Chapitre 19 : Perdre le goût

ShiroiRyu
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Chapitre 19 : Perdre le goût

« Par où est-ce que je dois aller ? Enfin plutôt commencer. Ah … Faldéla n’est pas mon véritable nom mais … cela importe peu. J’étais … l’une … enfin … une chanteuse dont le producteur était nul autre que Solomon. »

« Ca explique pourquoi est-ce que tu sembles si mal … quand tu le vois. »

« C’est exact mais ce n’est encore que le début. La vérité est bien pire, Hémaltone. Mais bon, commençons par le commencement. Depuis mon plus jeune âge, j’avais une voix merveilleuse. Je ne cherche pas à me vanter et … »

« Bien entendu, ce n’est pas ton caractère, Faldéla. Tu n’es pas du genre à te vanter, je ne vois pas pourquoi tu mentirais que maintenant, enfin … maintenant … »

« Je peux continuer à parler, Hémaltone ? Que je puisse m’expliquer envers toi ? » dit la femme aux cheveux bleus avec un léger sourire aux lèvres.

« Oui, pardon, je suis vraiment désolé. »

« Ce n’est pas bien grave, va … Je te pardonne. »

Elle a un petit rire amusé en voyant la gêne d’Hémaltone puis se remet bien, allant boire son café. Où en était-elle alors ? Ah oui … Autant qu’il ne vienne plus la couper maintenant car cela risquait d’être long, vraiment très long même mais bon …

« Dès dix ans, ma voix a intéressé Solomon et j’ai décidé de l’accompagner, malgré les interdictions de mes parents. Tu imagines ? A mon âge, je pouvais faire de la chanson, c’était vraiment comme un rêve. »

« Je vois, je vois … Enfin, un peu comme moi maintenant … mais ensuite ? »

« Ensuite ? Disons que ça allait toujours très bien, j’avais une voix qui atteignait le cœur des hommes et des femmes qui m’écoutaient. Mais bon … Quotidiennement, mes parents refusaient que je continue cela. »

« Mais pourquoi ça ? Je n’arrive pas à comprendre pourquoi. Ils devraient être heureux non ? Que tu sois célèbre et riche … enfin, heureux pour toi. »

« Car je n’étais encore qu’une enfant, que mes rêves n’étaient pas forcément la réalité. Puis tu sais, étant si jeune, c’était compliqué. Je n’avais aucune éducation. »

« Oui mais … Enfin, je comprends. Ce n’était peut-être pas la bonne vie pour une jeune fille comme toi à l’époque mais après ? »

« Après ? J’ai continué pendant des années … Je devais avoir quoi environ ? Quinze ans ? Je ne suis pas sûre, c’est compliqué. Mais qu’importe, ça n’a pas changé ce que je voulais te dire à ce sujet. Malgré les années, mes parents continuaient encore et toujours de presser Solomon pour qu’il stoppe mes progrès dans la chanson. Mais même ainsi, il était difficile … vraiment très difficile … surtout que j’étais de plus en plus célèbre et connue. »

« Et ensuite ? Et ensuite, qu’est-ce qui s’est passé ? »

« Mes parents sont morts dans un accident de voiture. Un banal accident de voiture alors qu’ils rentraient chez eux une nouvelle fois, désemparés de voir que je ne voulais pas abandonner mon rêve à ce sujet. »

« Mais mais mais … et après ? Et après ? »

« Après ? Malgré la douleur, Solomon a voulu que je continue de chanter et de danser, par respect pour le souvenir de mes parents. »

« Ce n’est pas vraiment ce à quoi je m’attendais … enfin, je veux dire, ça ne semble pas être logique. Tes parents ne voulaient pas que tu chantes donc continuer à chanter, c’est plutôt leur manquer de respect, non ? Qu’est-ce que tu en dis ? »

Elle ne fit qu’un simplement hochement de tête positif en sa direction avant de sourire. C’est exactement ça. Il met le doigt où cela fait mal même s’il ne s’en rend compte qu’à moitié, elle en est sûre et certaine. Elle chuchote :

« C’est ça. Si je voulais respecter leur décision, je devais quitter la chanson. C’est ce que j’ai fait. Tu comprends, Hémaltone ? Non, tu ne peux pas, je suis désolée. Tu n’as jamais eu de parents en fin de compte. Mais bref … Imagine que tu perds les êtres qui sont les plus proches de toi … qu’ils meurent tragiquement alors que tu n’as jamais voulu les écouter. »

« Je … je m’imagine, Faldéla. Enfin, je tente de m’imaginer. »

« Merci bien. Bref, comment te dire … A partir de là, j’ai perdu goût à la chanson et à la musique. J’ai vécu une vie normale et j’ai préféré tout oublier et … »

« Ce n’est pas vrai ! Tu mens parfaitement, Faldéla. Tu aimes toujours la musique. La preuve est que tu as un magasin d’instruments de musique. »

« Tu marques un point, Hémaltone, tu marques un point, c’est vrai ce que tu dis. »

Elle rigole légèrement, terminant son café alors qu’Hémaltone a à peine touché au sien. C’est terminé dans le fond ? Ou presque ? Non … Il ne sait pas vraiment. Et maintenant ? Qu’est-ce qu’il doit penser ? Il doit faire quoi ?

« Faldéla, est-ce que tu pourrais tenter de chanter, s’il te plaît ? »

« Je ne pense pas en être capable, je suis désolée, Hémaltone. Je comprends ce que tu veux faire mais non … ce n’est plus possible. »

« Essaye juste … au moins une fois. »

Elle pousse un petit soupir et ferme les yeux. Une main posée sur le cœur, elle ouvrit la bouche, un chant commençant à en sortir … puis elle s’arrête subitement au bout de quelques secondes, confuse et gênée. Elle bafouille avec lenteur :

« Je suis vraiment désolée mais c’est juste … impossible pour moi, vraiment. »

« Ça ne fait rien, tu as donné ton maximum. » dit l’adolescent. Il avait commencé à la tutoyer après leurs derniers échanges de paroles.

Même s’il est un peu déçu, difficile d’en vouloir à la jeune femme. Il a demandé quelque chose de vraiment … compliqué. Il le sait bien. Il devrait chercher le moyen de lui redonner du courage, la force de recommencer à chanter.

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