Chapitre 108 : Effervescence

ShiroiRyu
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Chapitre 108 : Effervescence

« Nous devions arriver vers Omnosmos d’ici quelques jours. »

« Tu es sûr que ça ne dérangera pas ton royaume, Royan ? Enfin, que tu sois aussi vite arrivé, aussi vite reparti ? Manelena m’a dit que non pour elle mais bon … »

« Ils se sont débrouillés sans moi pendant des mois voire sûrement une ou deux années. Comme je te l’ai déjà dit, contrairement à Shunter, notre titre de monarque n’a pas une valeur absolue et il y a toujours un conseil au cas où. »

« Oui mais bon … à part ça, je ne m’y connais pas plus, je dois t’avouer. Mais bon, je te fais confiance. » répéta le jeune homme aux cheveux bruns. Ils étaient arrivés à Traslord puis étaient repartis presqu’aussitôt. Et cette fois-ci, sans armée ou autres pour les accompagner. Krawnia était déjà un lointain souvenir tandis que Tery n’avait pas eut le courage de parler réellement avec Manelena.

« Peut-être devrions-nous envoyer une lettre à Omnosmos ? »

« Je ne pense pas, non. Il y a sûrement déjà des personnes pour savoir ce qui s’est passé. Ça ne sert à rien de se répéter inutilement. Nous ne ferions que perdre plus de temps. » corrigea Manelena aux propos d’Elen, celle-ci marmonnant qu’ils ne pouvaient en être vraiment sûrs.

« Ne nous préoccupons donc pas de cela pour le moment, d’accord ? On verra le moment venu, ça ne sert à rien de tirer des plans sur la comète. »

Il tentait déjà d’éviter un conflit entre les deux femmes, ne voulant vraiment pas devoir s’interposer entre elles. Omnosmos … Là-bas, comment est-ce que le grand archimage allait réagir ? D’ailleurs, il n’oubliait pas que c’était un Gnomold en même temps.
C’était quoi le rapport ? Et bien … Il n’y en avait pas forcément non plus, il fallait avouer que tout ça commençait doucement à s’abandonner dans son crâne. Il n’avait plus envie de se prendre la tête avec toutes ces histoires. Les Gnomolds ? Il allait les laisser tranquilles tant que ça serait pareil et inverse. Les Mékalarmiens ? Aussi. Il allait juste souffler un peu et respirer grandement ensuite. C’était aussi aisé que ça.

« Sérest, Séran, vous pourrez continuer à nous en dire plus ? Maintenant que vous vous êtes révélés, vous ne devriez pas avoir de problèmes à cela, non ? »

« Nullement mais cela dépend si on peut t’en parler ou non. Que veux-tu savoir ? »

« Juste au sujet de la race des démons. A part le fait qu’ils étaient l’unique création du dieu Alzar, la raison principale pour les portes démoniaques, c’était quoi exactement ? »

« Oh … Pourquoi avoir scellé les démons sous terre, n’est-ce pas ? Et cela pour qu’ils ne puissent jamais s’en échapper ? A cause de l’un d’entre eux. » répondit Sérest une nouvelle fois à Tery qui clignait des yeux. « Le plus dangereux d’entre tous. A l’appétit insatiable. Il ne pouvait jamais se satisfaire, il voulait toujours devenir plus fort, toujours plus fort. Et pour cela, il n’hésitait pas à trucider et tuer tout ce qui se trouvait sur son passage avec pour seul but de dévorer ce qui se trouvait en face de lui. »

« Cette histoire … de dévorer est véridique ? »

Tery commença à déglutir. Tout le monde dans le groupe avait les yeux rivés vers Sérest, attendant une confirmation ou infirmation de sa part. Elle murmura :

« C’est exact … Tery. Les démons se dévoraient entre eux et les autres peuplades. Chaque mort leur procurait une satisfaction intense ainsi qu’un gain de pouvoir. Mais plus tu devenais puissant, plus tu perdais ton humanité. Les démons pouvaient être des créatures vraiment répugnantes, très répugnantes … et horribles. Il suffisait de les laisser avoir libre courts à leur exactions pour comprendre ce qu’ils étaient réellement. »

« Est-ce que … moi et Elise somme ainsi ? » demanda t-il une nouvelle fois, inquiet et effrayé. Dans ces moments-là, on se veut rassurant mais ce fût Séran qui déclara :

« C’est exact. Vous êtes comme eux. Vous aussi pouvez devenir bien plus forts si vous le désirez … en dévorant autrui. »

« Mais mais mais … je n’ai jamais ressenti ce besoin ! Je ne suis pas comme ça ! »

« Il y a beaucoup de choses que l’on prétend ne pas être, Tery. Néanmoins, tes cornes prouvent ta race. Et de même, tu as été élevé comme un enfant normal. Il en est de même pour Elise. Vous êtes comme eux physiquement et dans vos capacités, ça ne veut pas dire que vous êtes pareils psychologiquement. »

« Je sais bien que c’est aussi une question de mental … mais si c’est dans nos gènes… »

« Alors tu n’as qu’à faire confiance en toi et en ceux qui t’entourent. Les démons n’avaient que les démons comme compagnons. Peut-être que si Alzar avait décidé de les laisser se mêler aux autres races, tout cela ne serait jamais arrivé. »

« Et n’oublie pas que cela fait plusieurs millénaires qu’il en était ainsi, Tery. Aujourd’hui, tout est différent, tu ne crois pas ? Tu ne penses pas pouvoir contrôler tes gènes ? »

Il n’en savait trop rien. Au départ, il avait remarqué qu’il n’y arrivait pas mais peu à peu, il avait remarqué qu’il s’agissait de la même chose que les lignes d’Alzar. Il devait juste se focaliser sur ce qui semblait être un ennemi et ça serait largement suffisant.

« Peut-être, je n’en sais rien. Je n’ai jamais rencontré les démons d’antan. »

Sérest et Séran se regardent longuement tous les deux, comme s’ils devaient répondre à cela mais qu’ils préféraient éviter. Mais le jeune homme ne remarqua rien, les autres non plus tandis qu’ils continuaient leur marche en direction d’Omnosmos.

Comme prévu, il fallut environ une bonne semaine pour pouvoir voir au loin la ville que l’on appelait la capitale du monde. Néanmoins, le plus étrange était le nombre de charettes et autres véhicules à roues qui s’éloignaient de celle-ci, sur les nombreuses routes. Hélant une personne, Tery demanda avec interrogation :

« Pardonnez-moi mais pourquoi autant de départ ? Cela me paraît étrange. »

« Quoi ? Vous êtes pas du coin ? Enfin, vous avez pas entendu de là d’où d’où vous venez ? »

« Pas vraiment, non … Vous pouvez nous en dire plus ? »

« Bon, c’est bien parce que c’est déjà assez le bordel. Tout Omnosmos a été parcouru par des tremblements de terre depuis presque deux semaines ! On ne sait pas ce qui se passe et les Archimages n’ont pas encore donné de réponse à ce sujet. Je veux pas rester une journée de plus sur un terrain qui pourrait s’effondrer d’un moment à un autre. Vous feriez mieux de déguerpir dès que vous avez fini ce que vous aviez à faire ! »

Bien entendu … bien entendu. Le jeune homme resta immobile, laissant passer la charrette avant de se retourner vers Sérest et Séran. Tout ça … est-ce que c’était prévu ? La femme ailée hocha la tête pour lui signaler que oui avant de dire :

« Mais tu peux être rassuré, Tery Vanian. Omnosmos ne s’écroulera pas. La capitale n’est pas faite pour disparaître ainsi. Simplement, nul ne savait à ce sujet. »

« Sauf toi … et Séran, n’est-ce pas ? » corrigea Tery alors qu’elle eut un petit sourire.

« C’est exact … nous nous mêlerons réellement de ce monde que sur un dernier point. »

« Ce n’est pas déjà le cas avec les créatures légendaires ? Sans vous, je ne suis pas sûr que nous aurions put y arriver. »

« Oh … Tu te dévalorises, Tery. Tu es pourtant celui qui est responsable de leurs morts. Nous n’avons fait qu’épauler. Mais ne t’inquiète donc pas. »

S’inquiéter de quoi ? Pourquoi est-ce qu’elle disait cela ? C’était surtout en proférant une telle parole qu’il était à nouveau inquiet hein ! Alors qu’ils continuaient à avancer, Omnosmos se rapprochant à chaque heure. Puis subitement, sans même qu’il ne comprenne pourquoi, Ryusuke se retrouva sur les fesses au sol.

« Mais mais mais … le sol est en train de trembler, là ! Il se passe quoi, là ? »

« Tremblement de terre … Visiblement, ils ne plaisantaient pas à ce sujet. C’est assez problématique dans le fond, voire très problématique. »

« C’est bien plus puissant que prévu mais … nous ne pouvons rien y faire réellement. Nous ne pouvons que patienter. Tout cela se calmera d’ici quelques temps. Tu as besoin d’aide, Tery ? » demanda Séran avant de tendre sa main vers lui. Le jeune homme serra celle de l’honorien avant de se faire rapidement tiré pour être remis correctement debout.
Il remarqua qu’il avait été le seul à tomber dans le groupe, ce qui ajouta un peu plus de gêne au jeune homme qui ne savait plus où se mettre. Elen avait réussi à rester droite, Royan et Elise s’étaient aidés tous les deux. Quant à Manelena, elle était tout simplement fière et droite. Elle ne bougeait pas d’un poil alors qu’elle posait son regard sur Tery.

« La prochaine fois que tu sens une petite secousse, tu prends fermement appui sur tes pieds et tu ne bouges plus, Tery. Tu es quand même de Shunter et tu manies la terre ! »

« Mais je ne savais pas ! Je n’étais pas prêt, c’est tout … enfin, voilà … »

« Tu es même plus doué dans la magie de terre que le reste ! Je ne veux pas d’excuse ! »

Il tenta encore de s’exprimer mais le regard courroucé de Manelena le stoppa dans son élan. Il valait mieux ne rien dire s’il tenait tout simplement à la vie. Il murmura juste quelques mots incongrus, comme pour expliquer son point de vue mais s’arrêta après quelques secondes.

« Tu as quelque chose à dire, Tery Vanian ? »

« Non non, c’est bon, c’est bon ! On y va sinon, on arrivera jamais à Omnosmos ! »

Et zoup, la fuite ! Du moins, elle est verbale avant d’être physique. Le jeune homme aux cheveux bruns profita de prendre un peu d’avance et surtout que le sol avait stoppé de trembler. Pfiou … Ce n’était au final qu’un petit moment à passer … mais cela se déroulait tous les jours ? Quelle folie ! Comment est-ce que les habitants pouvaient vivre dans de telles conditions ? Surtout qu’auparavant, rien de tout cela n’était arrivé.

Mais à l’approche d’Omnosmos, il se sentait de moins en moins rassuré. Peut-être était-ce à cause de ce qui se trouvait en face de lui ? Les gardes étaient nombreux à l’entrée, observant tous les allers et venues. Mais surtout, ils n’étaient guère plus rassurés que Tery. Lorsqu’ils finirent par se trouver face aux soldats, l’un d’entre eux déclara :

« Raison de votre venue dans Omnosmos ? »

« Nous rendre dans la bibliothèque de messire Périk et madame Jésiana. Nous avions un rendez-vous avec eux. Par contre, le sol est vraiment très peu stable par ici. »

« Vous êtes un petit plaisantin hein ? Comme si vous n’étiez pas au courant avant de venir ici ? Périk et Jésiana ? Bon, vous pouvez passer. »

Même si ce n’était pas vraiment la vérité, il fallait reconnaître que cela rendait la tâche beaucoup plus facile que de leur dire qu’ils allaient rencontrer le grand archimage Comme si en déclarant une telle chose, les gardes ne les auraient pas questionné ?

« Intéressante façon de passer outre les gardes, Tery Vanian. Cela t’es venu depuis longtemps ? Ou alors, sur le moment ? »

« J’ai juste pensé à une raison moins folle que de dire : Nous voulons rencontrer le grand archimage Ernold. Rendre visite aux propriétaires d’une bibliothèque, ça n’a rien de si important non ? Ils se poseront moins de question. »

« Pas faux. De toute façon, vu que nous sommes dans les environs, nous pourrons allons les voir. Peut-être qu’ils ont des détails eux aussi. »

Le jeune homme aux cheveux bruns fit un petit sourire après les paroles de Manelena. Bien qu’elle ne le déclarait pas ouvertement, elle appréciait grandement les deux vieilles personnes. Lui-même ne pouvait guèr prétendre le contraire. Ils étaient tous les deux très sympathiques, chacun à sa façon par contre. Jésiana n’était pas du tout comme Périk.

« Qu’attendons-nous alors ? Où nous rendons-nous ? »

« Allons plutôt chercher un endroit où nous reposer. En vue du nombre d’heures que nous avons marchés et surtout de la lumière dans le ciel, il vaut mieux ne pas aller en fin de soirée. On peut attendre demain, non ? »

Les propos de Royan furent acceptés par tout le monde, Elen venant attraper le bras de Tery pour l’emmener auprès d’elle alors que le groupe marchait dans les ruelles bien moins vivantes depuis leur dernière visite. Les tremblements de terre fréquents avaient eut raison d’une bonne partie de la population locale.

« Au moins, on ne risque plus d’être bousculés ou de se perdre de vue ! » déclara Elise en ayant un petit rire repris par Sérest et Tery.

« Ce n’est pas faux, il y a bien un côté pratique à tout ça. Pas de quoi s’en plaindre pour une fois. Tant mieux en un sens. Mais bon, dépéchons nous avant qu’il n’y ait plus de place. »

« Tery … S’il y a moins de monde dans les rues, tu ne devrais pas avoir à t’inquiéter sur le nombre de places dans les auberges. Par contre, trouver une auberge qui ne soit pas fermée à cause des tremblements de terre, là, ça sera la véritable difficulté. »

Erf ! Elle marquait un point, Manelena Le jeune homme eut un léger soupir avant de signaler que ce n’était pas bien grave. S’il fallait, il n’hésiterait pas à interroger quelques passants ou commerçants. Ils finiront bien par trouver un endroit où se reposer malgré les événements sismiques quotidiens. Oui, pas de quoi s’en faire réellement.

« On ferait mieux de se dépêcher néanmoins. Peut-être que les auberges restantes seront bondées ou ferment plus tôt. Nous n’en savons rien. »

Ils venaient pas de parler du contraire à l’instant ? Ah … Le jeune homme ne répondit pas aux propos de Royan. Il savait qu’il n’avait pas totalement tort mais quand même, ce n’était pas un peu trop … pfiou. Il n’arrivait même plus à penser au mot qu’il avait en tête. Enfin, ce n’était pas très grave ou important, il avait mieux à faire.
Mieux, tout cela dépendait du point de vue mais bon … Il se passa une main derrière le crâne, un peu confus et embêté. C’était un peu dérangeant enfin et … AIE ! Il percuta le dos de Manelena, gémissant de douleur avant de se frotter le nez.

« Mais qu’est-ce qui … pourquoi tu t’es arrêtée, Manelena ? »

« Car nous sommes visiblement arrivés. Et le changement en Omnosmos est vraiment … déplaisant, je dois dire. Très déplaisant. »

Qu’est-ce qu’elle voulait dire par … Oh. Un petit regard autour de l’auberge et il était possible de voir que certains bâtiments avaient été dégradés. Bien entendu, ce n’était pas rare. Les rumeurs parlaient souvent de groupes de personnes qui profitaient de la confusion générale pour piller quelques bâtiments abandonnés … ou non.

« Espérons que l’intérieur soit aussi propre que l’extérieur. Allons-y. »

Manelena avait pris les commandes de la troupe avant d’indiquer la marche à suivre à Tery et aux autres. En pénétrant à l’intérieur, il était de suite facile de remarquer les coups de lame sur les murs, comme si une bataille avait eut lieu. Néanmoins, à part cela, rien ne changeait d’une auberge normale et les personnes installées à la taverne semblaient plutôt correctes. En s’approchant de l’aubergiste, Manelena observa les environs.

« Vous ne rêvez pas, oui, c’est un peu de la folie dans les alentours mais nous avons réussi à les calmer … par la force puisque c’était nécessaire. Qu’est-ce que je peux faire pour vous ? »

« Il nous faudrait des chambres. Combien il vous en reste ? »

« Pas tellement que ça. Je peux vous en donner deux voire une seule mais très spacieuse. Elle sert d’habitude pour les troupes de soldats. »

« Mettez cette dernière. Comme on ne sait pas combien de temps nous allons rester, il vaut mieux prendre le moins de chambre possible. »

Tery se demanda si la qualité de la chambre allait être aussi … un peu douteuse. Néanmoins, il valait mieux ne pas poser la question à l’aubergiste. S’il avait réussi à s’occuper des pillards, même avec de l’aide d’autrui, il ne devait pas être quelqu’un de facile.

Payant la chambre, Manelena monta la première pour voir à quoi elle ressemblait. Un rapide coup d’oeil et il était de voir que le terme de « chambre de soldats » n’était pas volé. Il n’y avait rien … juste des lits une place une petite table de nuit. Rien de plus, rien de moins. Et visiblement, il n’y avait qu’un bac d’eau pour se laver.
Ah … Autant dire qu’il ne fallait pas compter sur le fait de se laver aujourd’hui. Ou alors seulement quand il n’y aurait personne dans les environs, du genre, quand tous se trouveront en bas pour dîner ou déjeuner. Pfiou …

Il n’aimait pas quand ça devenait trop compl… Un bruit strident se fit entendr, Tery tournant la tête vers l’origine de ce dernier. Qu’est-ce qu’Elen était en train de faire là ? Elle poussait avec un peu de difficultés l’un des lits pour le coller à un autre tout en disant :

« Hors de question de dormir éloigné de Tery ! De toute façon, je sais que Sérest et Séran vont faire de même de leur côté, n’est-ce pas ? »

« Le faire ? Mais c’est déjà fait. Par contre, pour éviter de faire trop de bruit, nous avons utilisé un peu de magie du vent. Tu aurais pu le faire toi aussi de ton côté, Elen. »

« Je n’y ait pas pensé sur le coup. Bon, ce n’est pas bien grave. Royan ? Elise ? Vous ne le faites pas ? » demanda Elen avec un petit sourire narquois, Elise ayant rapidement les joues qui vinrent se teindre en rose.

« Non mais … euh … pourquoi est-ce que tu dis ça ? »

« Une blague de très mauvais goût, Elen. Nous n’avons pas à commettre un tel acte de la sorte alors que nous ne sommes pas mariés, elle et moi. Ni même en couple ou alors en relation. Vos règles ne sont pas les mêmes que les miennes. Sinon … »

« Sinon quoi ? » demanda Elen en remarquant que Royan regardait Manelena qui s’était mise à distance de tout ce beau monde.

« Nous pourrions mettre les lits de Manelena, Tery et le tien ensembles, non ? Puisque c’est basé sur des on-dit. » continua néanmoins l’adolescent aux cheveux bleus. S’il fallait les craindre maintenant, c’était trop tard pour réagir de la sorte.

« Qu’est-ce que tu veux insinuer par là, Royan ? »

« Je n’insinue rien du tout, Elen. Du moins, je n’insinue pas plus que toi, tu ne crois pas ? »

« Tsss, voilà qu’il se met à faire de l’humour. De toute façon, Manelena a déjà pris son lit, celui le plus au fond de la chambre. Elle n’a pas envie de discuter avec nous. »

« J’ai mieux à faire que d’écouter de telles sottises de votre part. Je dépose mes affaires, je descends manger un morceau et ensuite, je comptes me coucher, c’est aussi simple que ça. »

Comme elle le désirait Le jeune homme aux cheveux bruns la regarda partir de la chambre sans chercher querelle ou autre, déposant lui-même ses affaires avant de faire de même de son côté. Pourquoi devraient-ils se battre tous ensemble hum ? Ce n’était pas une bonne chose, loin de là. Il eut un petit soupir amusé avant de dire, immobilisé devant la porte :

« Allons manger un morceau. Je pense que chacun est grognon à cause des tremblements de terre et autre. Un repas nous fera le plus grand bien mais aussi à nos estomacs ! »

Au moins, en le regardant, on ne pouvait être qu’enjoués comme lui. Le jeune homme descendit au rez-de-chaussée, trouvant Manelena assise seule à une grande table. Déjà, il remarquait quelques personnes qui tentaient de se rapprocher d’elle. Il s’avança d’un pas rapide vers la femme aux cheveux argentés, disant d’une voix au timbre séducteur :

« Vous êtes seule, mademoiselle ? Puis-je m’asseoir à votre table ? »

« Je ne le suis plus, maintenant. Installez-vous donc tant que vous m’offrez le couvert. » répondit Manelena, levant les yeux vers le plafond en soupirant. Elle avait remarqué le manège de Tery mais elle y avait répondu. Il se plaça à côté d’elle, les autres finissant par arriver, Elise demandant si les commandes avaient déjà été prises ou non.

Rien de tout cela n’avait été fait, Manelena et Tery ayant attendu qu’ils soient tous là. Pour les consommations, Tery fixa Royan. Depuis le début, il évitait que l’adolescent ne puisse boire de l’alcool comme il n’était pas encore un adulte … mais surtout parce qu’il était un prince. Encore que les raisons, il s’en fichait. Exceptionnellement et surtout parce qu’ils avaient une auberge pour la première fois depuis leur départ de Traslord, ils pouvaient bien tous profiter d’un alcool pour se féliciter de la réussite dans leur objectif. Royan regarda le gobelet, le portant à son nez en clignant des yeux. Il se tourna vers Tery, attendant de voir ce qu’allait dire le jeune homme, celui-ci lui souriant :

« Tu peux bien boire un coup, non ? C’est grâce à toi comme aux autres que nous sommes là, aujourd’hui, Royan. Et puis bon, un jour, il te faudra bien commencer à boire. Alors, à ta santé et à celle de notre groupe ! Félicitations à tous ! C’est enfin terminé ! »

Chapitre 107 : Y retourner

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Chapitre 107 : Y retourner

Durant tout le voyage en bateau, les paroles du couple trottaient dans sa tête sans cesse. Malgré toutes les raisons qu’il pourrait trouver, il n’y en avait aucune qui se voulait logique et normal. Pourquoi avoir dit ça maintenant ? Pourquoi avoir déclaré qu’ils pouvaient deviner aisément ce qui allait se passer ?
A côté de lui, il voyait Elen qui dormait paisiblement dans le lit. Dire que dans la tour, elle avait fait preuve d’une nouvelle fois d’un coup de folie. Il ne devait pas mentir : elle l’effrayait un peu. Le fait qu’elle possédait les lignes d’Alzar en même temps que celles de Zélisia la rendait unique mais pas seulement. Les lignes d’Alzar profitaient du fait qu’elle ne savait pas contrôler ses émotions. Cela la rendait plus dangereuse et forte que Manelena et lui-même lorsque tout cela allait arriver. Il ne pouvait pas l’oublier …

« Elen ? Il serait temps que tu te lèves, ma grande. »

Il avait dit cela en chuchotant, venant alors l’embrasser doucement sur les lèvres. Elle commença à gémir et à bouger dans le lit, finissant par ouvrir un œil bleu. Elle l’observa avec tendresse, sa main glissant vers celle de Tery pour venir la caresser.

« Déjà maintenant ? Mais il n’est que … je ne sais pas quelle heure il est. Mais ce n’est pas un peu trop tôt ? On ne peut pas profiter un peu, s’il te plaît ? »

« Ce n’est pas possible, Elen. Enfin, si, on le peut mai pas plus qu’une demie-heure et encore … enfin bon … On peut si tu le désires et … »

« Tu t’embrouilles dans tes paroles, Tery. Est-ce que c’est moi qui te fait cet effet ? » dit-elle tout en rigolant, ses yeux grands ouverts avant de gesticuler dans le lit.

« Tu le sais parfaitement non ? Hum … Je crois que ce n’était pas une mauvaise idée que de proposer de rester quelques temps dans ce lit. »

« On pourra toujours donner l’excuser du bateau qui tangue si le lit fait quelques grincements. Qu’est-ce que tu en dis, Tery ? Intéressé ? »

Il eut une petite bouffée de chaleur en rougissant avant de sourire à son tour. Pour toute réponse, ses mains commencèrent à parcourir le corps d’Elen, venant glisser sur ses vêtements pour les retirer. Il avait l’impression que depuis la première fois où il avait réellement vu le corps de la jeune femme dans son plus simple apparat, il avait un peu changé. Plus mature ? Plus femme ? Plus désirable ?

« Et bien, Tery ? Que comptes-tu faire ? Tu vas tout simplement le regarder, c’est ça ? Tu peux aussi poser les mains dessus, tu sais ? Je ne comptes pas te mordre … du moins, peut-être intentionnellement et avec douceur. »

« Tant que tu ne fais pas de marques hein ? Je ne dis pas non … enfin … je … J’ai juste envie de te contempler. Dire que les lignes de Zélisia sont aussi douées que ça pour faire disparaître les blessures les plus graves. Et que dire des cicatrices … Enfin bon … Tu es belle. »

« J »aimerai que tu me le dise plus souvent, Tery. Même quand tu regardes une autre femme. »

« … … … Je vois, je vois, Elen. Je suis désolé. »

Et pour se faire pardonner, il commença doucement à embrasser chaque parcelle nue de son corps tandis que les mains faisaient de même. Rapidement, la demoiselle aux cheveux blonds commença à gémir de plaisir, mordant dans le tissu à l’instant où elle se sentie unifiée avec l’homme qu’elle désirait. La demie-heure passa rapidement, trop rapidement au goût des deux personnes mais aucun ne vint s’en plaindre.

« Ah … Tery … Qu’allons-nous faire ? Tu ne trouves pas que j’ai grossi un peu ? »

« C’est quoi cette remarque que tu viens de dire, je peux savoir ? » Toi ? Tu es grosse ? N’exagère donc pas, de ce point de vue, tu es parfaite. »

Elle eut un grand sourire, ravie d’apprendre ce que Tery venait de lui déclarer. Le jeune homme aux cheveux bruns se redressa dans le lit, prêt à se rhabiller avec Elen. Pendant qu’elle mettait ses affaires sur son corps, il lui dit :

« Qu’est-ce que tu penses de Sérest et Séran, sincèrement ? »

« De leur histoire de ces derniers jours ? J’avoue que ça me trotte dans la tête depuis qu’ils en ont parlé. Je ne sais pas vraiment … J’ai beaucoup de mal à y croire mais en même temps, si les légendes sont vraies, Zélisia et Alzar s’aimaient énormément malgré qu’ils étaient opposés radicalement non ? Ce qui me fait dire alors qu’ils pourraient l’être mais nous aussi non ? Tu as les lignes d’Alzar tandis que moi, j’ai les lignes de Zélisia. »

« Mais tu as aussi les lignes d’Alzar, il ne faut pas oublier. Enfin … ce n’est pas bien important, tu restes la demoiselle à qui je tiens le plus, voilà tout. »

« C’est un peu rassurant que tu me le dises maintenant, tu ne crois pas ? »

Elle avait déclaré cela avec une petite pointe d’ironie avant de déposer un rapide baiser sur ses lèvres. Le jeune homme la laissa quitter la chambre quelques secondes plus tard, restant immobile de son côté. Bien entendu … que cela devait se passer ainsi. Elen avait juste compris les paroles à sa façon. Lui-même n’était pas certain de ce qu’il venait de déclarer exactement. La femme à qui il tenait le plus … ça ne voulait pas dire … qu’il l’aimait non ?
Peut-être que dans le fond, il était réellement un monstre mais pas de la façon à laquelle on pensait. Il avait juste une mauvaise pensée sur le moment. Il aimait Elen, il en était sûr, il en était convaincu et … convaincu ? De quoi devait-il se convaincre ? Se convaincre d’aimer quelqu’un, ce n’était pas plus absurde qu’autre chose ?
« Pfiou, je sais pas ce qui me prend aujourd’hui de penser de la sorte. »

Il valait mieux qu’il aille voir les autres car de telles pensées étaient plus qu’absurdes. Comment est-ce qu’il pouvait assumer ça ? Grumpf … Il avait commis tout simplement une effroyable erreur dans ses pensées. Cela lui arrivait de plus en plus fréquemment. Peut-être était-ce parce qu’Elen était en fait différente de ce qu’il pensait ?

« Pour le meilleur et pour le pire … je crois que c’était ça. »

Il quitta la pièce à son tour pour aller sur la passerelle du bateau. Hum … Il y avait Manelena qui observait l’océan infini. L’était-il vraiment ? Il n’y avait pas réellement réfléchit mais comment est-ce que tout cela se passait exactement ? S’il voyageait vers le sud, est-ce qu’il allait tomber ? Ou alors se retrouver vers Honoros ? Il n’avait aucune réelle idée de comment ce monde tournait réellement.

« Bonjour, Manelena, tu as bien dormi ? » demanda t-il avec politesse.

« Oh … Tery. Si tu cherches Elen, elle est partie vers la cantine. Elle a à peine daigné me regarder pour me saluer mais qu’importe, ce n’est pas bien grave. »

« Donc je considère que tu vas bien, c’est ça ? » dit le jeune homme avant de s’installer à ses côtés. Maintenant qu’elle était auprès de lui, une pensée le taraudait. Pourquoi est-ce que ça ne venait que maintenant et pas auparavant ?

« On va dire ça comme ça si tu préfères. Et toi ? Tu as encore fait des mouvements hier. Tu sais que je dors dans la pièce d’à côté. »

Il pouffa de surprise sur le coup, la regardant avec un peu d’appréhension. Que Manelena lance un tel sujet, il n’en revenait pas. Mais néanmoins, il devait lui répondre, murmurant :

« La prochaine fois, je tenterais d’être un peu plus discret. »

« Je l’espère bien car elle est du genre très vocale quand elle s’y met. Je ne pense pas être la seule à avoir ce souci auditif, Tery. »

« C’est bon ! On peut changer de sujet s’il te plaît ? Je voulais savoir : tu vas repartir à Shunter maintenant que c’est fini, c’est ça ? Comme Royan et Traslord ? »

« C’est à toi de décider. Qu’est-ce que tu veux ? Personnellement ? »

Elle se retourna vers lui pour lui faire face. Le jeune homme cligna des yeux. Hum, c’était le froid de la mer qui faisait rougir les joues de Manelena ? Et les siennes surtout ? Se grattant la joue, il lui déclara :

« Je crois que c’est facile à deviner mais j’aimerai bien que tu restes avec nous, Manelena. Tu es là depuis le début ou presque. Tu es quelqu’un d’important et … »

« Je n’ai pas demandé pour le groupe. J »ai demandé ce que tu voulais, toi. Ce n’est pas pareil, Tery Vanian. Ne tourne pas autour du pot, compris ? »

Hey. Elle avait quoi aujourd’hui ? Elle était assez en colère. Etait-ce à cause de cette nuit avec Elen ? Pfiou … Il avait peut-être marché sur un terrain piégé à l’heure actuelle. Et il n’avait visiblement pas fait attention où il avait mis les pieds.

« Euh … Et bien, Manelena, tu sais bien … qu’enfin bon … »

« Tu peux arrêter d’être un peu indécis dès que tu ouvres la bouche en ma direction ? Ca me fait royalement chier que tu sois incapable encore maintenant de me parler correctement ! »

« C’est juste que … ceci … et cela … fait qu’enfin … Je ne m’attendais pas à ce que tu me poses directement la question, voilà tout. »

« Arrêtes de te moquer de moi. Je commence à en avoir réellement assez, Tery Vanian. Nous sommes seuls, tu peux t’exprimer en face à face. »

La femme aux cheveux argentés avait croisés ses bras alors que ses yeux étaient toujours fixés sur le visage de Tery. Celui-ci trembla un peu : elle le mettait plus que mal à l’aise alors qu’il continuait de se gratter la joue avec gêne.

« Mais tu … enfin … Manelena. Il y a du monde sur ce bateau. Tu dis que nous sommes seuls mais ce n’est pas le cas. Pourquoi est-ce que tu me forces à prendre la parole ? »

« Bon, visiblement, attendre cela de ta part était trop demandé. Je ne sais pas pourquoi j’ai espéré une réponse de ta part, Tery. Après toutes ces années, tu continues de te comporter comme un enfant face à moi. Est-ce que je te mets si mal à l’aise que ça ? Non, je ne veux même pas savoir ta réponse, Tery. Elle serait complètement inutile. »

Complètement inutile ? Elle commença à se mouvoir pour passer à côté de lui, le jeune homme paralysé par l’angoisse. Ce malaise ressenti avec Elen qui ne s’atténuait pas au fil des jours qui s’écoulaient. Ce tracas dès qu’il s’adressait à Manelena aussi. Et cette dernière qui rajoutait en continuant son chemin :

« Puisque tu es incapable de prendre une décision, je vais tout simplement retourner à Shunter. Nous n’avons plus rien à voir tous les deux en fin de compte. »

« Non ! » s’écria t-il en attrapant vivement sa main tout en se retournant. La monarque de Shunter s’immobilisa sur place, faisant un léger sourire qu’il ne remarqua guère.

« Non, quoi, Tery Vanian ? Non à quoi ? »

« Tu es ma maréchale, tu es ma princesse, tu es ma reine, tu es aussi une compagne de route. Tu es tellement de choses. Savoir que tu vas partir, je ne veux pas que ça arrive. Ça me rend vraiment malade rien que d’y penser. »

« Je suis … ta maréchale ? Ta princesse ? Ta reine ? » répéta t-elle en plaçant son visage à la hauteur du sien. Elle avait besoin de se pencher un peu en avant pour cela, ce qui ne faisait qu’ajouter plus de charme à cette femme pourtant aguerrie par l’art du combat. Malgré les années passées à toujours n’avoir que l’art militaire en tête, elle restait une femme qui pouvait faire tourner de nombreuses têtes après son passage. Mais pour le moment, celle qui l’intéressait était le plus était en train de se décomposer devant ses yeux, devenue complètement livide en bafouillant :

« Enfin, je suis de Shunter et tu es liée au royaume. C’était juste ça hein ? Rien de … Enfin, peut-être un peu quand même et puis … enfin … »

« Tery. Sois bref, clair et concis. Je te laisse une phrase, une unique phrase. »

« Manelena, continues de m’accompagner comme tu l’as toujours fait. »

« … … … Ah. Et une phrase gâchée. Et pourquoi est-ce que tu me donnes l’impression que tu vas te mettre à pleurer hein ? »

Il n’allait pas pleurer ! Il avait passé l’âge pour ça, c’était juste que la situation le rendait tellement nerveux que ses émotions transparaient sur son visage. Qu’est-ce que les autres allaient dire à son sujet s’il était remarqué ? S’il était vu ?

« Je ne comptes pas pleurer. Ce n’est pas ça, Manelena. C’est juste que … c’est juste que … un démon qui parle de la sorte à l’une des personnes les plus importantes de ce monde, je ne sais pas où est ma condition, où est ma place, et … »

« Bon sang, d’où est-ce que viens ce truc sur les démons ? Tu te cherches encore des excuses, c’est bien ça, Tery ? Sincèrement, les démons … » soupira t-elle avant de poser ses mains sur ses épaules. Il sentit une légère force qui l’attirait contre elle bien que cela ne le faisait que bouger très lentement en direction de Manelena.

« Je sais bien mais je suis nul. Dès que tu es dans les parages, je comprends pas ce qui se passe. Je suis complètement perdu et déboussolé. »

Pouf ! Sa tête se retrouva posée contre le coeur de Manelena. Il l’entendait battre à vive allure, comme si elle était elle aussi aux prises d’une vive émotion qu’elle n’arrivait pas à contrôler. Le jeune homme écouta les paroles de l’ancienne maréchale, yeux fermés :

« Tu ne pourras jamais être comme l’un de ces démons dont les légendes parlent, Tery. Tu es beaucoup trop gentil, simplet et stupide pour cela. Tu ne tues pas pour le plaisir, tu n’es pas fait pour le combat. Tu es bien trop sincère et vrai. Tu ne cherches pas à faire souffrir autrui, c’est même l’inverse. Tu te mets dans des situations abracadabrantesques et je pourrais continuer pendant des heures à te donner tout un tas d’autres arguments si je le désirais. Tery, je vais rester à tes côtés pour Omnosmos mais ensuite, reviens avec moi à Shunter. Je ne te promets pas une vie de château, de noble ou autres.  Je peux juste te promettre que tu seras heureux à mes côtés. Qu’est-ce que tu en dis ? »

Éberlué, il resta immobile pendant quelques secondes pour que son cerveau puisse assimiler tout ce qu’elle venait de lui dire. Mais surtout, elle semblait attendre une réponse le plus rapidement possible … mais il ne savait pas quoi dire ! Il était tout simplement perdu ! Ce n’était pas le genre de choses pour lesquelles il était préparé !

« Manelena … je … Je crois que sur le coup, je serais tout simplement ravi. Là, je te dis ce que je pense maintenant hein ? »

« Mais tu veux y réfléchir, n’est-ce pas ? »

« Si ça ne te dérange pas trop … la réponse serait oui. Car je ne sais pas du tout ce que je dois faire exactement, loin de là. Enfin, c’est juste imprévu que tu me dises ça. »

« Je le sais parfaitement, Tery. Je le sais parfaitement. Essaies d’y réfléchir à tête reposée. » déclara t-elle pour finir avant de passer à côté de lui, retirant finalement la main qui était dans celle du jeune homme depuis déjà quelques minutes. Il était temps d’aller retrouver les autres, non ? Elle l’incita à le suivre mais il murmure qu’il va rester là encore un peu.

Il n’avait pas envie de voir les autres. La raison était simple : il n’oserait pas regarder Manelena droit dans les yeux. Elen, ça ne serait pas beaucoup mieux. Qu’est-ce qu’il pourrait faire dans une telle situation ? Dans quoi est-ce qu’il s’était jeté ? C’était simplement que … ah … il devait se faire une raison.
Peut-être était-ce à cause de la situation ? Mais il avait remarqué que Manelena était inquiète et un peu sur les nerfs ? Comme si elle devait lui avouer ce qu’elle avait sur le coeur avant qu’il ne soit trop tard. Mais trop tard de quoi ? Par rapport à quoi ?

« Mais qu’est-ce que je vais faire ? Je ne peux pas être indécis comme ça . »

Il ne pouvait pas faire durer trop longtemps cette situation. Pourtant, cela faisait depuis déjà plusieurs mois qu c’était ainsi. Un jour, il allait vraiment souffrir et tout perdre. Mais qu’est-ce qu’il devait faire ? Ce qu’il ressentait pour Elen … et pour Manelena, c’était la même chose ? Mais on pensait connaître une personne avant de remarquer que l’on se trompait depuis le début. Voilà sa plus effroyable erreur.

« Ah … Mais comment m’en sortir ? »

C’était trop tard, n’est-ce pas ? Il ne pouvait pas s’en sortir, non ? A partir de là, impossible de réagir correctement. Il allait … devoir vivre avec ça dorénavant ? Non … Mais Manelena ? Elen ? Peut-être qu’il devait tout simplement ne pas choisir ? Et au final, dire à Elen que c’était fini ? NON ! Il en avait fini avec l’aigle tricéphale, tout était terminé. A partir de là … si tout se calmait … Non ! Manelena venait de lui faire une proposition. Si Elen l’entendait, il y avait de fortes chances qu’elle s’imagine, à raison, de quelque chose entre lui et Manelena. Il posa sa tête sur le bord du bateau.

« Je mérite ma situation, c’est tout. »

Alors que tout était terminé, il s’était trompé lourdement. Tout ne faisait que commencer. Il ne devait pas avoir de sentiments négatifs, c’était mauvais, très mauvais. Qu’est-ce que Clari lui aurait dit dans une telle situation ? Sûrement une imbécillité dont il aurait bien eut besoin. Clari lui manquait … comme sa mère.

« Tery ? Tout le monde t’attends. Je suis venue te chercher. »

« Elise ? Tu n’étais pas obligée de te déplacer, tu sais ? »

« Il fallait pourtant que je viennes te récupérer. Elen se fait du souci pour toi. Il y a quelque chose qui te tracasse ? Tu as la tête des mauvais jours si je peux me permettre cette petite réflexion … Ne le prends pas mal ! »

« Je ne le prends pas mal, hein ? Mais … Disons que c’est un problème sentimental. Dis-moi, quand tu étais serveuse dans cette auberge, est-ce que tu avais déjà eut affaire à des hommes adultères ? Du genre, qui étaient normalement avec une femme mais tu les voyais avec une autre dans leurs bras ? »

« Tery, ne me dit pas que tu as … » commença à dire la femme aux cheveux auburn avant qu’il ne bredouille en la regardant, faisant des mouvements confus avec ses mains :

« Non non ! Pas du tout ! NON ! Je te le promets ! »

« Pfiou, tu me rassures un peu. Après, je ne te mentirais pas. Dans la vie, il y a des hauts, il y a des bas. Ce n’est jamais très joyeux mais en passant du temps avec la personne que l’on aime, je suis sûre et certaine que vous pourrez vous comprendre. »

« Est-ce que tu es sûre de ça, Elise ? Car des fois, j’aimerais me dire que oui … mais que dans le fond, je ne suis même pas certain de tout ça. »

« Où est-ce que tu veux en venir exactement, Tery ? Ca serait mieux si … tu me le disais, non ? Je te promets que je serais une tombe. »


Il commença à se rapprocher d’elle, lui chuchotant quelques mots dans l’oreille gauche. Bien gêné, il bafouilla un peu alors qu’Elise hochait la tête positivement.

« Tu te rends compte quand même ? Enfin, je ne sais pas … »

« Oui, tu n’es pas forcément la mieux placée pour m’aider, Elise mais pourtant … »

Elle le regarda, interloquée, avant qu’il ne lui chuchote un prénom. Une vive rougeur envahit les joues de la jeune demoiselle qui commença à se triturer les doigts. Mais bon, ce n’était pas pareil, il n’y avait pas trois personnes dans tout ça !

« Je ne … Enfin, je suis un peu confuse. Mais tes sentiments dans tout ça ? »

« Mes sentiments ? Là aussi, je ne sais pas vraiment … Tu as remarqué au sujet d’Elen non ? Qu’elle est parfois très différente. »

« C’est le cas mais ce n’est pas si grave non ? Ce n’est pas comme si tu pouvais te douter de ses sentiments, non ? »

« Sur ce point, j’en suis sûr et certain. Je n’ai même pas besoin de poser la question mais c’est par rapport .. aux autres personnes. J’ai peur qu’elle soit dangereuse pour elles. »

« Et quant à … l’autre personne ? » demanda Elise. Elle ne précisait pas son nom pour éviter les oreilles indiscrètes. Le jeune homme baissa les yeux avant de chuchoter :

« Elle est comme un rêve. Comme si cette personne que je ne pensais jamais atteindre se montrait enfin sous son véritable jour. »

« Est-ce que tu veux que cela reste un rêve ? Ou alors que ça devienne la réalité ? »

« Je suis peut-être en train de me faire des illusions. Je m’imagine des choses. »

Elise fit un mouvement négatif de la tête. Elle confirmait ses pensées par rapport à cette seconde femme. Cela se voyait aisément bien que personne n’osait le dire à voix haute. Aucun ne voulait des problèmes avec elles. Elle prit Tery par le bras pour l’inciter à aller voir les autres. Ils avaient perdu assez de temps non ? Il fallait qu’il aille retrouver les autres pour pouvoir penser à des choses bien plus positives et moins compliquées.

Chapitre 106 : Simili-incarnations

ShiroiRyu
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Huitième axe : Un être démoniaque


Chapitre 106 : Simili-incarnations

« Dis, Sérest, je peux te poser une question ? »

« Bien entendu, Tery, qu’est-ce qui se passe ? Tu as l’air assez … troublé, non ? »

Pendant qu’ils descendaient de la tour avec les soldats encore vivants, Tery s’était tourné vers la femme ailée qui aidait son mari à rester debout, la regardant pendant de longues secondes. Il semblait chercher à peser ses mots, comme s’il avait du mal à les confirmer avant de finalement dire d’une voix lente :

« Je voulais savoir … Trozéral a parlé d’élus de la déesse et du dieu. Est-ce que cela te dit quelque chose ou non ? Tu peux plus en parler ou pas ? »

« Je le peux, bien entendu, Tery. Mais peut-êtr que ce n’est pas le bon moment ? Même s’il faut avouer que la Tour me semble bien silencieuse depuis sa mort. »

« J’ai surtout l’impression que les créatures à l’intérieur se sont calmées, comme si elles avaient compris la situation. C’est une bonne chose, la décente sera juste longue et non dangereuse. J’espère que les autres ne sont pas partis risquer leurs vies inutilement et qu’ils n’ont pas essayé de monter. Nous avons déjà beaucoup de morts de notre côté. »

« Je pense qu’en nous voyant disparaître, ils ont compris qu’il valait mieux éviter de poursuivre leur ascension. Et vue les créatures, je pense que là aussi, ils ont préféré patienter plutôt que de se lancer à l’assaut. Ils nous attendent sûrement. »

« Mais … sinon comment va Séran ? » demanda une nouvelle fois Tery en regardant l’homme qui était conscient bien qu’il ne lui adressait pas directement la parole.

« J’ai connu des jours meilleurs, Tery. Mes félicitations néanmoins. »

« Je ne suis pas le seul à nécessiter d’être félicité mais bon, ce n’est pas bien important. Mais merci … nous avons finalement réussi notre objectif après tout ce temps. Ah … Combien de mois avons-nous passé à cela ? Je me le demande. »

« Ce n’est pas si long que ça si tu y réfléchis bien. Certains personnes ont passé des décennies voire leurs vies entières à des quêtes qu’elles n’ont jamais réussi. Ce que nous avons accompli est l’oeuvre de plusieurs vies, Tery. »

Sérest marquait un point qu’il était difficile d’ignorer. Ils avaient réussi … presque l’impossible à y réfléchir. Ils avaient réussi à battre les créatures légendaires et cela en une année ou un peu plus. Il n’avait plus aucun repaire temporel depuis qu’ils étaient partis dans cette quête. Quel âge avait-il ? Elen avait quel âge ? Il n’en avait strictement aucune idée malheureusement. Il regarda Elen pendant de longues secondes, cela n’échappant pas à la jeune femme aux cheveux blonds qui lui demanda dans un sourire :

« Et bien, Tery ? Y a t-il quelque chose qui éveille ton intérêt chez moi ? Tu m’observes en détails. Si tu veux, tu peux te rapprocher hein ? Je ne mords pas. »

« Je le sais parfaitement, Elen. Ce n’était pas ça que je regardais. Tu n’es pas un cheval, je ne vais pas observer ta dentition. »

Elle cligna des yeux, interloquée pendant quelques instants avant de comprendre la blague du jeune homme qui cherchait à décoincer l’ambiance. Elle rigola légèement, venant prendre Tery par le bras pour l’emmener jusqu’à elle, coinçant celui-ci entre ses mains.

« Et bien pour la peine, tu vas rester avec moi pour les prochaines heures, d’accord ? Monsieur qui fait de l’humour dans les situations dangereuses. »

Il n’était pas sûr d’en avoir fait, enfin, il avait juste voulu dérider un peu la situation tandis qu’il étudiait la situation. Manelena allait bien même si elle gardait sa mine renfrognée. Sérest et Séran ? Ca passait. La première s’occupait du second en sa qualité de femme. Krawnia allait bien elle aussi, elle voletait au-dessus d’eux, ayant perdu son sourire et son humour pour le moment. Elle balayait les environs sous un regard à glacer le sang, comme celui d’une rapace prête à fondre sur sa proie. D’ailleurs, tant qu’elle était dans les airs, il pouvait lui demander quelque chose normalemnt :

« Krawnia ! Est-ce que tu vois au loin ? Enfin, tu remarques quelque chose ? »

« Rien du tout, c’est désespérément vide et calme … beaucoup trop calme. »

Ce dixième étage avait la particularité d’être tout simplement basique. De longues plaines verdoyantes, des petits bois et autres. S’il y avait de ces êtres dans les environs, l’élément prédominant serait normalement la terre, ce qui voulait dire qu’à l’étage inférieur, il s’agissait de l’élément aqueux comme le peuple de Royan. Hum … D’ailleurs, Royan était aux côtés d’Elise, ils ne s’en cachaient presque plus.

Il y avait au moins une chose qui était plaisante dans ce monde. Tery ne put s’empêcher de sourire. Au moins, tous les deux étaient heureux, c’était le plus important. Ils avaient peut-être tout perdu à l’époque mais ce n’était plus qu’un lointain souvenir. Il tapota doucemnt l’épaule gauche d’Elen, lui chuchotant de regarder Royan et Elise.

« Oh … Hum … Ne disons rien, hein ? Nous ne sommes pas là pour les titiller. »

« Cela devrait être mon rôle depuis que Clari n’est plus là mais je ne mentirais pas en disant que je n’ai pas la force pour faire tout ça. »

Hahaha .. Il chercha à sourire une nouvelle fois mais maintenant, le coeur n’y était plus. Il aurait aimé terminer cette quête avec elle. Finalement, lorsqu’ils arrivaient au neuvième étage, après plus d’une journée de marche, ils pouvaient constater qu’il s’agissait exactement de ce que chacun s’était imaginé ou presque : un endroit un peu enneigé, rcouvert par la glace mais avec aussi des endroits où l’herbe était florissante, entourant quelques petits lacs. C’était décemment très étrange de voir deux écosystèmes aussi différents mais aussi proches. Surtout si on rajoutait les endroits où la pluie était battante.

« Brrr … Je ne crois pas que ça soit une bonne idée que de traîner ici si vous voulez tout savoir. On ferait mieux d’avancer et au plus vite. Normalement, s’ils ne sont pas partis … ou dans le pire des cas, morts, les autres nous attendent au huitième étage. »

Krawnia avait pris la parole, s’ébrouant comme le ferait un oiseau géant. Ce n’était pas si étrange en vue de ses ailes mais cela était un spectacle un peu envoûtant, difficile à ignorer. Sauf qu’il retrouva très vite ses esprits quand Elen lui donna un petit coup dans les hanches tout en lui disant d’une voix courroucée :

« Je peux savoir ce que tu fais, Tery Vanian ? »

« Oh ? Hum … Rien de spécial, j’avais l’impression de voir un petit oiseau faire sa toilette, rien de plu, rien de moins. Pourquoi cette question, Elen ? »

« Tu le sais très bien pourquoi je te poses cette question, Tery. »

Exactement mais ce n’était pas une raison pour qu’il réponde ! Surtout s’il voulait éviter d’avoir des ennuis. Encore une journée et demie, cette fois, et ils arrivaient finalement à descendre au huitième étage. Encore une fois, ils n’avaient pas rencontré l’une de ces créatures et Royan avait murmuré que c’était tant mieux. Il n’était pas réellement prêt à voir son peuple ressembler à des monstres sans âmes pour le moment.

« A partir de là, je peux vous servir de guide. Je connais les environs … Du moins, les environs des environs. Je n’étais jamais arrivée jusqu’au neuvièm étage, je ne savais qu’à peine l’endroit où il fallait se rendre pour ça. » déclara Krawnia d’un air un peu fier avant de déployer ses ailes. Ils devaient néanmoins éviter les soucis électriques non ? « Par contre, ici, je suis sûre et certaines qu’il y a de ces monstres ressemblant aux Mékalarmiens. A partir de là, il vaut mieux être prudent, non ? Surtout après notre dernière réussite. »

Elle n’avait pas totalement tort. Malgré qu’elle reconnu aisément le chemin après quelques heures, la prudence était de de mise Néanmoins, bien qu’elle les avait mis en garde, aucun monstre ne vint les attaque. Suspicieuse, Krawnia déploya ses ailes pour s’envoler sur plusieurs mètres de hauteur.

« Non … C’est comme s’ils avaient disparu. Mais en même temps, j’arrive à ressentir leurs présences. Sincèrement, ça ne me plait pas du tout. »

Elle descendit après quelques minutes, faisant son bilan aux autres membres du groupe et les soldats, tous restant soulagés de ne pas avoir à se battre. Enfin, après une demie-journée, des cris se firent entendre sur leur gauche. Des cris de joie et non de combat. Le reste de l’armée était présente, visiblement très heureuse de les revoir.

« Prince Royan ! Vous allez bien ! Enfin … Non ! Vous n’allez pas bien ! Vous êtes blessés ? Que s’est-il passé ? Où sont … les autres ? »

« Ne vous inquiétez donc pas pour moi mais je vous retourne la question. Vous me semblez … moins nombreux qu’avant notre incident. »

« Après que vous ayez été éjectés de la Tour par le ciel, des créatures électriques ressemblant aux Mékalarmiens s’en sont pris à nous. Elles étaient moins virulentes que lorsqu’il était parmi nous… » dit l’un des officiers en posant son regard sur Tery qui ne le releva pas. « … mais ils ont néanmoins essayé de nous attaquer. Mais bizarrement, après une dernière attaque il y a de cela trois jours, nous n’avons plus rien subit. Enfin, on ne va pas s’en plaindre. Et vous ? »

« Disons que l’aigle Trozéral voulait nous rencontrer en personne et a utilisé une méthode un peu spéciale pour cela, voilà tout. »

« Vous … avez éliminé cet aigle géant alors ? Mais qu’est-ce qui va se passer dans le monde maintenant ? Est-ce que c’était vraiment ce qu’il fallait faire ? »

« Rien ne changera. Vous pouvez le constater par vous-mêmes. Il n’y a pas eut de tremblement de terre, de pluie battante ou toutes ces choses, loin de là. C’est bien tranquille et calme, comme il fallait s’en douter. Quant aux portes, elles ne s’ouvriront pas. »

« Les portes ? De quoi est-ce que vous parlez ? » demanda l’officier alors que Tery avait un petit sourire aux lèvres. C’est vrai qu’ils n’étaient pas forcément au courant. Cela restait du domaine du secret à la base. Il répondit pourtant :

« Rien de bien spécial, vous n’avez pas à vous en faire. Dites-vous simplement que votre vie ne va pas être changée par rapport à auparavant, voilà tout. »

« D’accord, si vous le dites, on peut que vous croire. De toute façon, ce n’est pas comme si nous avions réellement le choix, non ? »

« C’est exactement ça. Après, vous avez remarqué que je ne suis pas aussi monstrueux que les rumeurs prétendaient hein ? Je ne sais pas ce que les gens disaient exactement sur moi mais en même temps, il vaut peut-être mieux pas que je sois au courant. »

« Oh pourtant, y a rien de spécial … Enfin, sauf le côté monstre sanguinaire qui ne paraissait pas très crédible même si les cornes sont un peu effrayantes. »

« Pourtant, vous pourriez les toucher, ça ne changerait pas grand-chose hein ? »

Et pour leur donner une preuve, il fit apparaître ses dernières avant de pencher la tête en avant. L’officier le regarda avec appréhension et inquiétude, observant les environs tandis que Tery l’incitait en reprenant :

« Allez, promis, touches mes cornes, ça te portera bonheur ! »

C’était une remarque particulièrement stupide mais qui avait le mérite de faire dérider le soldat. Celui-ci eut un petit rire avant de poser une main sur la corne droite de Tery. L’officier murmura avec lenteur :

« On a du mal à croire qu’elle soit réelle .. et attachée à un humain. »

« Et pourtant, on ne se dit pas pareil avec les citoyens de Claudiska et leurs ailes et becs ? Et pareil pour les citoyens de Mékalarma. »

« C’est pas faux. C’est juste une race différente de la nôtre. Et vous semblez moins belliqueux qu’un mékalarmien si je peux me permettre. »

« C’est pas difficile en soi. » rétorqua Tery avant de rire. D’autres soldats commencèrent à vouloir eux aussi toucher les cornes de Tery, celui-ci se laissant faire.

« Je n’arrive pas à croire qu’il ait réussi à attirer l’attention des soldats de cette manière … »

« Hey, Manelena … enfin, reine Manelena, tu ne veux pas me retirer mon moment de gloire quand même ? Ne sois donc pas jalouse ! »

« C’est sûr que je dois noter que ça doit être l’un de tes plus moments de toute ta vie, Tery Vanian. Ah … Je crois que je suis fatiguée. » soupira Manelena de façon presque désespérée. Le jeune homme avait réussi à l’épuiser mais … elle ne pouvait s’empêchr de faire un petit sourire. Si tous les démons pouvaient être comme Tery, cela serait beaucoup plus simple pour se faire accepter. Oh … Tery et Elise, bien entendu. Elle n’oubliait pas cette dernière qui semblait regarder Tery avec un peu de jalousie. Elle remarqua qu’une main se posait sur le crâne d’Elise, celle de Royan qui déclara :

« Cela facilitera la communication entre les démons et les autres races, non ? »

« C’est vrai, prince Royan. Simplement, je me demande si les gens auraient eut la même réaction si je m’étais proposé. Qu’est-ce que vous en dites ? »

« Je pense que les réactions auraient été encore plus nombreuses. Vous n’avez pas à vous en faire à ce sujet. Tery fait du très bon travail. »

« Pour le moment, je peux me satisfaire uniquement de vos mains sur mes cornes. »

« … … … Hum. Oui, je vois, mademoiselle Elise. » dit tout simplement le prince après quelques secondes de silence, continuant son geste avec nonchalance.

Maintenant que les soldats étaient rassurés, tout le monde consentit à descendre les derniers étages de cette tour qui avait été le dernier affrontement. Ils allaient enfin pouvoir souffler, sans avoir à se combattre ou autre. C’était fini …
Arrivés au bas de la tour après plusieurs jours de marche, sans créatures pour les attaquer, c’était une excellente chose qu’il ne pouvait ignorer. Ah … Il passa une main sur son front comme pour l’essuyer alors qu’il était temps de dire au revoir à Krawnia. Celle-ci fit une petite moue dépitée avant de chuchoter à Tery :

« Au revoir, mon petit démon. Promis, toi et moi, nous nous retrouverons. J’ai trouvé cela très amusant et divertissant de se promener dans la tour. Vous ne me donnez pas l’impression d’être vraiment en train de vous ennuyer, n’est-ce pas «

« Ce n’est pas un jeu, mademoiselle Krawnia, pas du tout. Ce que vous avez vu était peut-être le plus difficile de nos combats mais ça ne veut pas dire que ça va s’arrêter. »

« Je pensais le contraire, non ? Il n’y a plus rien à faire de ce que j’ai cru comprendre. N’est-ce pas une tentative assez ridicule pour me reposer ? » demanda t-elle dans un grand sourire amusé alors que le jeune homme rougissait faiblement.

« Ce n’est pas exactement ça … mais je préfère éviter qu qulqu’un qui a une fonction aussi importante nous rejoigne ou considère que nous nous amusions. Ce sont des choses sérieuses qui se passent. Je suis désolé mais peut-être qu’un jour, nous nous reparlerons. »

« Bien entendu, bien entendu. Dommage que des personnes nous regardent, je me dis que j’aurais bien voulu profiter de toi un moment ou deux. »

Une bouffée de chaleur vint l’envahir mais il refusa aussitôt, hochant la tête négativement. Hors de question que cela se passe ainsi, il n’était pas comme ça. Autant, il n’arrivait pas à se sentir mal quand il y avait Manelena en face de lui. Comment c’était possible ? Tout simplement car ses sentiments n’étaient pas les mêmes.

« Hum ? Qui donc est-ce que tu reg… Oh. Je vois, je vois, une simple cheffe des gardes de la tour de Pirsey n’est sûrement pas de la même trempe qu’elle. Mais ne t’en fait donc pas, Tery Vanian. Un jour, toi et moi, nous planerons. D’ici là, essaies de bien te porter. »

La femme aux deux ailes différentes déposa un baiser près des lèvres de Tery, celui-ci préférant rester de marbre à ses paroles. Ce n’était pas qu’il était indifférent, c’était juste qu’à cause des paroles de Krawnia, il comprenait qu’il était si facile à lire dans ses sentiments envers Manelena. Si c’était le cas pour Krawnia, Elen devait aussi le savoir et il voulait absolument éviter une crise comme les dernières fois.

Mais maintenant, ils reprenaient la route vers Traslord, là où le prince devait normalement se rendre pour rassurer son peuple de l’expédition réussie. Et après ? Direction Shunter ? Déjà qu’il allait devoir délaisser Elise et Royan à Traslord, Manelena, ça allait être le cas à Shunter. Il allait se retrouver seul avec Elena puisque Sérest et Séran avaient leurs proprs objectifs, non ? D’ailleurs, ils allaient devoir parler de ça.

Sur le bateau qui les ramenait en direction de Traslord, Tery avait attendu que tout le monde se retrouve autour d’une table pour relancer le sujet. Il n’avait pas oublié ce qui avait été dit concernant Sérest et Séran. Cela était tout simplement impossible à ignorer. Regardant droit dans les yeux Sérest, il demanda finalement :

« Et si vous nous racontiez ce que Trozéral a voulu dire ? Qu’est-ce que vous en pensez ? »

« Que vu que nous sommes seuls, nous pouvons nous le permettre. De toute façon, vous avez été présent à chaque affrontement ou presque. Nous pouvons alors vous révéler la vérité à notre sujet. Comme vous le savez, nous nous appelons Sérest et Séran. Nos prénoms sont véridiques et … en même temps un peu inventés. Vous remarquerez aussi que je maîtrise parfaitement les lignes d’Alzar tandis que Séran manipule avec aisance les lignes de Zélisia. »

« Ne tournons pas autour du pot. Même si cela peut paraître difficile à croire, nous sommes en quelque sorte les réincarnations de Zélisia et Alzar. Ne soyez pas trop surpris, loin de là. Tout ce que vous pouvez vous dire, c’est que l’ironie du sort a fait qu’avec ces réincarnations, nous sommes de sexe différent par rapport à l’original. »

« Vous êtes complètement fous, est-ce que vous le savez ? » déclara aussitôt Manelena. Les autres n’osaient point ouvrir la bouche mais pour chacun, tout était plus que difficile à croire. Pourtant, Sérest n’en tint guère ombrage, reprenant la parole :

« Oui, nous savions au sujet de votre réaction. Comme nous savons ce qui va se passer maintenant que les créatures légendaires sont mortes. Ne vous inquiétez pas à leur sujet, rien ne disparaît jamais réellment. Tery, j’ai une question pour toi. Veux-tu que je te la pose ? »

« Euh … Bien entendu mais bon, enfin … »

« Qu’est-ce que tu penses exactement de ces portes démoniaques ? Mais aussi de ton statut de démon ? Est-ce que tu imagines qu’il sera possible un jour que tu puisses oeuvrer pour une paix durable entre les démons et le reste du monde ? »

« C’est un peu … euh une illusion non ? Enfin, moi-même, je suis ainsi. Elise aussi. Mais qui nous dit que les démons sont tous comme nous ? Il suffit de voir celui qui se faisait passer pour le grand prêtre de Shunter mais aussi l’Oracle. Ils me semblaient très belliqueux. »

« Mais des êtres belliqueux, il n’y a pas que les démons qui en possèdent. Tu as bien put montrer ces derniers jours que tu n’étais pas plus différent qu’un autre soldat à l’armée de Shunter et Traslord, non ? »

« Oui mais bon … Ce n’est pas pareil. Quant aux portes démoniaques, je sais juste qu’elles bloquent l’accès de notre monde aux démons comme moi. Enfin, je n’aime pas ce terme de démons, ça fait sinistre et maléfique. »

« Je vois, je vois … Hum … Et que penses-tu de Zélisia et Alzar ? Est-ce que tu nous imaginais ainsi ? Ou alors différemment ? »

« A part le fait que nous cachiez la vérité depuis des mois, je ne sais pas trop ce que je peux dire d’autre hein ? Pourquoi nous le dire maintenant ? »

« Car vous avez réussi tout ce que vous avez accompli ? Car vous avez fait preuve de persévérance et qu’il était alors normal de vous prévenir de ce qui va se passer. »

« J’ai encore un peu de mal à croire à ces belles paroles, je vous l’avoue. »

« Ce n’est pas illogique et anormal … loin de là. Néanmoins, tu peux nous faire confiance. Elen aussi le peut. Quant aux autres, bien qu’ils soient en partie porteurs de nos marques, ils n’ont pas à démériter. »

Pourquoi est-ce qu’ils parlaient ainsi ? Pour le moment, il avait surtout l’impression d’être pris comme un enfant à qui on tentait de raconter une histoire. Des incarnations de Zélisia et Alzar ? Pourtant, Sérest et Séran ne semblaient pas fous. Néanmoins, il se méfiait car généralement, c’était ceux qui paraissaient les plus calmes qui étaient les plus dangereux.

Pourtant, s’ils voulaient se montrer menaçants ou alors fous, ils n’auraient pas mis autant de temps, non ? Il nageait en pleine incompréhension alors qu’il regardait Manelena. Dans une telle situation, qu’est-ce qu’elle ferait, elle ? Il vouilait connaître sa réponse.

Mais pour le moment, il allait surtout profiter du voyage. Il regarda les yeux bleus d’Elen. Celle-ci semblait comme surprise ? Subjuguée ? Il ne savait pas trop exactement mais depuis que Sérest et Séran avaient pris la parole, elle les regardait différemment.

« Il y a un souci, Elen ? » demanda le jeune homme alors qu’elle hochait la tête négativement.

« N … Non, Tery. Ne t’en fait pas, ce n’est rien du tout. »

Chapitre 105 : Un triste avenir

ShiroiRyu
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Chapitre 105 : Un triste avenir

Les deux pieux de terre s’enfoncèrent ensemble dans un seul et même œil de la tête de corbeau. Une gerbe de sang entre le rouge et le noir s’en échappa, la tête se penchant en arrière, croassant de douleur.

« CROAAAAAAAAA ! VAIS LES … VAIS LES … »

Les deux autres têtes se tournèrent vers Tery et Manelena. Peut-être que cela n’avait pas été une si bonne idée que ça en fin de compte. S’ils avaient réussi à se débarrasser de l’aigle en une fois, peut-être ? Mais là, malgré les blessures qui s’amoncelaient sur son corps et l’oeil crevé de la troisième tête, il était toujours bel et bien vivant, toujours prêt à se battre.

« Manelena, il se peut que maintenant, nous ayons de sérieux problèmes. »

« Tu le penses ? Je ne l’avais pas remarqué, Tery. Nous aurions dût réussir à éliminer cette tête dès le premier coup. Maintenant, ils vont vraiment combattre ensemble. »

Le regard des trois têtes ne laissait aucun doute à ce sujet. Ils venaient finalement de trouver un terrain d’entente et même si l’oeil crevé continuait de laisser s’écouler un liquide à la consistance des plus douteuses, la tête de corbeau était maintenant calme, étrangement calme. Et ce fût elle qui prit la parole, disant :

« Fini de plaisanter. Nous sommes Trozéral. Nous sommes le dernier bastion contre l’ouverture des portes démoniaques. Nous ne vous laisserons pas accéder à cela. »

« Comment un tel groupe as t-il put se former de la sorte ? Comment est-ce qu’elle a put rejoindre un démon ? Pire, le fils de ce démon ! »

« Ils ne savent même pas qui ils sont, peut-être est-ce cela qui est le plus triste au final ? »

Les trois têtes parlaient normalement entre elles. Elles étaient en parfaite osmose maintenant. Autant dire que tout cela n’allait pas dans le bon sens. Lorsque l’une ouvrit la bouche, un souffle de feu se prépara. La seconde tête avait de la glace qui s’échappait de son bec tandis que la troisième, à l’oeil crevé, préparait une puissante foudre dévastatrice.

« TERY ! SAUTES ! CETTE FOIS-CI TON GOLEM TE SAUVERA PAS ! »

Manelena l’attrapa par le bras, sautant avec lui de l’écu du golem. Il tomba lourdement au sol mais voilà que Manelena le faisait rouler sur le côté, avec elle, tandis que des explosions se produisaient au-dessus de leurs têtes. HEY … HEY ! Il se passait quoi là ? C’était une nouvelle guerre entre deux royaumes ?

« Bon sang ! Tes golems sont supers mais dès qu’ils sont détruits, ça devient une plaie ! On roule, Tery ! Et tu ne t’arrêtes pas ! »

Elle tendait la main en arrière comme pour protéger Tery et elle, l’autre main gardant le jeune homme contre son armure noire. Des morceaux de roche tombaient sur eux mais elle arrivait à le protéger … et il devait faire de même ! Il tendit les mains sur les côtés, les joignant ensuite. Un dôme se pierre se forma autour d’eux, il fallait juste qu’il tienne bon.

« Tery, je pense que tu peux me lâcher … et inversement. »

Pfiou … il sentait les cheveux de Manelena sur son visage et remarqua qu’elle n’avait plus son casque noir. Malgré l’obscurité à cause du dôme, il vit que son casque noir avait été détruit sur son flanc gauche, là où justement la tête de Manelena saignait. Il tenta d’ouvrir la bouche mais elle posa une main sur celle-ci, lui disant :

« Ne parle donc pas, Tery. Je crois que hors du dôme, ce n’est pas joli à voir. »

« Hors du dôme ? MAIS Y A ELEN ET LES AUTRES ! Pousses-toi ! »

Il n’aimait pas abuser de sa force dans ces moments-là mais il repoussa Manelena sur le côté, stoppant le dôme autour d’elle et lui pour regarder la situation. Ils … s’étaient enfermés dans ce dôme combien de temps ? Une minute, même pas, non ?

« Manelena, où est-ce que … se trouvent les autres ? »

Des trous dans le sol, des rochers un peu partout, des traces de sang, des cadavres de soldats, il avait une boule dans la gorge, espérant ne pas reconnaître l’un des corps. Il avait déjà perdu Clari, il ne voulait pas perdre quelqu’un d’autre.

« ELEN ! ELISE ! ROYAN ! »

Il n’allait pas crier tous les noms car cela pouvait paraître ridicule même si à l’heure actuelle, être ridicule était vraiment la dernière chose qui le préoccupait. Il entendit quelques gémissements sur sa droite, voyant Royan et Elise. Le premier était sous la seconde, celle-ci semblant s’être mise sur l’adolescent comme pour le protéger.

« J’espère que je ne vous dérange pas … tellement. »

« Ce n’est pas drôle, Tery. On perd le contrôle de la situation. On est vraiment en danger, si tu ne l’avais pas encore remarqué. »

« Je l’ai plus que remarqué, Royan. Comment vas Elise ? Elise ? »

« Hmm … J’ai connu des jours meilleurs, je ne dois pas mentir. Mais au moins, Royan va bien, c’est tout ce qui compte, n’est-ce pas ? »

« C’est exact, je t’en remercies, Elise. Je vais me relever. »

Plus facilement, le jeune homme aux cheveux bruns vint aider Royan et Elise, jetant un œil à Manelena. Celle-ci était auprès de Séran, l’imposant homme restant debout, bras tendus sur les côtés comme pour faire rempart de son corps.

« TERY ! SERAN EST DANS UN SALE ETAT ! »

Comment ça ? A ce point ? Le jeune homme délaissa Elise et Royan, sachant que ça irait parfaitement de leur côté. Il couru en direction de Séran, ne voyant pas Sérest. Où est-ce qu’elle se trouvait maintenant ? Il lui était arrivé quelque chose de grave ?

« Il va … mal … mais ce n’est pas mortel. »

La voix très faible de Sérest n’était pas faite pour le rassurer. Il la chercha du regard, remarquant les nombreues brûlures à ses ailes mais aussi sur son corps. Krawnia était adossée à un reste d’un mur de pierre, une aile complètement gelée, le bras droit ensanglanté. Qu’est-ce qui s’était passé en si peu de temps ?

« C’est … Trozeral qui vous a fait ça ? Où est-ce qu’il se trouve ? »

« Dans … les airs. Pour contempler ce qu’il a réussi à accomplir. » murmura faiblement Sérest alors qu’elle cherchait à se relever avec difficultés.

« Où est Elen ? Je ne la vois toujours pas ! Et Séran ? Qu’est-ce qu’il a fait ? Il ne répond plus quand on lui parle ! Qu’est-ce que … »

« Il est … juste évanoui et blessé gravement mais il s’en sortira. Désolée mais pour nous, c’est terminé. Les pouvoirs démoniaques sont si puissants. »

« Ne vous en faites pas, je veux juste … retrouver Elen et je vais m’occuper de lui. »

Il n’avait pas pensé que les dégâts seraient si importants. Pourtant, l’aigle tricéphale n’avait fait qu’une simple attaque, n’est-ce pas ? Comment est-ce qu’il avait réussi à accomplir ça ? Et l’aigle ? Où … Ah oui, en hauteur. Il leva les yeux vers le ciel, voyant le monstrueux et majestueux oiseau à trois têtes. Il les survolait de toute sa splendeur.

« ELEEEEEEEEEEEEEEEEEEEN ! »

Il criait son prénom du mieux qu’il le pouvait mais il n’avait aucune réponse. Où est-ce qu’elle … hein ? L’aigle tricéphale gesticulait dans les airs. Pourquoi est-ce qu’il se comportait ainsi ? Hum ? C’était étrange, il avait l’impression que …

« ELEN ?! MAIS QU’EST-CE QUE TU FOUS LA-BAS ?! »

Qu’est-ce qu’elle faisait sur l’aigle ? Elle était folle ou quoi ? Mais surtout, comment est-ce qu’il pouvait faire pour la rejoindre ? Et qu’est-ce qu’elle faisait là ? Et surtout, elle allait comment ? C’était de la pure folie de sa part ! Il se tourna vers Manelena, lui criant :

« Je vais rejoindre Elen ! Elle est sur l’aigle ! Je comprends pas ce qui lui prend ! »

« Ne commets pas de folie non plus ! Tu ne peux pas l’atteindre !  Tu n’es pas capable de voler, Tery ! C’est tout simplement impossible ! »

« Ça ne fait pas parti de mon vocabulaire, Manelena. Et tu le sais aussi bien que moi. »

Ce n’était pas une raison pour qu’elle le laisse faire. Elle s’apprêtait à retourner à son niveau mais le jeune homme posa une main sur le sol, la pierre se mouvant sous lui. C’était dangereux, vraiment très dangereux ce qu’il comptait faire. Mais des fois, il n’y avait aucune autre possibilité. Il devait rejoindre Elen le plus vite possible ! Le souci, c’est que c’était un aller sans retour. Il jeta un bref regard en arrière, clignant des yeux en s’exclamant :

« Manelena ? Mais il te prend quoi ? Je peux savoir ? »

Elle était elle aussi en train de courir sur ce pont de pierre qui ne faisait que s’allonger et se tordre dans tous les sens, se dirigeant au fur et à mesure en direction de l’oiseau tricéphale qui tournoyait sur lui-même, toujours avec Elen sur lui.

« Tais-toi et continue de nous emmener jusqu’à lui ! On n’aura qu’une chance ! »

Une seule chance ? C’est vrai qu’avec toi personnes sur lui, l’aigle allait sûrement se défendre avec ardeur et rage. Déjà qu’il semblait fulminer dans les airs, Elen devait lui rendre la vie impossible bien que Manelena et Tery ne pouvaient pas le voir.


Garder les yeux posés sur lui. C’était l’unique cible qu’il devait avoir dans champ de vision et rien d’autre. L’unique créature qui allait lui causer des problèmes majeurs. L’unique être dont il devait se débarrasser pour que tout soit terminé. Il ne s’était juste pas attendu à une telle force de la part Trozéral mais maintenant, ils étaient préparés.

« ELEN ! ON ARRIVE ! TIENS BON ! »

Aucune réponse de la part de la jeune femme aux cheveux blonds. Il n’arrivait pas à voir où elle se trouvait sur Trozéral. Qu’est-ce que ce fichu piaf en avait fait ? Manelena arriva jusqu’à lui, le jeune homme sentant que le vent le portait avant qu’elle ne dise :

« Accroches-toi, Tery. Je t’envoies là-bas ! Je vous rejoins tout de suite ! »

Hein ? Comment ça, elle comptait l’envoyer ? Elle posa une main dans son dos, le jeune homme se sentant projeté en avant en direction de l’aigle tricéphale. WOOOOOOW ! Elle était complètement folle ou quoi ?! Il devait se préparer à agripper l’aigle mais une tête se tourna vers lui, couverte d’entailles en tout genre.

« Toi aussi ! Tu es là ?! Vous êtes deux pauvres fous ! A combattre ensemble alors que vous êtes destinés à vous entretuer ! Vous cherchez à lutter contre votre destin ! »

« Ah, voilà que ça me semble plus normal ! J’avais l’impression que tu étais différent des autres mais dans le fond, tu es exactement pareil. Tu me hais, n’est-ce pas ? »

« Je ne hais pas ce que vous êtes ! Je hais ce que vous faites ! Les portes démoniaques doivent continuer à être fermées ! Même si elle se met en travers de notre chemin, on ne doit pas laisser faire les démons qui ont réussi à l’avoir comme alliée ! Je vais te becqueter ! »

Il aurait bien aimé réagir mais vue la vitesse à laquelle il fonçait vers l’aigle et celui-ci avait déjà le bec grand ouvert, il n’avait pas pouvoir réellement éviter ce qui allait lui arriver. C’est à ce moment là qu’un corps sauta sur le sommet du bec, tendant une main vers Tery pour l’agripper. Il se retrouva allongé dans le plumage de l’aigle, Elen le gardant contre elle, une main serrant fermement une touffe de plumes.

« Ah … Ah … Merci Elen, ce n’est vraiment pas facile, je dois t’avouer. »

« J’ai eut peur … que tu étais mort, Tery. Je suis désolée … Je ne suis pas belle à voir. »

Pas belle à voir ? Pourquoi est-ce qu’elle disait cela ? En voyant son visage, il comprenait où elle voulait en venir. Il n’y avait pas que les yeux vairons mais son visage était parcouru par des veines noires et blanches, celles-ci se croisant. D’une taille anormalement grosses, on aurait put croire que son visage n’était qu’un masque dont les veines étaient de nombreuses fissures, prêt à se briser à chaque seconde qui défilait.

« Ne t’en fait pas, tu restes magnifique, Elen. Et je pensais pareil. »

« Voilà pourquoi il ne faut pas vous laisser tous les deux ensemble ! Voilà pourquoi il faut absolument que tu meures, suppôt démoniaque ! Il faut absolument qu’elle soit libérée de ta manipulation ! Tu joues avec son coeur trop bon, comme celui de Zélisia ! »

« JE … SUIS … LIBRE D’AIMER QUI JE VEUX ! »

Qu’est-ce qu’ils avaient tous à vouloir gérer sa vie amoureuse ? Tery était un démon et alors ? Il était tout autant humain à ses yeux qu’un autre ! Et c’était lui et pas un autre qu’elle aimait justement ! Ce n’était pas des créatures millénaires, capables de tout ravager sur leurs passages, qui allaient lui donner des leçons d’amour !

« Elen, est-ce à cause de ça que tu es ainsi ? »

« Essaie de deviner, Tery ?! Ils continuent à me parler comme si je n’étais qu’une enfant ! Ils croient que je suis incapable de prendre mes décisions seule ! C’est vrai que je n’ai jamais eut de parents mais ce n’est pas une raison pour me prendre pour une idiote ! »

« Tu as eut des parents, jeune fille. Ils étaient exceptionnels et … »

« EXCEPTIONNELLEMENT ABSENTS ! »

Et elle ne voulait rien savoir à leur sujet ! Ils étaient maintenant trois sur l’aigle tricéphale, Manelena ayant réussi à les rejoindre. Trois personnes, cela semblait faire son poids, surtout que Manelena était en armure complète ou presque.

« Les démons t’ont corrompue, Elen. Ce monde est voué à sa perte si tu restes de leur côté. »

Vraiment ? Et qu’est-ce qu’elle devait y faire ? Les créatures légendaires continuaient de lui répéter cela mais pourquoi devait-elle les croire ? Pourquoi est-ce qu’elle devait imaginer un jour ne plus exister avec Tery ? Pourquoi devait-elle se plier à ces êtres dont elle ne connaissait rien et qui voulaient le séparer d’elle ?

« HORS DE QUESTION ! TERY ! MANELENA ! IL FAUT FRAPPER EN MÊME TEMPS ! » hurla t-elle une nouvelle fois alors que les deux autres personnes remarquaient que l’arc blanc se modifiait sur ses bords, devenant des pointes acérées.

« Elen, ne deviens pas aussi barbare ! La haine risque de perturber tes lignes d’Alzar. »

« TAIS-TOI TERY ! JE FAIS CA POUR NOUS DEUX ! ILS VEULENT ME SEPARER DE TOI ! JE NE ME LAISSERAIS PAS FAIRE ! HORS DE QUESTION ! » continua t-elle de crier alors que Tery et Manelena se regardaient, soucieux.

« Faisons comme elle le dit … mais Trozeral ne nous laissera pas faire. »

« SI ! Il sait qu’il doit mourir POUR MOI ! »

Elle parlait d’une voix si intimidante qu’il se demandait s’il s’agissait vraiment de la même personne. L’aigle tricéphale s’arrêta dans les airs, à quelques mètres au-dessus du sol, battant simplement des ailes pour planer.

« Si tel est votre choix … Elen. Nous nous plierons à votre décision. »

« Sachez simplement que vous commettez une effroyable erreur en cherchant à nous tuer. Nous ne serons jamais réellement mort, qu’importe la méthode utilisée. »

Qu’importe ! La femme aux cheveux blonds s’en fichait pas mal de ce qu’ils pensaient ! Comme s’ils avaient quelque chose d’intéressant à lui dire. Soulevant l’arc, elle regarda Tery et Manelena. La femme en armure noire tenait fermement son épée, celle-ci ayant repris une forme normale tandis que Tery avait fait apparaître une griffe des plus imposantes.

« En prenant cette voie, vous êtes voués à vous tourmenter pendant des siècles. Cet amour est contre-nature et n’aurait jamais dût voir le jour. »

« Vous regretterez amèrement ce que vous tentez de faire. »

« PIRE ! On sait ce a déjà été fait, croaaaaa ! Comment leur enfant et celui de ce démon peuvent-ils tous les deux s’aimer ? INCONCEVABLE ! »

Puis tout s’arrêta. Les trois armes se plantèrent dans les trois crânes en même temps. La créature légendaire ouvrit ses becs mais aucun croassement ne sortit de la troisième tête, les autres restant muettes elles aussi.
Le corps tomba au sol, les trois humains s’agrippant aux plumes pour ne passer par-dessus bord et percuter le marbre de façon bien moins plaisante. L’aigle tricéphale ne bougea plus, les yeux grands ouverts, Elen finissant par se relever la première, Tery et Manelena restant agrippés au cadavre de l’oiseau.

« Et voilà, finalement, c’est fait, bon débarras ! »

Encore une fois, le langage de la demoiselle aux cheveux blonds contrastait avec d’habitude. Son œil gauche devenu rouge, elle fixait le cadavre avant de donner un petit coup de pied dans la tête de corbeau, reprenant la parole :

« Tery ? Tery ? Dis moi comment est-ce que tu vas … Tu vas bien ? »

« Je ne sais pas si je suis capable de te répondre correctement, Elen. J’ai besoin de voir comment vont les autres. »

Il finit par quitter le cadavre de l’oiseau, se remettant debout en titubant. Il remarquait maintenant les nombreuses blessures d’Elen sur son corps, sûrement causée par les serres de l’aigle tricéphale. Celui-ci … s’était tout simplement rendu avant de mourir ?

« Pourquoi est-ce que le chef des créatures légendaires … s’est laissé faire ? »

« Qu’importe, Tery ! Qu’est-ce que ça fait ? Maintenant, tout est fini ! Où sont les autres ? J’espère pour eux qu’ils sont vivants ! Et il va falloir que l’on descende tous ensemble. »

« Elen, est-ce que l’on peut respirer un peu, s’il te plaît ? »

Il poussait un profond soupir avant de finir par s’asseoir. Mais pourtant, après quelques secondes, il se releva avant de commencer à vagabonder parmi les ruines. Voilà qu’il aidait les soldats encore vivants, ainsi que les membes de son groupe. Tous vivants … mais tout salement touchés par les différentes attaques de l’aigle tricéphale.

« Je n’ai pas eut impression que nous étions gagnants … »

« On va dire que la victoire est plutôt amère, Tery. Comment vont Manelena et Elen ? Elles ne semblaient pas aller en parfait état. »

« Manelena, ça peut aller, juste une blessure au crâne … rien de dramatique. Elen, elle en a de nombreuses mais rien de grave non plus. Elle a juste … son souci dès qu’elle utilise les lignes d’Alzar. Elle se laisse trop aller dans ses sentiments et elle devient … vraiment mauvaise. »

« Je pourrais tenter de l’aider, Tery, si tu le veux. Mais d’abord, il me faudra m’occuper de mon homme à moi même si normalement, les soins sont plus dans ses capacités. » répondit Sérest alors qu’il finissait de lui parler. Bien entendu, c’était normal.

« Prends le temps qu’il faudra. J’imagine que nous avons tout le nôtre maintenant. »

« C’est exact … Par contre, Tery, une dernière chose. Pour descendre, il va falloir que l’on passe à des étages où nous n’avons pas été … et Krawnia ne les connaît pas non plus. »

« On verra ça en temps et en heure. Je m’occuperai des êtres qui irons nous barrer le chemin. Néanmoins, je pense qu’ils vont nous laisser tranquilles normalement. »

« Si seulement, Tery. Si seulement … »

Pour la première fois, il avait l’impression de voir le véritable de Sérest. C’est vrai qu’elle avait déjà plus de trente ans d’après ce qu’il remarquait mais elle semblait si vieille … et si fatiguée surtout en ce moment même. Il hocha la tête avant de dire :

« Je vous le promets, madame Sérest. Je pense que tout le monde a besoin de repos. Peut-être devrions-nous rester ici pendant une heure et ensuite, nous descendrons. »

« Ca sera pour le mieux. Merci de ta considération. »


Sa considération consistait tout simplement à ne pas réagir de manière trop absurde. Il calma Elen, lui disant qu’ils allaient faire une pause. Ils avaient terminé avec les créatures légendaires. Aucun de ces êtres n’était encore vivant dorénavant. Tout était fini … et pourtant, les fameuses portes ne s’étaient pas ouvertes. Comme quoi, il n’y avait pas eut à s’inquiéter plus que cela. S’effrayer pour pas grand-chose, n’est-ce pas ?

Chapitre 104 : L’isolement d’un peuple

ShiroiRyu
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Chapitre 104 : L’isolement d’un peuple

« JE VAIS TOUS LES BOUFFER ! YARK ! »

« Co… Comment est-ce qu’une créature légendaire peut être démoniaque ? Comment c’est possible ? » balbutia Tery, sous le choc, déglutissant en voyant son adversaire.

« Combattre le feu par le feu. Si quelqu’un arrive à abattre les quatre autres créatures légendaires, il y a de fortes chances qu’il possède du sang de démon en lui. A partir de là, il faut un adversaire qui comprenne ce qu’est un démon, ses forces, ses faiblesses, tout en étant apte à le combattre. Visiblement, Trozéral est cet adversaire. »

Et il était où le point qui se voulait rassurant hein ? Car si cet aigle avait une essence démoniaque en lui, cela voulait dire autre chose. Autre chose de beaucoup plus inquiétant maintenant. Il en était convaincu … lorsqu’il remarqua les flammes sortir d’une tête, de la glace d’une seconde et un souffle électrique de la troisième surexcitée.

« Il maîtrise tous les éléments ! Comme les porteurs des lignes et les démons ! »

Et il était trop tard pour parler de mettre à l’abri. D’autres cris fusèrent, ceux de nombreux soldats réduits en cendres ou empalés par des pieux de glace. Un bref regard avait suffit à comprendre la situation … et à voir alors qu’ils venaient de perdre la moitié de leurs hommes, et cela en une seule attaque.

« Merde ! Ce n’était pas prévu qu’il soit capable de faire ça ! »

Manelena en venait aux insultes mais en vue de la situation, c’était tout ce qu’il y avait de plus logique. Nul ne s’était attendu à ça et vu que la moitié des deux troupes de soldats qui les accompagnaient venait de disparaître, il n’y avait pas de quoi fanfaronner, loin de là.
Dire que quelques minutes auparavant, ils dominaient l’aigle bicéphale grâce à leurs tactiques et maintenant, c’était complètement l’inverse. Il avait fallut qu’une troisième tête ne pousse pour que tout dégénère.

« Comment est-ce que nous en sommes arrivés là ? »

« JAMAIS ! JAMAIS ! ON VOUS LAISSERA JAMAIS ! »

« Ah … Sans mentir, il ne m’avait pas vraiment manqué, tu sais ? »

« Je confirme et appui tes propos. Il est toujours aussi zélé. Je crois que c’est lui qui a déteint sur nos autres compagnons qui sont morts. »

« Morts. Tout n’est qu’une question de perspective dans ce cas précis mais il faut reconnaître que ce n’est guère une bonne chose. »

Les deux têtes discutaient entre elles tandis que celle ressemblant à un corbeau continuait de criait, contrôlant le reste du corps. On aurait put croire à une discussion de comptoir dans une taverne entre deux personnes éloignées qui se parlaient, la troisième complètement ivre en train d’éructer des propos paillards et d’une qualité plus que douteuse.

« Impossible de se concentre correctement, ils n’arrêtent pas de parler ! »

Voilà que Tery faisait une légère complaine, à raison, en voyant que l’aigle tricéphale était du genre très bavard … mais surtout ignorait superbement les survivants de leur première attaque. Ils devaient réagir et se battre ! Mais comment ? Comment est-ce qu’ils pouvaient faire pour réussir à dominer ce dernier adversaire ? Il regarda Elen, celle-ci ayant ses yeux habituels. Pfiou … Tant mieux en un sens.

« Tu as une idée, Elen ? Car là, je ne sais pas comment faire … »

« Les autres ne se contrôlaient pas … et leur faiblesse élémentaire était apparente. Ici, il n’y a rien qui montre ne serait-ce qu’un point faible chez lui. »

« Donc retour à la situation de départ, on ne sait pas quoi faire … »

« Arrêtez de trop réfléchir, Tery, Elen ! On va faire comme d’habitude ! On s’en sort toujours de cette manière ! N’hésitez pas à lui exploser la figure, voilà tout ! »

Au moins, Manelena mettait les points sur les i à défaut que ça soit dans les becs de Trozéral. Mais elle avait totalement raison : ils avaient réussi à vaincre les précédentes créatures légendaires en évitant la réflexion trop intense. Maintenant que la surprise était passée, il valait mieux se concentrer sur comment abattre ce monste.

« C’est donc comme ça que vous réglez vos problèmes ? » demanda une voix féminine, Krawnia flottant au-dessus de Tery, battant de ses ailes.

« Généralement, ça marche dans la majeure partie des cas. Parfois, ce n’est pas ainsi donc on fait avec … mais voilà, oui, pourquoi ? »

« Oh, tout simplement pour savoir. Car je ne suis pas sûre que ça soit très efficace ici. »

Réellement ? Ce n’était pas comme s’il avait put le remarquer par lui-même hein ? Mais bon, il n’allait pas ui répondre cela. Il ne fit qu’un petit sourire avant de se reconcentrer sur leur adversaire. Trois têtes capables de produire tous les éléments existants dans ce monde … sauf ceux de Zélisia. D’ailleurs, peut-être que Séran et Elen étaient doués avec ça ?

« ELEN ! SERAN ! Vu que c’est un démon, montrez-lui ce que vous savez faire grâce à vos lignes de Zélisia ! Je suis sûr que c’est son point faible ! »

« On va essayer alors … mais je ne crois pas qu’il me laissera l’approcher. » déclara Séran avec lenteur, serrant fortement son arme en main.

« Je vais essayer de te faire gagner du temps pour que tu puisses le frapper directement, Séran. Je ne te promets rien par contre. »

« Ca sera déjà beaucoup mieux que de rien faire. »

Et eux alors ? Ils allaient aussi épauler Elen ! Il y avait bien un moyen de stopper l’oiseau tricéphale mais … normalement non … Une fois mais pas deux pour la paralysie.

Hum … Réfléxion, réfléxion, réfléxion … sauf que Trozeral n’allait pas les laisser faire. Encore une fois, la troisième tête, celle du corbeau, poussa un piaillement zélé avant que son corps ne soit parcouru par des lignes noires, parfaitement visibles sous le plumage, à même la peau. Une nouvelle bourrasque se souleva, des pans entiers du sol se soulevant en même temps, repoussant tout le monde.
La différence résida dans la résistance des murs que Tery et les autres avaient crées. Ils se brisèrent avec une certaine aisance, quelques soldats se retrouvant ensevelis sous les gravats pour les plus chanceux. Pour les moins chanceux, malheureusement, soit un second mur brisa leurs corps ou dans le pire des cas, ils tombèrent par-dessus bord. Ce fut ce qui se passa pour trois soldats issus de Traslord. Quant au groupe de Tery, il avait positionné son golem devant eux mais même ainsi, le colosse de pierre reculait inlassablement. Et Krawnia s’était écroulé sur lui à cause de la tempête.

« Oh … merci mon démon. C’est moi ou alors, tu es heureux de me voir ? »

« Krawnia, tes ailes me dérangent ! Elles me gênent la vue ! On doit empêcher Trozeral de continuer à produire ce vent sinon, on est tous bons pour faire le grand plongeon ! »

« Roh, d’accord, d’accord, j’imagine que tu gardes le plaisir de me voir pour quand tout cela sera terminé, n’est-ce pas ? Bon bon bon … »

Elle semblait que moyennement déçue de ne pas rester et elle se déplaça juste au moment où une flèche auréolée d’une aura blanche passa à côté d’elle puis du golem. PROCHE ! TRES PROCHE CETTE FLECHE ! Pourtant, elle garda son calme, tournant son visage vers l’unique personne qui pouvait être responsable de cela : Elen.

« Attention, vous auriez put me blesser, mademoiselle. »

« Oui, ça aurait été un malheureux accident, très malheureux et regrettable, oui. »

Hum … Il y avait de la tension dans l’air ou alors, c’était lui ? Néanmoins, il préféra ne pas trop se mêler de ça. Il ne voulait pas d’ennui avec Elen. C’était surtout qu’il tenait à la vie et que ce n’était pas le bon moment de la provoquer.

Et la flèche dans tout ça ? L’aigle la balaya d’un mouvement de l’ail, ses trois têtes se tournant vers Elen qui était en retrait. La tête de corbeau piailla :

« QUOI ?! Pourquoi est-ce qu’elle nous combat elle ? ELLE A RIEN COMPRIS ! »

« Non, c’est justement ça le problème. Elle a tout compris … mais non pas comme nous. »

« Si tu lui dis ça comme ça, il risque de pas comprendre. Bref, elle est du côté des démons. Il semblerait que ça ne soit même pas une manipulation. »

« COMMENT ?! COMMENT CA SE FAIT ?! »

C’était le moment d’en profiter ! Les trois têtes parlaient entre elles, ce n’était pas la première fois et ils pouvaient profiter de cette discussion pour prendre le dessus !

Mais comment faire ? Elen et Séran étaient-ils vraiment les seuls capables de blesser l’aigle bicéphale ? Le feu par le feu. Il pouvait lui aussi s’en mêler non ? Et pareil pour Elise ! Si un démon pouvait attaquer un autre démon aisément, ils pouvaient alors aider !

Et le reste dans tout ça ? Comment est-ce qu’ils allaient les épauler ? Manelena n’allait sûrement pas se tourner les pouces, Royan non plus. Quant à Krawnia et Sérest, il ne fallait pas espérer qu’elles n’allaient pas réagir. HEY ! Peut-être qu’elles pouvaient distraire l’aigle tricéphale en volant autour de lui ?

« VOUS ! RECULEZ ! Ne vous mêlez plus de ce combat ! »

Oui, les soldats ne devaient plus combattre ! Cette fois-ci, l’adversaire était vraiment trop fort et il y avait déjà eut trop de morts à ses yeux. Les soldats hochèrent la tête, comprenant la situation et sachant pertinemment que cela serait juste de la folie. Voilà qu’ils retournaient à leur combat habituel … avec juste une personne pour remplacer Clari. Clari …
Pendant un instant, il crut entendre sa voix mais il avait sûrement halluciné. Et surtout, il devait éviter de perdre le contrôle de son corps maintenant. Il ne voulait pas créer un cataclysme majeur en agissant trop rapidement.

« Ah … Ah … Pfiou … Bon, ça, c’est fait. Il n’y a donc plus à s’occuper d’eux. Ils iront se mette en sécurité. Quant à toi, tu peux me prendre ? »

Il s’était adressé au golem, celui-ci venant s’agenouiller avant de placer l’un de ses écus au sol pour que Tery grimpe dessus avant d’être ramené à la hauteur des trois têtes de l’aigle. Celles-ci se positionnèrent en face de lui, la tête de corbeau s’égosillant :

« LUI ! C’EST LUI ! C’EST SON ENFANT ! JE LE RESSENS ! »

« C’est exact, c’est son fils. C’est peut-être pour cela qu’il a réussi à survivre jusqu’ici. »

« Ou alors, ils ont très mal fait leur travail. Pourtant, nous n’avons jamais eut à nous plaindre auparavant. La situation est très voire trop étrange. »

« LA FERME ! ILS NE RESTENT QUE DES ÊTRES INCAPABLES ! JE DORMAIS TRANQUILLEMENT PENDANT DES SIECLES ! »

« Et si tu bouclais ton bec, le piaf ? Tu ne crois pas ? Je me demande comment ils te supportent tous les deux. Ce n’est pas trop difficile ? »

« Des fois, on aimerait s’endormir une nouvelle fois pour ne plus entendre. »

« Je confirme cela … c’est vraiment très fatiguant à la longue. C’est même pour cela que malgré le symbole qui nous présente à trois têtes, on préfère que les personnes nous imaginent qu’avc deux. Au moins, on est tranquille. »

« NON MAIS VOUS ALLEZ LA BOUCLER VOUS DEUX ?! VOUS PARLEZ AVEC L’ENNEMI, CROOOOOOOA ! » continua de s’exclamer la tête de corbeau, Tery clignant des yeux. Il devait vraiment faire du zèle pour aller jusqu’à pousser son croassement.

Mais au moins, la conversation permettait de gagner un temps précieux … et il voyait sans même bouger la tête que chacun et chacune prenait place autour de l’aigle tricéphale. Maintenant, il était impossible pour lui de s’enfuir par la voie terrestre. Malheureusement, il n’y avait pas que ça. Il était capable de voler … mais Krawnia et Sérest étaient elles aussi en position. Le tout était de savoir comment déferler leurs pouvoirs sur l’aigle.

« Sinon, vous pourriez m’expliquer tous les deux pourquoi on déteste autant les démons ? Je sais bien que je suis du genre à parfois perdre la raison mais les humains aussi réagissent de la sorte. Il ne faut pas oublier que les porteurs des lignes d’Alzar peuvent être souvent très maléfiques eux aussi, non ? »

« Cela remonte à des temps immémoriaux. Ta race est la création unique d’Alzar, surpassant les autres façonnées par Zélisia sur de nombreux points. »

« Néanmoins, il a rajouté une capacité qui a causé l’horreur chez les autres races alors que parmi vous, vous trouviez cela comme un symbole de puissance. D’ailleurs, d’après ce que je crois remarqué, tu n’as pas utilisé cette capacité. Ni l’autre démone. »

« Comment est-ce que vous pouvez le savoir ? Et je ne sais même pas de quoi vous parlez. »

« MAIS TU VAS ARRÊTER DE LUI REPONDRE ?! TU VEUX LE RENFORCER OU QUOI ?! ON EN PROFITE CROA ET … »

« MAIS IL ME SAOÛLE ! » hurla une voix aussi forte que celle de la tête de corbeau.

Voilà que Manelena se mettait aussi à crier. Comme si ce n’était pas suffisant d’entendre une voix, une seconde se mêlait à la bataille. Un fouet électrique de grande taille s’enroula autour du bec de la tête du corbeau, fermant son clapet à ce dernier. Manelena tenait fermement l’arme dans sa main, Tery remarquant qu’il s’agissait de la même épée que d’habitude … mais avec une fonction qu’il ne lui connaissait pas.

« Ca soulage quand il la bouche ! Je ne sais pas combien de temps je vais tenir alors essayez de vous débrouiller pour lui infliger un maximum de blessures et AAAAAAAAH ! »

Elle ne termina pas sa phrase que son corps s’envola en direction de l’aigle tricéphale, la tête de corbeau ayant tiré un coup ferme en arrière pour qu’elle le lâche. Aussitôt, Tery ordonna à son golem de l’attraper mais il avait oublié qu’il n’avait pas de main et le bouclier vint frapper tout simplement la tête de corbeau, le fouet autour du bec se détachant.

« VITE ! Emmènes-moi à sa hauteur ! »

Le golem exécuta une seconde fois l’ordre de son créateur, le jeune homme sur l’écu droit se retrouvant au-dessous de Manelena, tendant les mains pour la réceptionner. OUCH ! Avec l’armure noire sur son corps, elle était pas des plus légères et il abusa de ses pouvoirs terrestres pour ne pas flancher.

« Mademoiselle la reine Manelena. »

« Messire le chevalier Tery Vanian. Vous voulez bien me déposer ? »

Aucun souci. Néanmoins, il patienta pendant quelques secondes. Ils étaient non-visibles par rapport aux autres avec cette position. Ils se regardèrent quelques secondes et même s’il ne voyait pas le visage de Manelena à cause de son casque …

« Voilà les désirs de la reine qui sont accomplis. Néanmoins, je préfère que vous restiez avec moi. Dans cette position, il sera plus aisé pour agir. »

Hum, il marquait un point. Elle se plaça à côté de lui, tenant fermement son épée-fouet dans sa main droite avant de le claquer dans le vide. Mais la tête de corbeau allait recommencer à crier à tout va et elle voulait éviter ça.

« Zélisia et Alzar ont regretté fermement leurs erreurs. Ils pensaient que c’était la meilleure décision à prendre, qu’en vue de ce qui s’était passé, il fallait enfermer la race des démons à tout jamais, espérant alors qu’ils ne ressortiraient pas … ou alors changés. C’est pour cela qu’en de rares instants, à des moments infimes sur l’échelle de ce monde, il est possible pour quelques rares démons de sortir … mais aussi leurs enfants, même s’ils ne sont pas encore nés. Mais … est-ce une bonne chose ? »

« Tout cela à cause d’une seule et unique personne. Un seul être qui a été responsable du déclin de cette race. Tout cela parce qu’il a abusé de ce pouvoir qu’Alzar avait laissé à la race des démons. Sais-tu qu’Alzar et Zélisia n’existent plus ? Sauf à travers leurs lignes et leur en… Non, visiblement, vous n’êtes pas au courant. »

« MAIS VOUS ALLEZ … RAAAAAAAAAH ! TOI JE M’OCCUPE DE TOI AVANT ! »

Voilà que la troisième tête de Trozéral élevait une nouvelle fois la voix. Bien entendu, elle avait coupé la parole aux autres, pour ne pas changer. Tery ne chercha même pas à comprendre, comme à son habitude et jeta un œil à Krawnia et Sérest. ZU… ZUT ! Les deux là ! Elles avaient vu quand il avait réceptionné Manelena !

« Bon bon bon … Ce n’est pas tout ça mais si on ne fait rien, on ne peut pas compter sur le fait qu’il tente de se suicider, hein ? Ça ne marche pas comme ça. »

« Si c’était aussi simple, ça se saurait. Néanmoins … Ils vont bien fini par sortir le grand jeu et à ce moment-là, je ne suis pas sûre que nous en ressortirons indemnes. »

Sérest qui n’était guère rassurante, cela changeait par rapport à d’habitude. Il faut dire que son visage des plus sérieux mettait déjà assez mal à l’aise. Le jeune homme aux cheveux bruns avait put entendre la conversation entre les deux femmes et il en était de même pour Manelena mais peut-être que les autres, ce n’était pas le cas.

« JE VAIS VOUS TRANCHER EN RONDELLES ! VOUS ALLEZ VOIR COMMENT CA VA SE PASSER ! VOUS ALLEZ COMPRENDRE VOTRE DOULEUR ! »

« He… Hey ! N’utilises pas notre corps si nous ne sommes pas tous d’accord sur la tactique ! »

« Oui, c’est exact ! Tu te réveilles une fois de temps en temps et tu veux nous ordonner ? »

« C’EST EXACT ! CAR VOUS NE SAVEZ PAS VOUS DEBROUILLER SANS MOI ! »

Voilà que les trois têtes se disputaient à nouveau. Si elles se mettaient d’accord sur une même chose, il y avait de fortes chances qu’ils perdent ce combat. Mais tant qu’ils continuaient de se disputer entre elles, ils avaient un avantage certain.

Le jeune homme amorça un mouvement, ordonnant à son golem de s’approcher de l’aigle mais dès l’instant où il fit un mouvement, l’aile droite de l’oiseau géant se déplaça à toute allure, créant une lame de vent qui vint trancher un bras du golem. Heureusement pour Tery et Manelena, il ne s’agissait pas de celui où se tenait l’écu qui les portait mais … cette puissance ? Pourtant, ses golems étaient résistants !

« Ca a coupé aussi facilement que dans du beurre … c’est quoi ces lames ? »

« Le plus important est que tu n’as pas à te préoccuper ce qu’elles sont mais ce qu’elles font, Tery. Tu sais maintenant qu’il faut absolument les éviter sinon, il y a de fortes chances que l’on finisse dans un état encore pire que ton golem. »

C’était un conseil à accepter et à prendre. Il s’apprêtait à lui répondre mais une pluie de flèches blanches tomba des cieux, sans prévenir alors qu’en même temps, deux imposantes mains blanches sortirent du sol, couvertes par des flammes. Elles agrippèrent les serres de l’aigle, celui-ci ne pouvant pas réagir.

« TERY ! IL FAUT EN PROFITER ! Prépares une lance de pierre ! »

Préparer une lance de pierre ? Mais pour faire quoi ? Elle désigna les yeux des trois têtes alors qu’elle-même préparait une lance bien que moins impressionnante que Tery. Malgré les lignes d’Alzar, chacun avait ses points forts et points faibles. Tenter de produire de l’électricité de son côté, ça serait tout simplement risible.

« Tu as remarqué à quel point nous sommes opposés dans nos éléments, Manelena ? »

« Idiot. Tant de choses nous opposent mais n’oublient pas que les lignes d’Alzar nous rapprochent. Nous avons autant de points communs que de différences, toi et moi. Par contre, quand nous en aurons fini avec cet aigle, il faudra que nous discutions tous les deux, vu qu’il n’y aura plus rien à faire ensuite. »

Hein ? Discuter ? Elle et lui ? Mais à quel sujet ? Ils avaient des choses à se dire ?  Mais bon, elle serrait fermement son arme et son poing gauche était fermé. Est-ce qu’elle … tremblait un peu ? Non, elle n’était pas ainsi. Manlenena était la femme la plus forte qu’il connaissait en terme de mental. Impossible de l’ébranler ou presque.

« T’en fais pas, va, Manelena. On va s’en sortir hein ? »

« Hum ? Je ne suis pas inquiète à ce sujet. Nous allons survivre, c’est évident. »

Il posa sa main sur l’épaule de la femme en armure noire. Même si ce ne fût qu’un instant, il entendit un petit soupir de sa part. Elle était rassurée, n’est-ce pas ? Même si elle ne voulait pas se l’avouer. Ils n’étaient pas encore blessés mais cela ne saurait tarder. L’aigle tricéphale allait bien finir par faire entendre raison à ses trois têtes. Mais pour l’instant, les deux lances de pierre quittèrent les mains de Tery et Manelena, partant vers leur adversaire.