un humain et que normalement, il devait partir d’ici très bientôt. Mais qu’il avait l’impression que cela ne se passerait pas sans quelques problèmes.

« Tu… Tu partiras ? Alors je retournerai dans … ma cage… C’est ça ? »

« Qui a dit ça ? Hors de question, Héméra. Tu viens avec moi aussi ! Tu seras l’une de mes pokémons aussi. Enfin… L’une… Tu verras bien mais hors de question que tu restes dans cette cage… Sauf peut-être pour aujourd’hui et demain, le temps que je demande quand je partirais, d’accord ? »

Elle ne savait pas pourquoi mais elle l’écoutait attentivement… Elle buvait presque ses paroles alors qu’il la soulevait pour la positionner sur ses épaules. Wa… Wah… On ne lui avait jamais fait ça… En fait, on ne lui avait jamais rien fait depuis qu’elle était née… Elle se rappelait juste de cette cage depuis qu’elle n’était qu’une petite Tarsal de trois ans.

Ils se baladaient jusqu’à arriver dans la petite zone de jeu où se divertissaient les Tarsal. Lui-même assis sur un banc, il observait la Tarsal qui jouait avec des anneaux pour les faire léviter. Rien de bien méchant… Non, elle n’était pas du tout méchante… Elle semblait juste très douée et intelligente… Mais sinon à part ça…

«  … … … On dirait presque moi… Héhéhé… »

Il disait cela avec un peu de tristesse dans la voix avant de se lever du banc. Jouer à des jeux d’enfant, depuis quand est-ce qu’il n’avait pas fait cela ? Oh… Depuis des années puisqu’il ne s’octroyait jamais une petite pause pour tout ça. Ah… Garmi lui manquait quand même beaucoup. La pauvre Caninos devait se faire un sang d’encre pour lui.

« Tu refermeras la cage alors ? Derrière toi, c’est ça ? Mais si c’est toi qui l’ouvre… et qui la ferme… C’est moins effrayant… J’ai moins peur… Ca ne me gêne pas… de rester enfermé… Je n’aurais pas peur… Je serais ta pokémon ? »

« Bien sûr… Tu pourras même sortir quand tu le désires de ta pokéball. »

« C’est quoi une pokéball ? » demanda t-elle d’une voix intriguée alors qu’il lui disait que lorsqu’ils sortiront, elle pourra voir ce que c’était.

Ils continuèrent de jouer et de s’amuser ensembles pendant deux heures avant que la Tarsal ne retourne dans sa cage après une accolade d’Orion. Celui-ci referma la cage ou du moins réduisit l’espace entre les deux barreaux pour les mettre à la normale.

« Pardonnez-moi mais quand est-ce que je quitterai cette cité ? »

« Nous avons décidé que si tu le désires, tu pouvais rester vivre ici. Bien entendu, comme c’est un cas extrêmement rare voir unique dans notre cité, nous préviendrons ta famille et toutes les personnes proches de toi. »

« J’aimerais rentrer chez moi s’il vous plaît. Vivre sans ma famille… C’est… »

« Nous te demandons d’y réfléchir sérieusement, Théodore. C’est vraiment une proposition unique en soi. Il serait un peu stupide de ne pas l’accepter. »

« Si… Je reste avec vous, est-ce que je peux m’occuper de la Tarsal aux yeux de démons ? »

Les deux membres royaux le regardèrent avec stupeur alors que les Gallames étaient tout aussi étonnés. Qu’est-ce qui… Qu’est-ce qu’il venait de… Qu’est-ce qu’il venait de dire ?!

« Hors de question ! Nous ne savons pas comment tu es au courant mais nous refusons pertinemment que l’engeance du Fléau soit soignée et choyée ! Ses yeux emporteront tout le monde dans le malheur ! »

« Mais elle est votre en… » commença t-il avant de s’arrêter. Il reprit après quelques secondes : « Je suis désolé, j’ai oublié ma position. Je préfère quitter cette Cité. »

« Oui… C’est la meilleure chose à faire. Demain, nous t’emmènerons hors de celle-ci. »

« Si je peux me retirer maintenant… » murmura t-il avec lenteur.

La Gardevoir aux cheveux saphir fit un geste de la main pour dire que c’était bon alors qu’il s’éloignait pour quitter la pièce puis le palais. Le roi chuchota à sa femme :

« Un véritable gâchis, n’est-ce pas ? Un véritable gâchis… »

« Il en sait trop… Mais nous ne voulons pas le tuer… Nous lui ferons simplement ce qui est prévu pour les très rares humains qui arrivent chez nous… Ceux qui encore plus rares, ne nous sont pas belliqueux en fin de compte… »

« Soit… Je vais déjà aller prévenir ceux qui vont se charger de ce travail pour demain. »

Oui, il valait mieux que ça soit le plus vite fait. Le roi se leva, ses lames bleues semblant prêtes à trancher n’importe quelle créature. Pourtant, ils n’étaient pas mauvais dans le fond mais… Cet enfant n’avait pas été désiré… Il apporterait malheur à quiconque oserait s’en occuper… qu’il soit humain ou pokémon.

Plus tard, l’aubergiste fut attristée d’apprendre qu’il devait partir, lui annonçant qu’il aurait mieux fait de se taire au sujet de la Tarsal aux yeux de démon. Maintenant, il n’avait plus aucune chance de rester ici mais il avait annoncé clairement qu’il ne serait pas resté de toute façon. Pour lui, ce n’était plus possible… Il murmurait qu’il voulait passer une dernière nuit dans cet endroit et que de toute façon, demain, il aurait tout oublié. La Gardevoir n’osa rien dire, trop étonnée de savoir qu’il savait déjà ce qui allait l’attendre.

« Debout, Héméra ! Allez, hop, hop, hop ! »

« Qu’est-ce qui se passe, Théodore ? » demanda la petite créature qui avait reprit un petit peu de couleur depuis hier. Elle semblait même bien plus pleine de vie qu’auparavant.

« On s’en va… On quitte cette montagne et tu viens avec moi. Si tu restes ici, je suis sûr que tu risques de mourir. Ils ne te laisseront pas vivre plus longtemps. Les mois et les années passeront, tu deviendras une Kirlia puis une Gardevoir et alors, tes pouvoirs seront bien plus grands qu’eux. C’est de ça dont ils ont peur ! De tes pouvoirs… »

« Je ne comprends pas tout, Théodore. » dit-elle alors qu’il ouvrait à nouveau la cage.

« Ca ne fait rien, ne te préoccupe pas plus de ça, Héméra. Donne-moi la main. »

« Vous allez tout simplement rester ici. Et ceci est un ordre royal. » vint dire une voix dans son dos alors que soudainement, deux Gallames apparaissaient à côté de lui, pointant leurs lames vers le jeune garçon.
Le roi… La reine… Et l’aubergiste ?! Celle-ci semblait attristée et désolée alors qu’il comprenait tout de suite qu’elle avait remarqué sa disparition dans sa chambre. Sans même se préoccuper des lames des deux Gallames, il recula, retournant dans la cage avant de serrer Héméra contre lui pour la protéger. Il put lire clairement une mine de dégoût sur le visage de la reine alors qu’elle disait :

« Tu préfères donc cette engeance diabolique à la vie que tu aurais pu mener dans notre cité, c’est bien cela ? Il n’y a que les humains pour penser ainsi. »

« Vous avez peur d’elle et ne lui dites pas ça ! Ce n’est pas un monstre ou autre ! C’est une Tarsal comme les autres ! C’est simplement parce qu’elle a les cheveux gris que vous pensez ça ?! Car elle est déjà très puissante à son âge ?! »

« Le gris est la couleur qui se rapproche peu à peu du noir pour représenter la mort… Elle causera des pertes immenses autour d’elle… Elle causera des malheurs, des destructions, tout est écrit dans son destin. Elle sera la cause de morts innombrables. »

« ON S’EN FOUT DU DESTIN ! On peut le changer ! Il ne faut jamais croire que tout ça peut rester ainsi ! On peut le modifier ! »

« … … … Tss … … … C’est la première fois que tu te comporte comme un enfant à mes yeux. Il n’y a qu’un enfant pour penser ainsi. Le destin ne peut pas être modifié… Et visiblement, le tien consistera tout simplement à périr… Monstre, tu iras le rejoindre dans l’autre monde. Nous en avons assez de ta présence. »

« QU’EST-CE QUE VOUS ALLEZ NOUS FAIRE ?! »

« Tu le sauras dès demain… » répliqua la reine avant que la prison ne se referme… complètement ?! L’espace entre les barreaux était tel qu’il ne pouvait même plus essayer de l’ouvrir… Ah… Ah… Ils étaient enfermés dans cette cage ?! Et … Héméra se serrait avec insistance contre lui, apeurée par tout ça… et surtout brisée par les paroles de sa mère.