Chapitre 239 : L’enfant du froid

ShiroiRyu
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Chapitre 239 : L’enfant du froid

« Alors, qu’est-ce que vous voulez que je fasse avec ce crâne ? »

« Pourriez-vous arrêter de me vouvoyer ? Je n’arrête pas de le répéter à bon nombre de personnes mais … aucune ne m’écoute. Le tutoiement me convient parfaitement. Je ne suis pas une personne spéciale ou différente des autres. »

« Je n’oserai pas vraiment car vous êtes … imposante, mademoiselle Elyséa. »

« Et en plus, vous en rajoutez. Ah … Vraiment … Je m’appelle Elyséa, tout simplement. Il n’y a pas d’autres appellations. »

« Je … Dites-moi ce que vous voulez faire avec ce crâne. »

Kéran pouvait sentir la confusion et la gêne de Kurym comme si c’était la sienne. Elyséa était vraiment … spéciale, très spéciale même. Comment ne pas la trouver différente des autres ? Avec un tel charisme qui émanait d’elle ? Comme … Elle n’était pas réellement là, il pouvait comprendre pourquoi Kurym … était attiré par elle.

« Mais vue comment il est doué dans les relations amoureuses, ça ne servira à rien. »

« Je voudrais que vous fassiez une épée avec ce crâne. J’aimerai rendre hommage à ce Dracolosse blanc que j’ai combattu … en montrant par-là que … »

« Un hommage. Mais vous me demandez quand même une arme, voilà tout … Je pensais que la guerre était terminée. »

Kurym poussa un profond soupir désabusé avant de lui tourner le dos. Elyséa s’approcha de lui, se penchant en avant pour que sa tête soit à côté de la sienne, Kurym tournant son visage avec surprise, poussant un cri d’étonnement.

« Ah ! Mais qu’est-ce que vous faites ?! «

« Vous … n’aimez pas la guerre, n’est-ce pas ? Elle est terminée … Je veux juste posséder cette épée car il reste encore quelques dissidents, rien de plus. Je ne cherche pas à la continuer, loin de là. Il faudrait être fou ou … »

« Mais vous recherchez quand même une arme pour tuer … comme tous les autres. Je n’aime pas la guerre, oui … mais je ne peux pas m’empêcher de créer des armes et des armures. Car qu’est-ce qui est le pire ? Permettre aux personnes que vous appréciez d’attaquer, de se défendre et de se protéger correctement ? Ou alors, les abandonner par souci d’éthique et les voir mourir car vous n’avez rien fait pour elles ? »

« Vous êtes plus … pensif que vous en donnez l’impression. »

« Est-ce une mauvaise remarque ? Vous ne seriez pas la première à trouver absurde ce que je dis … donc je ne vous en voudrai pas. »

« Et pourquoi est-ce que ça serait absurde ? Non … Vous êtes contre la guerre mais vous n’êtes pas buté, vous ne fixez pas sur vos positions. Même si vous êtes contre l’avis de la moyenne des gens, vous ne les délaissez pas pour autant. »

« C’est vrai ? Vous ne trouvez pas ça … stupide ? »

Elle avait toujours sa tête au-dessus de son épaule, le fixant pendant plusieurs secondes avant de l’hocher positivement. Elle confirmait ses dires. Pourquoi devrait-elle trouver cela digne d’une idiotie hein ? Pourquoi donc ?

« Est-ce que vous voulez bien faire mon épée ? »

« Est-ce que vos paroles sont là pour m’amadouer ? » murmura le jeune forgeron aux cheveux blancs, Elyséa haussant un sourcil. « Non, désolé, je ne devrai pas dire cela. Même si c’est pour m’amadouer ou non, je vous ferai cette épée. Vous pouvez revenir dans les jours qui suivent, je ne vous la promets pas pour tout de suite. Vous pouvez partir maintenant. »

« Vous me mettez à la porte pour être plus tranquille ? »

« Hein ? Mais non … mais vous n’avez plus rien à faire ici, je crois. »

« C’est vrai. » dit tout simplement Elyséa bien qu’elle ne bougeait pas de sa position. Qu’est-ce qu’elle … comptait faire ? Kurym resta immobile à son tour, ne bougeant pas de sa position … Il était … un peu perturbé mais bon … Euh … Il allait se mettre au travail. Elle était un peu bizarre … cette femme. Mais il prit le crâne du Dracolosse, commençant à l’étudier sous toutes les coutures puis à regarder les différents métaux qu’il possédait.

« Peut-être que je pourrai … fusionner des parties de ce crâne … des lambeaux d’os … avec le métal … Peut-être oui … »

C’était une bonne idée mais … AH ! Pourquoi est-ce qu’elle était encore là ? Il avait un peu oublié sa présence mais Elyséa était toujours présente. Elle faisait quoi exactement là ? Elle étudiait quoi ? Elle … Enfin … Il …

« S’il vous plaît … Est-ce que vous pouvez partir ? Je crois … que ça me perturbe. »

« D’accord, comme vous le désirez. »

« Vous pouvez revenir d’ici une semaine, je pense que ça sera bon. »

« Soit … Travaillez donc avec l’ardeur du forgeron que vous êtes. Bon … travail. »

« Euh … Bonne route, n’oubliez pas votre casque, d’accord ? » dit le jeune homme aux cheveux blancs avant de se remettre au travail, entendant la porte qui s’ouvrait puis se refermait derrière Elyséa.

Après une bonne heure à se concentrer sur ce qu’il comptait faire, il remarqua … qu’elle avait justement oublié son casque. Il poussa un profond soupir, s’installant sur une chaise avant d’étudier le casque avec lenteur. Elle … C’est bizarre … Enfin, elle avait laissé son odeur sur le casque. Avec quoi se lavait-elle ? Car pour imprégner une armure …

« Bonjour, Kurym. »

« Mais qu’est-ce que … Tu … Vous … Je … J’avais dit d’ici quelques jours ! »

« Quel est le problème ? Je ne fais que visiter la forge. »

Elle se moquait de lui ? Non … Elle était sérieuse, très sérieuse. C’est juste que … Enfin bon … Il n’allait pas la mettre à la porte. Et puis, avoir de la compagnie … tous les jours, il n’y était pas habitué et puis … ZUT !

« Vous avez oublié votre casque hier. Attention à vous, je ne pense pas que vous soyez une grande combattante si vous … oubliez vos protections. »

« Surement … Je ne me prétends pas tellement en tant que guerrière de toute façon. Ce titre ne me plait pas. Quant à mon arme, je tenais juste à dire … que c’est pour vous … Enfin non … Que cette arme me permettra de mettre un terme à cette guerre … définitivement. Trop de sang a coulé depuis le début. »

« Je … Bon … Je sais ce que je vais faire. J’aime beaucoup vos yeux … Euh non ! La lueur dans vos yeux ! Vous êtes une femme franche ! Alors, je sais ce que … je vais faire. »

Dire qu’il n’en avait jamais parlé à elle … car elle ne s’était jamais intéressée à lui. Enfin en même temps, Elyséa non plus ne s’intéressait pas à lui. Mais … Il aimait beaucoup ses yeux. Ils avaient quelque chose d’envoûtant. D’ailleurs, il avait l’impression de les avoir déjà vus.

« Purée ! Mais ça crève les yeux qu’Elyséa ne … »

Qu’Elyséa était une femme comme les autres ? Non … Enfin, qu’elle était une femme ? Et puis, ce Kurym qui lui ressemblait tant. Ça se voyait parfaitement qu’il était perturbé par Elyséa ! Purée ! Quels idiots ces deux-là !

« Alors … Je … Ne soyez pas apeurée, d’accord ? »

« Pourquoi est-ce que je le serai ? Vous allez vous transformer en monstre ? »

« Non … Mais disons que ça pourrait ressembler un peu à ça. »

Elle haussa un sourcil alors que le jeune homme s’approchait d’un morceau de métal encore rouge, le métal qu’il allait utiliser pour l’épée qu’il allait lui confectionner. Sans hésitation, il vint le serrer dans sa main droite, Elyséa criant :

« Mais qu’est-ce que vous faites ?! »

« Oh … Vous semblez moins stoïque. C’est étonnant et bizarre mais ne vous en faites pas. »

Il tenait fermement le morceau de métal mais celui-ci émettait une fumée … comme s’il était en train de refroidir. Le jeune homme déposa le bout d’acier sur la table alors qu’Elyséa retirait ses gantelets, prenant la main de Kurym entre les siennes. Aucun problème ? Aucune brûlure ? Comment était-ce possible ? Humainement possible ?

« Voilà pourquoi j’habite seul … et loin de toute civilisation. »

« Car tu ne te brûles pas en prenant du métal dans tes mains ? Je trouve cela assez déraisonnable … comme explication. »

« Non ! PAS DU TOUT CA ! Ce n’est pas ça ! C’est … mes pouvoirs … Regardes, je vais te montrer ce que je veux dire par là. »

Puisqu’elle tenait sa main entre les siennes, la jeune femme aux cheveux blancs sentit aussitôt un certain froid la recouvrir. Elle retira aussitôt sa main, celle-ci étant devenue un peu plus blanche qu’auparavant.

« Voilà … Je suis capable de produire ce froid particulier qui fait que je peux forger plusieurs armes et armures assez rapidement. »

« Mais comment est-ce possible ? Est-ce de la magie ? »

« Nullement … Disons … que … Enfin non … Ca ne t’intéressera pas. Ton épée sera prête dans quelques jours. Il vaut mieux que tu ailles avec les autres … enfin, les tiens. »

Pourtant, elle vint tout simplement s’asseoir sur une chaise. AH NON ! Elle n’allait pas recommencer comme … hier hein ? Pourtant, elle croisa juste les bras et les jambes, sans un mot. Bon … Tant qu’elle ne faisait pas de bêtises et qu’elle … Enfin bon … Qu’elle ne le dérangeait pas réellement, ça ne lui poserait aucun réel problème, voilà tout.

Pendant deux bonnes heures, elle était en train de l’observer tailler quelques morceaux d’os sur le crâne qu’elle lui avait confié. Mais aussi … Il mélangeait plusieurs métaux … et elle pouvait voir aussi le froid qui émanait de ses doigts … mais de son corps. Il n’y avait pas que cette aura glacée … Il y avait autre chose aussi.

« Vous feriez mieux … de rentrer chez vous … Ca sera mieux pour tout le monde. »

« Pourquoi cela ? Et tu … m’as tutoyée auparavant. Tu peux continuer vers cette voie, tu sais ? Je ne vais pas te mordre. »

« Je préfère être seul … C’est tout. Tu … Vous risquez … Enfin, je me dis que c’est mieux pour vous, voilà tout. »

« Et pour toi ? Qu’est-ce qui est le mieux ? Et tu ne m’as pas dit comment cela se fait que tu possèdes de tels pouvoirs, ce n’est pas normal, n’est-ce pas ? »

« J’ai été élevé par Kyurem ! Voilà tout ! Kyurem est un imposant dragon des glaces ! Comme j’ai été élevé par lui, j’ai toujours eu une partie de ses pouvoirs ! Maintenant que vous êtes satisfaite, partez ! Mon histoire n’est pas intéressante ! »

« C’est donc ça … Hum … Je me disais bien que les livres sur les dragons me seraient utiles un jour. Je commence à comprendre réellement ce qui se passe. »

« Et qu’est-ce qui se passe selon vous exactement ? »

Il ne s’était pas énervé, c’était même tout le contraire. Il semblait étonnamment triste, se frottant le bras gauche avec sa main droite. Il se retourna pour ne plus regarder Elyséa, murmurant d’une voix lente et calme :

« Pardonnez-moi … Je ne voulais pas m’emporter. »

« Et où est donc le problème ? Je vois … Surtout que tu veux te donner une apparence froide pour que personne ne s’approche de toi mais en même temps, tu recherches un peu de chaleur humaine … Tu ne dois pas être sociable car tu n’as pas de contact humain mais en même temps, tu es plus que gentil. »

« Veuillez ne pas dire ça … C’est vraiment gênant quand vous parlez de la sorte. Comment faire pour que vous ne me parliez plus ? »

« Dites-moi de partir définitivement, vous pourrez garder le crâne et faire comme si je n’avais jamais existée. Mais est-ce que tu le désires ? »

C’était Elyséa … C’était celle qu’il avait toujours connue, lui, Kéran. Enfin … Elle aussi se montrait froide et distante mais … en même temps, elle avait aussi le cœur sur la main. Il comprenait ce qu’elle était en train de faire. C’était tellement simple à comprendre, tellement facile … mais tellement appréciable en même temps. Kurym se tritura les doigts, comme en proie à une intense réflexion, tremblant un peu de tout son corps.

« Qu’est-ce que cela … va t’apporter ? »

« Est-ce qu’il est toujours nécessaire d’obtenir quelque chose de ta part si on te parle ? »

« … … … J’ai été élevé par Kyurem et bien que je n’ai pas réellement de nom, je m’appelle ainsi … pour faire référence à lui. »

« Où sont tes parents alors ? Si tu as été élevé par Kyurem, cela veut dire que … »

« Où sont les tiens ? » rétorqua le jeune homme en lui coupant la parole, pour bien montrer qu’il … n’avait pas envie d’en discuter.

« Morts lorsque la météorite est tombée du ciel. »

« Ah … Pardon … »

« Tu t’excuses pour quelle raison ? Car tu es celui responsable de la chute de la météorite ? »

« Non non ! Et puis zut … Je … Je vais faire du thé et de quoi préparer à manger. Je te mets une assiette, n’est-ce pas ? »

Bien entendu. Ils allaient avoir une discussion tous les deux, n’était donc pas normal ? Enfin, il lui offrait un repas et à boire. Peut-être pas le thé en même temps que le repas … Mais voilà tout. Kéran ? Lui, il regardait tout simplement le spectacle devant ses yeux, trouvant cela … touchant en un sens. Il savait ce que … Kurym endurait. Il voulait juste qu’une personne s’intéresse à lui, voilà tout, à son existence.

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