Chapitre 4 : Dégôût

ShiroiRyu
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Chapitre 4 : Dégoût

« Mais qu’est-ce que … Sélia, qu’ai-je appris ? Tu comptes partir du village ? Mais pourquoi ? » demanda un homme d’un certain âge, surpris par cela.

« Je pensais pourtant m’être correctement exprimée. Je m’en vais. J’ai fait mon temps dans ce village, voilà tout. » répondit la jeune femme aux cheveux bleus, empaquetant quelques affaires. Dans un coin, l’adolescent avait déjà un petit sac sur le dos, la tête dirigée vers le sol. Il n’osait visiblement pas prendre la parole. Une main posée sur le pommeau de son épée, il attendait discrètement que Sélia ait fini de se préparer.

« Mais mais mais … Pourquoi est-ce que tu fais cela ? » reprit le vieil homme.

« C’est pourtant très simple. Plus rien ne me rattache à ce village. Vous avez pris votre décision, j’ai pris la mienne. Si vous voulez bien me laisser passer. » termina-t-elle de dire, se tournant vers l’adolescent, faisant un geste de la tête. Lorsqu’il passa à côté du vieillard, celui-ci le prit par le col, fou de colère :

« DE TA FAUTE ! C’est de ta faute ! Sans elle, nous sommes perdus ! Qu’est-ce que tu as fait pour la manipuler ? MONS … »

Il n’eut guère le temps de terminer sa phrase que ce fut à son tour d’être soulevé par Sélia. Celle-ci le fixa de ses yeux rubis, l’adolescent posant sa main sur son bras, hochant la tête négativement. Elle retira sa main du villageois, prenant celle de Kéran dans la sienne avant de quitter la demeure. Maintenant … Il était temps de partir du village.
Personne n’osa faire ne serait-ce qu’un geste, proférer qu’une seule parole … Certains avaient vite passé le message de la jeune femme soulevant le vieillard. Ils avaient voulu jouer aux imbéciles, ils en payaient le prix. Maintenant, ils n’étaient plus de ce village. Main dans la main, ils disparurent au loin pour ne plus jamais revenir.

Depuis le moment où on lui avait adressé la parole de la sorte, il était devenu muet ou presque. Oh … Il était toujours capable de parler mais maintenant, ce n’était que très peu. Heureusement que … que … Qu’elle était là pour lui. Qu’elle était partie avec lui … Oh, il était un peu inquiet pour le village malgré ce que ces hommes et femmes avaient décidé … mais voilà … Il était heureux qu’elle soit là avec lui. Elle le remarqua dans le regard qu’il lui lançait, les doigts croisant les siens avec douceur.

« Ne t’en fait donc pas … Personnellement, je ne regrette pas d’être partie. Il faut comprendre, Kéran … Ces personnes ne voulaient plus de toi. »

« … … … Oui mais … C’est un peu difficile quand même. Les oublier comme ça … »

« Il faut tirer un trait sur le passé si tu veux continuer dans la vie. C’est ce que j’ai fait personnellement, il y a déjà bien longtemps. »

« … … … D’accord, Sélia. » répondit-il tout simplement alors qu’elle lui souriait. Hum … C’était quand même difficile … malgré ce qu’elle disait. Mais en parlant de son passé, elle semblait être plus froide. C’est vrai … Elle n’était pas du village au départ. D’où venait-elle ? Car elle était arrivée lorsqu’il n’avait que neuf ans, une année avant ce drame.

Pourtant, quelques jours plus tard, alors qu’ils marchaient sur un chemin de terre dessiné par les hommes, ils apprirent d’une personne extérieure, juchée sur un Ponyta, que le village avait été attaqué par les spectres et qu’aucun survivant n’y avait été trouvé. Sur le coup, il était resté interdit, Sélia ne faisant que murmurer que c’était une nouvelle bien triste. Lorsqu’ils furent seuls à nouveau, il se laissa aller aux paroles :

« C’est de ma faute … Sélia … C’est de ma faute. »

« Non, ce n’est pas de ta faute et ne t’avise surtout pas de continuer à penser ainsi, d’accord ? Est-ce bien compris, Kéran ? »

« Oui mais … Si tu étais resté là-bas alors ils seraient toujours … »

« Oui ! Tu as parfaitement raison ! C’est de ma faute ! Uniquement de ma faute ! » reprit-elle avec véhémence, posant ses deux mains sur ses épaules. C’était elle la responsable de cette tragédie. Elle avait été la seule à décider de ne pas rester au village.

« … … … Je ne veux pas que tu te sentes coupable, c’est tout. » termina t-il de dire alors qu’elle lui souriait. Devait-elle se sentir coupable ? Pas le moins du monde … Pas du tout même. Elle ne se sentait pas en parfaite forme, ce n’était pas comme si elle était heureuse que des personnes meurent … Mais elle n’allait pas se sentir mal à cause de cela.

« Les seuls coupables sont d’autres personnes, Kéran. Maintenant, avançons … Car les villes sont difficiles à atteindre. Heureusement que je suis là avec toi. »

Car sinon … Elle n’aurait pas donné cher de la peau de l’adolescent. Le gardant contre elle, ils recommencèrent à marcher pendant de longues minutes. Au fil du temps qui s’écoulait, il ne savait plus quoi faire. Le remord l’envahissait peu à peu, comme un serpent qui l’entourait pour l’étouffer dans ce qu’il considérait être un pêché. Ah … Ah … Ah … La jeune femme ne tarda pas à remarquer son angoisse, le serrant contre elle avant de signaler qu’ils allaient rester là pour la nuit. Ils avaient plus que marcher pour aujourd’hui.

« Cette nuit risque d’être une très longue nuit … Oui … » se dit-elle à elle-même alors que l’adolescent observait le feu qui brûlait entre eux deux.

« De quoi est-ce que tu parles, Sélia ? Je … Pardon quand même. »

« Arrête ça ! SINON … Je vais devenir méchante, tu n’aimerais pas hein ? » dit-elle avant de lui servait à manger, l’adolescent tremblant un peu. « Je rigole … Pfff … Je ne vais rien te faire, tu sais parfaitement que je ne te veux aucun mal, Kéran. »

« Ce n’est pas à cause de ça … Pas du tout enfin … Je crois … »

« STOP ! C’est bon ! Maintenant, mange et tais-toi. Essaie de dormir ce soir tranquillement. » termina-t-elle de prononcer avant de manger de son côté.

Il avait maintenant honte de se faire remonter les bretelles par la jeune femme aux cheveux bleus mais … Il devait essayer de comprendre ce qu’elle disait. C’était normal … normal de penser de la sorte. Il n’avait pas à s’en vouloir. Oui … Il allait tenter de bien dormir.

Enfin, le lendemain, il semblait déjà un peu plus rassuré, ce qui plut à la jeune femme qui gardait le sourire. La marche était lente, très lente mais cela était dû à l’armure qu’elle avait sur le corps mais aussi que la surveillance était de mise. Ils n’étaient que deux … et il n’y avait pas que les pokémons comme créatures prêtes à bondir sur eux. Non, il y avait encore pire … Des humains … Car ce n’était pas rare de tomber sur des voleurs, des brigands et divers personnes encore plus malfamées les unes que les autres.

Lui … Il avait pensé toute la nuit à ce qu’il devait faire. Ça allait être difficile … très difficile même … mais si il ne le faisait pas, il n’aurait pas la conscience tranquille. Cette voix dans son arme … Elle ne parlait guère, semblant toujours trop calme et paisible. A y réfléchir, c’était à se demander pourquoi cette arme était possédée. Mais bon, ce n’était pas le moment de penser à cela. Il s’arrêta sur la route, prenant la parole :

« Sélia … Je … Je peux te dire quelque chose s’il te plaît ? C’est important. »

« Hum ? Bien entendu. De toute façon, ce n’est pas comme si les conversations étaient nombreuses autour de nous. Que se passe-t-il, Kéran ? Tu m’as l’air … NON ! Si c’est encore à ce sujet, je refuse que tu me parles, d’accord ? »

« Ce n’est pas à cause de ça … C’est à propos de l’épée. »

L’épée ? Il parlait … de l’arme qu’il avait ? Aussitôt, dès qu’il avait prononcé ses mots, elle s’était mise sur le pied de guerre, prête à réagir. Elle aussi commençait à trembler. Si … Dans le pire des cas … Elle ne voulait pas y penser, ça serait trop horrible.

« Continue donc … Kéran. Je suis toute ouïe, je t’écoute. » murmura Sélia avec lenteur.

« Euh … Tu ne te mettras pas en colère, d’accord ? Tu me le promets ? »

« Si tu ne me dis pas ce qui se passe, je vais me mettre en colère sans même que tu puisses ouvrir la bouche. Allez, dis-moi tout. Je te promets que je ne te ferai aucun mal. Tu sais très bien comment je suis, non ? » dit Sélia pour le rassurer.

« C’est au sujet … de mon arme … Je … Il y a une voix qui me parle. Enfin, je pense que c’est une arme mais elle n’est pas vraiment maudite ! Enfin, la voix ne parle que très peu, c’est à peine si elle est présente mais elle n’a rien fait de mal. Je ne voulais pas t’en parler tout de suite car je sais très bien que tu n’aimes pas ça … »

Il cherchait à se défendre, à éviter que la jeune femme s’emporte mais celle-ci restait d’un calme olympien. Ah … Bon … Il devait quand même reprendre la parole au cas où car ça ne voulait pas dire que tout s’était arrangé.

« Et bien … Enfin, c’est cette voix qui m’a permis de sortir de la grotte. Sans elle, je serai certainement mort à l’heure qu’il est. Je … Je ne veux pas que tu croies que je suis un imbécile, je savais parfaitement ce que je faisais mais je n’avais pas le choix. Je voulais rester en vie pour te revoir, c’était le plus important pour moi. S’il te plaît, crois-moi vraiment, Sélia. Je sais ce que j’ai fait, je sais que ce n’est pas bien du tout, je sais que maintenant, je suis sûrement maudit mais … La voix ne me semble pas être une ennemie … » termina-t-il de dire, quelques trémolos dans la voix alors qu’elle ne faisait que soupirer.

« C’est tout ce que tu avais à me dire, Kéran ? »

« Hein ? Euh … Oui … Tu n’es pas en colère alors ? » demanda l’adolescent, surpris par la réaction ou plutôt l’absence de réaction de la jeune femme.

Sans un mot, elle recommença à marcher devant lui, le distançant avant qu’il ne réagisse. Aussitôt, il revint à sa hauteur, cherchant à parler sans savoir quoi dire. Il s’était attendu … à autre chose de sa part mais pas à cela ! C’était encore pire que prévu. Ah … Sélia n’était même pas en colère … alors qu’elle lui avait interdit depuis des années de toucher à n’importe quelle arme … Quel idiot.

« Sélia … Je … Tu peux me parler s’il te plaît ? »

« Pour te dire quoi, Kéran ? Ce qui a été accompli est fait … Maintenant, on ne peut plus rien pour toi de ce côté. Tant que ton arme maudite n’est pas dangereuse pour toi, c’est bon. »

« Tu es vraiment sûre ? Tu ne m’en veux pas plus que ça ? »

« Si tu continues à chercher à ce que je t’en veux, oui, tu risques d’avoir gain de cause. Pour l’heure, je ne t’en veux pas. » dit-elle avec une certaine lassitude.

Il valait mieux qu’il se taise alors. Pourquoi est-ce qu’il avait parlé à la base ? Pour éviter qu’elle ne lui dise des méchancetés, non ? C’était une pensée un peu infantile mais il avait honte de ce qu’il avait fait. Et comme il considérait Sélia comme son unique … famille, c’était normal que de vouloir lui plaire. Et là … Il avait plutôt l’impression du contraire.

Maintenant qu’il avait décidé de ne plus parler de cette histoire, le calme était revenu pendant la marche. Plutôt le silence … Un silence beaucoup trop lourd pour lui. Il avait envie de discuter avec elle ! Le fait de ne rien dire, de ne rien prononcer … après tout ça … Il se sentait mal ! TRES MAL ! Il avait besoin … de …

« Et bien ? Pourquoi est-ce que tu ne lui dis pas toute la vérité ? »

Ils s’arrêtèrent tous les deux, Sélia sortant ses deux haches à l’écoute de cette voix féminine. D’où provenait-elle ? L’un comme l’autre avait parfaitement reconnu de qui elle provenait. Cette voix … Ils ne l’avaient entendu qu’une seule fois … mais elle était restée gravé en eux.

Il tourna sa tête vers le ciel, une culotte en dentelle de couleur blanche étant la première chose qu’il vit. Assise sur une branche d’un arbre, une adolescente aux yeux dorés était là, en train de les observer. Comme amusée par la situation, elle avait toujours un sourire aux lèvres, signe qu’elle semblait heureuse.

« Mais je lui ai dit toute la vérité ! » s’écria t-il avant qu’elle ne lui coupe la parole :

« Je ne parlais pas de toi … mais de la boîte de métal qui te sert d’amie. »

Elle sauta de la branche, atterrissant à cinq mètres d’eux sans aucune difficulté. Cette hauteur … Encore une fois, elle avait montré ce dont elle était capable. Elle ne s’était pas faite mal ? Mais comment était-ce possible ? Et puis de quoi est-ce qu’elle parlait ? Sélia ne lui disait pas la vérité ? Mais à quel sujet ?

« Oh … Je devrais peut-être commencer par le … « commencement ». Je tiens à me présenter une nouvelle fois : Katérina. »

Elle s’inclina respectueusement, laissant voir ses formes aux yeux de l’adolescente qui ne put s’en détacher. Elle était … vraiment bien faite de sa personne. Elle reprit la parole :

« Je suis celle qui a envoyé quelques pokémons spectres faire le ménage dans votre village il y a de cela quelques jours. Les pauvres … Ils pensaient s’en prendre à toi, Kéran. Dommage que tu étais déjà parti depuis longtemps. Dans leur stupidité de bien faire, avec ce bannissement, ce village t’a sauvé la vie … avant d’être détruit. »

Que … Que … Quoi ? C’était … C’était elle la responsable de tout cela ? C’était elle qui avait … rasé son village natal ? Pourquoi ? Pourquoi est-ce qu’elle avait ça ? Il voulut prendre la parole mais Sélia fit quelques pas, ses deux haches dans ses mains.

« Oh … Je ne pensais pas trouver aussi rapidement la personne à l’origine de cette attaque … Mais maintenant que tu es devant moi, je crois … »

« Hohoho ! Désolée ma grande, mais ce n’est pas encore terminé. Tu es prié de ne pas couper la parole, où est donc la politesse chez toi ? »

« Envers toi, je ne ressens pas l’envie d’être polie. » répliqua Sélia, ses yeux rubis fixés sur Katérina. L’adolescente fit quelques pas à son tour, sortant ses deux lames crantées.

Qu’est-ce qui se passait ? Elle n’allait pas combattre Katérina quand même ? Il avait un peu de mal à croire que celle-ci était vraiment … à l’origine de toute cette histoire mais après … Elle avait essayé de l’attaquer … et il savait bien que la plus belle des roses avait des épines. Et cette rose … était magnifique.

« Bon … Et si nous arrêtions de perdre du temps, n’est-ce pas ? Allez … Dis-lui ce que tu ressens réellement en apprenant au sujet de son épée. Très belle arme d’ailleurs, Kéran. »

Il ne savait pas s’il devait la remercier ou non … alors, il préféra rester complètement muet. C’était la meilleure chose à faire visiblement. Les trois personnes ne bougèrent guère, Katérina croisant ses lames devant elle, gardant son sourire aux lèvres.

« Alors ? Tu as perdu ta langue ? Tu es incapable de t’adresser à lui ? Je vais le faire pour toi … Il est si facile de lire sur le visage des personnes … Au cas où tu ne le saurais peut-être pas, la femme qui t’accompagne est répugnée par ta présence, Kéran. »

« ASSEZ ! Ne raconte pas n’importe quoi ! » s’écria Sélia, envoyant l’une de ses haches en direction de Katérina. Celle-ci para l’arme de jet, la faisant se planter contre un arbre.

« Oh ? Tu préfères que j’utilise un autre langage ? Alors, on peut dire que tu es écœurée, dégoûtée par ce que tu as appris à son sujet. Oui, rien que le voir après ce qui t’a dit te révulse … Tu ne veux pas le montrer mais c’est ce que tu ressens. Pourquoi se voiler la face ? » annonça Katérina, son sourire s’agrandissant, comme fière de ce qu’elle venait de dire.

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