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- Chapitre 58 : Maréchal - 16 juin 2021
Chapitre 231 : Trahison
« Sélia, je ne suis plus un enfant. Arrête donc de vouloir me materner. »
« Je sais bien que tu n’es pas un enfant … Loin de là même. »
Alors pourquoi est-ce qu’elle continuait à vouloir lui donner à manger ? Hein ? S’il n’était pas un enfant, ce n’était donc pas ça qu’elle devait faire mais tout le contraire ! Il poussa un léger soupir avant de commencer à manger par lui-même.
« Hmm … Un peu dure la viande aujourd’hui. »
Cela faisait maintenant quelques jours qu’il vivait dans l’auberge. Où est-ce que Sélia trouvait l’argent ? Il avait un peu peur de savoir mais il devait savoir … cela justement. Il murmura avec lenteur :
« Sélia … Cet argent pour payer l’auberge … Tu n’as pas tué quelqu’un hein ? »
« Comment est-ce que tu oses insinuer ça, Kéran ? Ca me fait vraiment mal, là ! Cet argent est celui que j’ai économisé durant tous ces mois. »
« D’accord … Pardon, je m’excuse sincèrement. C’est juste que je préfère être méfiant. C’est tout … Une simple mesure de sécurité, voilà tout. »
« Tu as raison de l’être même si c’est vraiment offensant de penser de la sorte en ce qui me concerne. Je le prendrais très mal, tu sais ? C’est vexant … très vexant même. »
« Pardon … Qu’est-ce que je peux faire pour me faire pardonner ? »
« Tu peux m’embrasser non ? Ça serait une très bonne façon de te faire pardonner à mes yeux. Qu’est-ce que tu en dis ? » demanda-t-elle tout en tendant ses lèvres vers lui.
« Autre chose … qui n’a rien en rapport avec ça. Ou alors, tu me pardonnes sans rien me demander, qu’est-ce que tu en penses ? »
« Bon … C’est bien parce que tu es mon petit Kéran que j’accepte ça. »
« Merci beaucoup, Sélia. Ca me fait plaisir. »
Pendant qu’il terminait de manger, il réfléchissait à Elyséa. Enfin, il avait fait la paix avec elle, c’était vraiment important pour lui. Mais en même temps, il s’inquiétait pour Katérina. La raison était simple : son père … Ce fichu Noctunoir. S’il lui mettait la main dessus, qu’est-ce que cela allait donner hein ?
« Je ne sais pas vraiment … mais pas forcément quelque chose de plaisant. »
« Hodan est avec elle … Il la protègera. » murmura calmement Elyséa en lui, lisant dans ses pensées. Il marmonna quelques mots :
« C’est vrai … Il y a Hodan, le magnifique et grand Hodan … Mais en même temps, je lui fais confiance. Il est très fort puisqu’il était un dragon auparavant. Enfin, proche d’eux. »
« Tu ne sembles pas si jaloux que ça … Enfin, tes premières paroles l’étaient mais plus maintenant. Comment est-ce que ça se fait, Kéran ? »
« Je ne sais pas … Je ne dis pas que ça ne m’embête pas qu’un homme tourne autour de Katérina mais à côté, je suis avec Sélia et puis, il y a toi aussi. Hodan a surement vu nue Katérina comme toi tu m’as vu. »
« C’est étrange de ta part, je dois l’avouer mais … Tant mieux. »
« Tant mieux ? Là, c’est toi qui es étrange. Pourquoi est-ce que tu penses que c’est une bonne chose ? Je devrais plutôt être jaloux. »
« Non, tu ne devrais pas. Je ne te dis pas d’être candide mais rappelle-toi ce qu’est devenue Katérina à cause de la jalousie. Voilà … Tu sais ce que j’en pense exactement non ? »
« Je le sais parfaitement … Je ne deviendrai jamais comme ça, Elyséa. »
« Quand même … Hodan est un beau parti. Quand je me dis qu’il était de mon époque mais qu’il n’a pas changé depuis tout ce temps … Vraiment. » soupira la femme aux cheveux blancs en lui alors qu’il se redressait aussitôt sur sa chaise.
« Sélia, je … J’ai une envie … Enfin, désolé. »
Elle lui signala de ne pas avoir besoin de s’excuser alors qu’il se dirigeait aussitôt vers l’étage, pénétrant dans la chambre. Qu’est-ce que ça voulait dire ? Cette boule dans l’estomac à l’instant ?
« Tu es libre d’apprécier qui tu veux, Elyséa. Juste que … Je ne te vois pas avec lui. Il ne te conviendrait pas. »
Hein ? Qu’est-ce qu’il venait de dire là ? Il n’avait … pas osé déclarer ça quand même ? Quand même pas non ! Assis sur le lit, il vient se tenir la tête entre les mains, bredouillant quelques mots à voix haute :
« Pardon, Elyséa. Je t’ai demandé de ne pas te mêler de mes sentiments mais … Je ne devrai pas me mêler des tiens. Je m’excuse. »
« Ca ne fait rien mais est-ce que tu peux m’expliquer pourquoi tu penses cela ? Pourquoi tu estimes qu’Hodan n’est pas fait pour moi ? »
« Sans qu’il soit prétentieux … Il y a tellement de noblesse en lui, tellement de valeur … Comment dire … Toi, tu es une femme discrète, je suis sûr que tu n’as jamais voulu être devant la scène … contrairement à Hodan, Katérina ou Sélia même. Tu es quelqu’un de discret mais qui tient aux autres. Hodan n’est pas fait pour toi-même si on dit que les opposés s’attirent. Ce n’est pas dans ton caractère et vous n’iriez pas ensemble. «
« Hmm … Je crois que … »
« Attends, je n’ai pas terminé, loin de là. Vous êtes aussi très différents, vraiment différents dans ce que vous avez vécu. Alors que toi, tu as dû te débrouiller seule, lui a vécu avec sa sœur et des dragons. Bien entendu, tu n’étais pas vraiment « seule » mais à côté, il n’y avait pas que ça, loin de là même … Tu n’avais aucune famille alors que pour lui, il y avait tout autour de lui qui était sa famille. Vous n’avez pas les mêmes vécus, pas les mêmes origines, pas les mêmes histoires, pas les mêmes caractères. »
« Tu sembles un peu te répéter, Kéran. Je pense que … »
« A côté, Hodan, bien que cela fut comme une erreur, a quand même fait souffrir Katérina pendant des années. Contrairement à toi, il s’est bel et bien montré en elle depuis le départ alors que toi, tu es restée discrète pour me protéger du monde extérieur. Même quand tu t’es découverte, tu as pourtant tout fait pour ne pas te mettre en valeur. Tu aurais pu me dire directement que tu me possédais, que tu avais le contrôle de mon corps. Tu aurais pu me faire peur comme Hodan l’a fait avec Katérina pendant des années. Mais non … Rien de tout ça. Si je n’avais pas été blessé mortellement, peut-être que je ne l’aurai jamais su … que tu étais là. Que tu étais en moi … Tu es vraiment une personne très timide, Elyséa. Tu es timide et discrète mais tu as le cœur sur la main et tu es plus que généreuse. »
« Je crois que c’est bon, Kéran, tu en as assez fait. Tu peux arr… »
« Et ça, je ne permettrai jamais à quelqu’un d’autre de prétendre le contraire. Je ne permettrai jamais à une personne, qu’elle soit proche ou non, de t’insulter de la sorte. Surtout en disant de telles âneries à ton sujet. Que ça soit bien clair, Elyséa. Je vais le dire puisque je suis sûr que personne ne te l’a dit : tu es une femme exceptionnelle. Une femme que l’on ne risque pas de rencontrer, même une fois par millénaire. Tu n’es pas une personne charismatique, tu n’es pas une personne que l’on devrait prendre en exemple, tu es juste Elyséa, une femme que j’admire et respecte plus que tout. Que cela déplaise à Katérina que je te complimente, c’est bien le dernier de mes soucis. Je … »
Sa bouche fut subitement scellée alors qu’il s’immobilisait. Qu’est- ce que … Cette douceur … Cette chaleur … C’était qui il pensait ? Il avait fermé les yeux mais maintenant, il ne pouvait que les ouvrir car il n’y avait pas d’autres solutions. Lorsqu’il ouvrit les yeux, il remarqua … cela.
Les deux mains féminines posées sur ses lèvres. Les deux mains qui quittaient finalement celles-ci avec lenteur. Puis elles descendirent jusqu’à sa poitrine, les doigts se croisant avant qu’il ne sente maintenant un corps qui se colle contre son dos. Elyséa ? Mais … Elle ne portait pas son armure, il en était certain.
« Ne bouge pas de là … Ne te retourne pas. C’est suffisant. … Kéran … Merci pour tout. »
« Ne parle pas comme si tu allais disparaître non plus hein ? Tu le sais ? »
« Je ne disparaîtrai pas … tant que tu ne le désires pas. »
« Ne disparait jamais, c’est tout ce que je te demande. Tu es une partie de moi. » murmura le jeune homme aux cheveux gris avant de poser ses mains sur celles d’Elyséa. Il vient lier ses doigts avec les siens mais cela ne dure qu’un instant.
« KERAN ! Qu’est-ce que tu fais ?! Je t’attends depuis déjà dix bonnes minutes ! »
La porte s’est ouverte pour laisser paraître Sélia. Lui ? Il regarde ses doigts maintenant libres. Qu’est-ce qui lui prenait sincèrement ? Il releva ses yeux, les posant sur Sélia.
« Pardon, je rêvassais maintenant … Je ne me sentais pas forcément très bien. »
C’est vrai … Sélia était belle, terriblement belle même. Elle avait un charme indéniable. Un corps des plus envoûtants … Le fait qu’elle soit maintenant en … partie dragonne, tout cela devait surement avoir un rôle dedans. Ah … D’ailleurs, voilà aussi quelque chose de différent : Hodan était en partie dragon, du sang noble et « princier » coulait dans ses veines. Elyséa était juste une femme normale, rien d’autre.
« Sélia … Sincèrement, je veux que tu comprennes tout. »
« Que je comprenne quoi exactement ? Dis-le-moi. »
« Sélia … Tu es magnifique comme femme, vraiment. Depuis que les mois ont passé, tu es devenue quelqu’un d’autre. Quelqu’un d’autre … que je ne reconnais pas tout de suite. Tu es devenue une femme resplendissante. Une femme qui n’existe surement que dans les rêves mais … Je ne peux pas. J’ai juré d’aimer Katérina. »
« Encore et toujours elle. Encore et toujours elle. Elle me fatigue ! »
« Oui mais c’est elle que j’aime. Je suis marié avec elle, tu le sais, Sélia ? »
« Je ne le … savais pas. Mais depuis quand ? Quand est-ce que … »
Il commença à réfléchir. Cela faisait combien de temps ? Et puis, il avait complètement oublié d’en parler à Sélia ? Qu’il était marié avec Katérina ? Qu’est-ce qui lui avait pris ? Ca ne se faisait pas ! Pas du tout même ! Il fallait être monstrueux pour oublier ça ! Quel idiot mais quel idiot quand même ! Quel imbécile !
« Ca doit faire quelques semaines quand même … »
« Je ne la laisserai jamais te récupérer ! Cette garce ne te mérite pas du tout ! »
« Sélia ! Il faut que tu comprennes que je l’aime, ELLE ! Tu es comme une grande sœur pour moi et ça ne changera jamais ! Je ne suis pas Hodan qui peut aimer Hyathéna ! Il faudrait que je sois mort depuis des millénaires pour espérer un changement dans mon comportement ! Que j’envisagerai ça différemment ! »
« Hodan qui peut aimer Hyathéna ? Hahaha … Quelle bonne blague. C’est vrai … Tu es mon petit Kéran … Mon petit Kéran. »
Qu’est-ce que ça voulait dire ? Elle venait lui caresser avec tendresse la joue, comme elle le faisait … auparavant. Son petit Kéran … Ce n’était pas moqueur, loin de là. C’était doux … C’était chaleureux, c’était … apaisant. Qu’est-ce que ça voulait dire ? Elle savait quelque chose qu’il ne connaissait pas et ça le rendait terriblement anxieux maintenant.
« Elle en a profité … Cette salope … Il n’y a pas d’autres termes pour elle. Elle a profité de ta candeur et de ta gentillesse. »
« Qu’est-ce que tu racontes ? Je ne te laisserai pas l’insulter de la sorte, Sélia. »
« Mais réfléchis un peu, Kéran ! C’est pourtant simple ! »
« Pourtant simple ? Qu’est-ce qui est simple selon toi hein ?! »
Il commençait à s’énerver et il était déjà en sueur. On lui cachait quelque chose mais quoi ?! Surtout que Sélia ne semblait pas mentir sur ce coup. Il était anxieux, très anxieux même.
« Kéran … Tu ne le sais peut-être pas mais Katérina te trompe avec Hodan … et cela depuis bien longtemps même. Avant le mariage … »
Mais il n’eut pas le temps d’écouter cette phrase. Son corps se pencha en avant, s’effondrant au sol ou presque. La pièce s’était mise à trembler comme la majorité des meubles, les fenêtres s’ouvrant à la volée.
« Qu’est-ce que … »
La femme aux cheveux bleus sentit une sueur froide qui s’écoula le long de son cou alors qu’en un seul instant, Elyséa était apparue, tenant Kéran dans ses bras avant qu’il ne tombe. Ses cheveux flottaient au vent, bougeant comme des flammes.
« Toi … Je peux savoir ce que tu comptais dire à l’instant ? Tu peux te répéter ? »
Tenant Kéran contre elle d’une main, elle n’avait pas hésité un seul instant à avoir l’épée dans l’autre bien que la lame était dirigée vers le sol. Ses yeux saphir fixèrent Sélia avec rage, attendant que la femme reprenne la parole.
« Tiens donc … C’est donc à ça que tu ressembles réellement ? Elyséa ? »
Passée la surprise, elle avait maintenant retrouvé son allure imposante. Elle observa Elyséa avec lenteur, penchant la tête sur le côté.
« Je t’ai posé une question … Qu’est-ce que tu comptais dire à Kéran ? »
« Simplement la vérité, est-ce que ça te dérange ? »
« TU ES STUPIDE OU QUOI ?! Tu veux le blesser ?! Tu veux le faire souffrir ?! »
« Et si nous en parlions ailleurs ? Tu n’as qu’à prendre possession de son corps … Ou alors, tu peux t’en éloigner pendant quelques minutes ? »
Le sourire mauvais que lança Sélia n’avait rien de plaisant. Pourtant, Elyséa n’hésitait pas à lui faire face. Elle hocha la tête positivement, déposant avec tendresse Kéran sur le lit alors que Sélia lui présentait la sortie de la chambre puis de l’auberge. Si elle était dans les environs, Kéran ne … serait pas en danger mais elle ressentait déjà un grand vide l’envahir.