Chapitre 240 : Désintérêt

ShiroiRyu
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Chapitre 240 : Désintérêt

« Elyséa ? Est-ce que tu es sûre de cela ? De ce que tu veux faire ? »

« Je ne sortirai plus qu’une heure par jour, au grand maximum. Je tenais juste à te le signaler. Je vais rester avec lui, ancrée dans son corps … jusqu’à ce qu’il se réveille. Je ne changerai pas d’avis à ce sujet. »

« C’est tout ce que je voulais savoir. Je vois aussi … que les brûlures cicatrisent … un peu. Mais je ne sais pas s’il gardera ça indéfiniment ou non. »

« Ca ne fait rien … Qu’importe l’allure qu’il aura … tant qu’il est vivant. »

« C’est vrai, je ne devrai pas penser autrement. Bon … Et bien … Je te laisse alors t’occuper de lui, Elyséa. Je reviendrai chaque jour. En fait, viens me chercher quand tu sortiras. Pour l’auberge, les chambres sont payées pour deux semaines. »

« J’espère que ça sera suffisant … » souffla la femme aux cheveux blancs dans son armure noire alors que Sélia faisait un petit sourire.

« Si ce n’est pas le cas, je payerai encore un peu plus, ne t’en fait donc pas à ce sujet. »

Soit … Elle lui faisait alors confiance. Ce n’était pas comme si c’était possible autrement de toute façon. Sélia quitta la chambre, Elyséa rentrant aussitôt en Kéran pour retourner auprès de lui … dans ce monde enneigé. Là-bas, il y avait encore la femme masquée de blanc qui l’attendait, souriante à son tour.

« Alors … Tu es certaine de ton choix ? »

« Plus que certaine … Je vais faire cela … et puis … cela parait étrange mais … Quand je rêve contre lui, j’ai l’impression de revoir des choses … que j’avais scellées dans ma mémoire. C’est vraiment étrange. »

« Soit … Je peux donc te le confier. Je vous surveillerai tous les deux. Mais sache que cela fait déjà une bonne semaine qu’il est dans cet état et qu’il n’y a aucune amélioration. »

« Je le … sais parfaitement … Je l’ai remarqué … oui. »

« Alors, ne te fais pas trop d’espoir, néanmoins. Même si je sais que tu espères qu’il se réveillera. Mais … Voilà. »

Sauf qu’Elyséa n’écoutait pas Sarène, ayant déjà posé sa tête contre le torse du corps du jeune homme inanimé. Elle avait fermé les yeux, murmurant qu’elle attendrait autant qu’il le faut … Mais le corps physique de Kéran n’était pas éternel …. Pas du tout. Et plus les journées passaient, plus … le … corps de Kéran allait s’affaiblir. Se soigner certes … mais devenir de plus en plus faible car il ne faisait rien.

C’était tout … mais elle resterait à ses côtés … jusqu’au bout … mais elle voulait qu’il se réveille … qu’il se réveille et lui parle, comme d’habitude. Elle ne voulait pas qu’il meure, pas du tout. C’était impossible. Elle ne voulait pas se l’imaginer.

« Alors … Qu’est-ce que vous voulez que je vous raconte ? »

« Que tu me tutoies, d’abord ? Non … Et puis, si tu parles de ton passé, je te parlerai du mien. Un échange de bons procédés. Qu’est-ce que tu en penses ? »

« Je … Hum … Je pense que c’est une bonne idée. Tu … Vous … Tu commences ? »

« Comme tu le désires. Alors … Qu’est-ce que je peux te dire ? Hmm … Tu ne risques pas de connaître réellement cela, c’est bien dommage. »

Même s’il était à l’intérieur de Kurym, qu’est-ce qu’il était content de revoir Elyséa. Du moins, de voir la jeune femme et son passé. Là, elle lui racontait ce qu’elle avait vécu avant que la météorite ne tombe. Les voitures, les gratte-ciels, toutes ces choses. Mais bon … Même si lui, de son côté, n’en avait jamais vu réellement, de ses propres yeux, il pouvait toujours se les imaginer. Et il sentait que Kurym était émerveillé par les paroles d’Elyséa, s’abreuvant de ses paroles sans aucun problème. C’était si … simple de le captiver.

Mais oui, lui aussi, il l’était, en Kurym. Elyséa le captivait … Elle faisait tellement d’efforts pour Kurym que ça en était impressionnant. Pourquoi le faire pour un homme qu’elle ne connaissait pas ? Pas du tout même. Mais finalement, elle termina de raconter son histoire, Kurym prenant la parole :

« De mon côté … A part le fait que je n’ai jamais connu mes parents, j’ai été élevé par Kyurem que je considère comme mon père. Vous savez … Euh tu sais … C’est étrange. Kyurem est un dragon qui produisait énormément de froid autour de lui, vraiment… »

« D’après les textes qui parlaient de lui, il pouvait tout geler … »

« Mais à côté, même s’il semblait … défiguré et froid … justement … Il était tellement gentil avec moi. Je n’ai pas compris pourquoi il m’a élevé pendant des années mais grâce à lui et malgré le fait que je sois humain, j’ai survécu. »

« Mais où est donc Kyurem maintenant ? Il n’y a plus aucune nouvelle de lui, non ? »

« Kyurem est parti lorsque la météorite est tombée … près de chez nous … dans la montagne. Lorsqu’il est parti, j’ai su qu’il ne reviendrait jamais. »

« Sais-tu exactement ce qui s’est passé par rapport à cette météorite ? »

« Tu veux parler de ce qui en est sorti ? Kyurem l’a surement scellé … C’est pour ça qu’il s’en est allé. Et c’est pour cela que la montagne des dragons est maintenant baignée par ce blizzard permanent. Pour empêcher qu’un jour, cette … chose arrive à s’en échapper. »

« Cette chose contrôle les dragons et les manipule. Elle veut avaler toute vie sur notre planète. Elle peut créer la vie comme elle peut l’enlever et … C’est cela que je combats. »

« Fais attention à toi, réellement … hein ? C’est dangereux, très dangereux. Je ne suis pas un combattant, loin de là … mais je sais que je dois suivre les pas de Kyurem. Si un jour, cette chose doit revenir, je me mettrai en travers de son chemin. »

« … … … Tu n’es pas un combattant mais tu veux risquer ta vie ? » dit Elyséa avec neutralité, aucune émotion peinte sur son visage. Pourtant, elle prit la main gauche de Kurym dans la sienne, le jeune forgeron déclarant :

« Je suis sûr que je peux être capable de geler cette chose à jamais. Peut-être qu’en la gelant à un tel point que même la plus infime parcelle en elle ne peut pas se reproduire … ou vivre … Je pense qu’à ce moment précis, ça sera parfait. »

« Ne te mets pas en danger. Tu n’en as pas la carrure. Tu peux aider à ta manière, n’est-ce pas ? Alors … C’est bon, ne force pas tout cela. »

Hein ? Que quoi ? Il … Il … Il était en train de voir Elyséa qui souriait. Et il sentait déjà que le cœur de Kurym battait fortement, très fortement. Il retira sa main aussitôt, se levant avant de bredouiller d’une voix troublée :

« Je vais continuer ton épée, Elyséa. Il se fait tard, tu ferais mieux de rentrer. »

« Est-ce qu’un jour, tu … Hum non. »

Tu ? Il aurait bien voulu entendre le reste de la phrase mais maintenant, il n’était pas sûre qu’elle, elle veuille en parler. Il l’accompagna jusqu’à la sortie, la regardant disparaître sous la tempête de neige sans même se retourner. Il aurait … Non. Il aurait rien voulu, il attendait toujours le retour … son retour … ou alors, celui d’Elyséa ?

« Ton épée sera bientôt prête, Elyséa. »

« Est-ce que je peux déjà voir à quoi elle ressemble ? Si c’est possible, bien entendu. »

« Viens donc … Je ne vois pas pourquoi je refuserai cela. »

Il l’invita à l’accompagner, lui présentant alors la garde. Une belle garde qui brillait d’une lueur bleutée … Comment avait-il réussi à obtenir une telle couleur avec seulement du métal ? Et sur la garde était dessinées les antennes d’un Dracolosse.

« C’est vraiment un travail magnifique … et je peux la tenir facilement. »

« Tu voulais faire honneur à ce Dracolosse non ? Alors … Je me disais que cela irait bien … Pour la lame, je vais … essayer de faire quelque chose de bien. »

« Quoi donc exactement ? Si tu peux me le dire … bien entendu. »

« Oh … C’est assez personnel mais … Tu verras au moment venu. Ton épée est bientôt terminée de toute façon … »

Il avait dit cela avec une petite mine déconfite et triste mais elle ne lui demanda pas la raison d’un tel comportement, non … Kéran, lui, comprenait parfaitement ce qu’il pensait. Il était dans Kurym de toute façon alors ce n’était pas difficile … de savoir … Il avait peur de ce qui allait se passer très bientôt, oui.

Les journées s’étaient écoulées … et il savait que la guerre allait bientôt se terminer définitivement. Elyséa lui en parlait tous les jours, lui déclarant que bientôt, elle allait rencontrer celui qui dirigeait les dragons. Un homme … Un humain … Aussitôt, Kurym avait senti une petite pointe l’atteindre en plein cœur.

« Ton épée est prête, Elyséa. »

Ce qu’il ne lui avait pas dit, c’est que cela faisait depuis déjà trois à quatre jours qu’elle était prête. Elle … l’était … Enfin … Il vint l’emmener jusqu’à sa création, lui tendant l’arme avec lenteur, ayant du mal à la lâcher.

« Je ne peux pas la récupérer si tu ne … retires pas ta main, Kurym. »

« Oh ? Ah oui … C’est vrai … Je suis désolé … Je n’y avais pas pensé. »

« Qu’est-ce qui te perturbe tant que ça ? Tu ne sembles pas aller très bien. Est-ce que tu es malade ? Après tout, ça ne serait pas étonnant. Tu ne fais que travailler. »

Il sursauta au moment où elle posa une main sur son front, la retirant aussitôt en la repoussant d’un geste vif. Il rétorqua :

« Tu peux t’en aller maintenant. Tu as ton arme. J’espère que tu en feras bon usage mais je n’en doute pas le moins du monde. »

« Je l’espère, rien n’est jamais moins sûr, tu t’en doutes ? »

« Je ne m’en doute pas un seul instant. Aller … C’est bon … »

Il se dirigea vers la porte d’entrée, l’ouvrant pour qu’Elyséa puisse s’en aller. Elle resta immobile pendant quelques secondes, murmurant :

« Merci pour cette arme, Kurym. Elle est vraiment splendide. Je te jure que je ferai tout pour ne jamais te décevoir par rapport à elle. »

« Je m’en doute … Bonne route à toi … Elyséa. »

Elle passa devant moi, se stoppant pour regarder le visage baissé de Kurym. Le jeune forgeron aux cheveux blancs n’osait pas la regarder. Elle sortit de la forge, Kurym fermant la porte derrière lui avant de murmurer :

« Adieu … Je me doutes bien que tu ne reviendras pas. »

Il n’était plus motivé pour la journée. Plus du tout … Elyséa avait fait quelque chose de pire, bien pire que la précédente personne. Elle s’était intéressée à lui … pour de faux. Il le savait parfaitement … Assis sur une chaise, il se triturait les doigts sans même remarquer que deux yeux bleus l’observaient à travers la tempête de neige, de l’autre côté des fenêtres. Il … se sentait si mal … tellement mal … et Kéran qui était en lui aussi. Il comprenait … Il comprenait le fait qu’il n’arrivait pas à se convaincre qu’Elyséa ne reviendrait pas, c’était … aussi simple que ça. Mais en même temps, ça le faisait souffrir.

Et toute la journée s’était passée ainsi … Le lendemain matin, il était resté couché dans son lit, sans même chercher à bouger. Il n’avait plus envie de travailler pour le moment. Il voulait juste être seul … voilà tout.
Puis de toute façon, ce n’était pas comme si quelqu’un l’attendait. Pas du tout même … Plus personne n’avait besoin de lui. On l’utilisait comme un objet, on le complimentait, on obtenait ce que l’on voulait de lui et ensuite … on le jetait, voilà tout.
Les yeux fermés, il vient retenir ses larmes, s’engouffrant dans les mêmes draps depuis des années … Son lit était si petit … comme la forge. Et malgré les pouvoirs qu’il possédait, il n’avait rien … du tout. Rien du tout.

« Est-ce que tu comptes dormir encore longtemps ? »

Hein ? Quoi ? Que ? Mais comment … Il ouvrit subitement ses yeux, voyant le visage penché d’Elyséa juste au-dessus du sien. Il poussa un cri mais elle plaça une main sur ses lèvres, reprenant la parole en chuchotant :

« J’ai toqué plusieurs fois mais aucune réponse. Je suis donc rentrée, tu n’étais pas au fourneau. J’ai donc commencé à visiter le tout. »

« Mais mais mais … Tu as eu ton épée ! Tu n’as plus besoin de moi ! »

« Hein ? Pour me forger quelque chose, bien entendu que je n’ai plus besoin de toi mais après ? Tu me refuses le droit de te rendre visite ? »

« Bien sûr que non ! Mais qu’est-ce que tu veux de moi alors ? Je n’ai plus rien à te forger, tu le sais parfaitement ! »

« Passer du temps avec moi ? Est-ce que tu penses y arriver ? »

« Hein ? » bredouilla Kurym, Kéran sentant une forte chaleur l’envahir. C’était ça … C’était exactement ça … C’était exactement Elyséa. Bien qu’elle ne montrait aucune émotion ou presque, ses phrases étaient toujours bonnes et justes.

« Je t’ai demandé si cela te dérange de parler avec moi de tout et de rien ? Et puis … Il faut que je t’avoue quelque chose concernant … cette femme … »

« Cette femme ? Comment est-ce que tu … »

« Tu veux te lever ? Ou alors, tu préfères rester couché ? »

« C’est une mauvaise nouvelle ? »

« … … … Tu peux le prendre de la sorte. » murmura Elyséa avec lenteur.

Alors, il préférait rester couché. Ca ne changerait pas de d’habitude. Des mauvaises nouvelles, il ne connaissait que ça de toute façon depuis le début de son existence. Il attendait juste qu’Elyséa reprenne la parole et raconte donc ce qui se passait.

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