Chapitre 71 : Des derniers instants à deux

ShiroiRyu
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Chapitre 71 : Des derniers instants à deux

« Hum … Kéran ? Montre-moi voir un peu tout ça. Retire ton haut. »

« Que … Que … Quoi ? Comment ça ? Retirer mon haut ? Pourquoi Katérina ? Hein ? Hein ? S’il te plaît, dis-moi pourquoi et ensuite, je verr… »

Elle plaqua l’adolescent contre un arbre, le forçant à enlever tous ses habits sur son torse alors qu’il rougissait violemment. Qu’est-ce qui lui prenait ? Elle devenait folle encore une fois ? Hey hey hey ! Qu’elle le … Elle cracha subitement sur l’une des deux lignes de sang sur son torse, passant deux doigts dessus alors qu’il gémissait de douleur.

« Non, ma bave n’est pas capable de soigner, imbécile. » répondit-elle avant même qu’il n’ouvre la bouche. Il n’avait même pas parlé ! « Je vais juste éviter que ça s’infecte encore plus … Donc, on va essayer de nettoyer tout ça avant que tu ne rentres. Y a peut-être un ruisseau ou un truc du genre dans le coin. Suis-moi. »

Bien sûr qu’il la suivait. C’était juste un peu étonnant de la part de Katérina de faire une telle chose … mais pas forcément déplaisant. Il accompagna Katérina qui lui demanda de garder ses vêtements dans ses mains. Ça ne servait à rien de les remettre si c’était pour les retirer quelques minutes plus tard.
Après une petite marche dans la forêt, ils trouvèrent une clairière où s’écoulait un ruisseau qui devait à peine avoir une quinzaine de centimètres de profondeur. Elle y trempa les pieds, ayant retiré ses deux talons juste quelques instants avant.

« Bon … Elle est un peu froide alors tu évites de faire la tafiole … Enfin, ce que tu fais d’habitude, c’est compris Kéran ? »

« D’accord, d’accord. Je vais me comporter comme un vrai « mâle ». »

Il avait répondu avec un petit rire aux propos de l’adolescente, celle-ci haussant un sourcil avant de lui projeter de l’eau sur le torse. Il poussa un cri de surprise alors qu’elle reprenait avec un léger sourire :

« C’est bien ce que je disais … Une tafiole, Kéran. Une tafiole. »

« MAIS C’EST FROID ! » s’égosilla l’adolescent alors qu’elle s’approchait de lui, passant sa main le long de son torse. Voilà qu’il se remettait à trembler alors qu’elle passait ses doigts autour des deux blessures, soufflant :

« Ça risque de rester pendant quelques jours ça … Mais je ne pense pas qu’il y a de quoi avoir une cicatrice non plus. »

« Katérina … Et ta blessure à la hanche ? Car tu as été attaquée aussi non ? Et ta blessure au front ? Est-ce que tu es sûre que ça va ? Tu me le dis hein ? »

« Arrête de te préoccuper de moi ! Comme je suis possédée, l’autre boulet est obligé de régénérer mon corps s’il veut le garder. C’est pourquoi moi, dès demain, ça sera complètement disparu. » répliqua-t-elle avec une petite pointe d’agacement.

Ah bon ? Y avait donc pas que des mauvais côtés alors à être … possédé. M’enfin, il aurait quand même préféré qu’elle ne le soit pas. Elle lui demanda de s’asseoir sur la pierre de grande taille pas trop loin du ruisseau alors qu’elle plongeait ses deux mains dans l’eau, formant un bol. Pourtant, l’eau glissa entre ses doigts, s’écroulant dans l’herbe. Elle recommença une deuxième fois puis une troisième fois avant de s’énerver.

« Euh … Si tu veux Katérina, j’ai … »

« Si tu me dis que tu as un bol, je te promets que je te l’enfonce dans le crâne pour ne pas me l’avoir filé avant. Fais gaffe alors à ce que tu vas dire. »

« Non … C’est pas vraiment ça … Mais si tu veux une serviette ou un tissu … Il y en a dans mon sac hein ? Enfin bon … Ce n’est pas le meilleur et … »

Ouais, ouais. Elle lui fit un geste de la main pour lui dire qu’il ne l’intéressait pas alors qu’elle se dirigeait vers le petit sac de l’adolescent. Dedans, il avait retiré la couverture puisqu’elle servait pour le lit dans le dortoir, pour avoir deux fois plus chaud.

Elle sortit un tissu blanc qui ressemblait plus à un chiffon ou à un grand mouchoir. Elle retourna près du ruisseau, trempant le tissu dans l’eau avant de s’approcher de Kéran. Elle plaça le chiffon sur la hanche ensanglantée, le garçon aux cheveux blancs serrant les dents.

« J’ai pas mal … J’ai pas mal … J’ai pas mal … La douleur est dans ma tête. »

« Oui, bien entendu … Une tête remplie de vide. Ferme-là et souffre en silence. C’est encore pire que de t’entendre hurler de douleur. »

Ok. Ok. En fait, elle préférait quand il était muet. Il notait cela. Pourtant, il rougissait violemment en l’observant. C’était spécial non ? De voir Katérina lui faire cela. Si on lui avait dit que Katérina allait le soigner un jour, il aurait eu beaucoup de mal à y croire. Mais pourtant, c’était bien la vérité. Celle qui se déroulait devant ses yeux.

Alors bon … Il n’avait peut-être que des illusions en tête mais c’était beau de rêver. En plus, le soleil était présent dans le ciel. Quoi de plus beau non ? Il aimerait que cette journée dure éternellement. Mais ça … Il ne pouvait pas demander une telle chose.

« Katérina … Tu es obligée de partir, dis ? »

Il avait finalement murmuré cela après qu’elle ait finie d’éponger le sang qui s’était incrusté dans sa peau, accompagnée par la saleté et la poussière soulevées pendant le combat. Elle s’arrêta, se dirigeant vers la rivière pour tremper une nouvelle fois le chiffon. Elle revint vers lui, ses yeux dorés uniquement posés sur le torse de l’adolescent.

« Katérina … Tu peux me répondre, dis ? » chuchota-t-il une nouvelle fois.

« Ouais, je suis obligée. T’as pas compris la première fois ? Faut que je te le répète en quelle langue ? Ténébreuse ? Spectrale ? Je suis obligée et ça m’emmerde pas du tout de me débarrasser de toi. Bon, maintenant, tu fermes ta gueule et tu me laisses finir le boulot que j’ai commencé, c’est compris ? »

Bon, bon, compris. Il hocha la tête, observant Katérina faire son travail. Elle était quand même bien proche de lui. Et puis, ils avaient le même âge. Ca ne serait quand même pas stupide de penser comme ça non ?
Il y avait juste … la personnalité de l’adolescente. Il ne savait pas comment la prendre. Il ne savait pas comment réagir par rapport à elle. Elle était si spéciale … si différentes des autres filles. Il nageait en pleine confusion par rapport à ses propos, à ses actes, à tout ce qui l’entourait. C’était ainsi qu’il la voyait.

Et même si elle était possédée … Ca ne changeait rien à ce qu’il pensait d’elle, au fait qu’il était un peu attiré par elle. Elle termina son travail, poussant un profond soupir avant de s’éponger le front avec le chiffon ensanglanté. Il s’écria :

« HEY ! Tu vas te salir, Katérina ! Il n’est plus propre ! »

« Merde, c’est que du sang, tu vas pas me faire chier avec ça non plus hein ? Que je sache, tu ne vas pas me filer la malaria parce que j’ai osé m’essuyer le front avec ça ? »

« Non mais … Si tu veux, tu aurai pu prendre mon haut. Même si ce n’est pas plus propre dans le fond. » bredouilla l’adolescent.

« Ouais bien entendu, d’ailleurs, il va être chouette ton haut avec la petite déchirure. Je suis sûre que tu vas attirer des poulettes de cette manière. Ça va te donner un petit côté mauvais garçon dont t’as terriblement besoin. » répondit Katérina avant de jeter le chiffon dans ensanglanté dans le sac de Kéran. Ça ne servait à rien de le garder en main.

Et maintenant ? Qu’est-ce qu’ils faisaient ? Elle lui signala qu’il valait mieux qu’il bronze en attendant que ça sèche. Il pourrait aussi remettre son haut et ça sècherait tout seul non ? Pourtant, l’adolescente vint se coucher dans l’herbe, ses pieds barbotant dans l’eau. D’ailleurs, même son pied gauche était bandé.

Il vint se placer à côté d’elle, se mettant assis tandis qu’elle observait le ciel. Il commença à faire de même, un sourire aux lèvres. Sans ces horribles nuages noirs, le soleil était magnifique mais un peu trop aveuglant. On ne pouvait pas le regarder trop longtemps sinon, cela faisait mal aux yeux. Mais il faisait tellement chaud et bon que c’était quand même plus que spéciale comme sensation.
« Katérina … Dis … Ces bandages, c’est quoi ? »

« Rien du tout, arrête de poser des questions, fermes-là et endors toi. On bouge d’ici une heure ou deux. Toute façon, on a tout notre temps. »

« Je voulais juste savoir … Car bon, tu ne les retires jamais même quand tu vas te laver. » murmura l’adolescent avec lenteur.

« Oh putain … J’en étais sûre alors ! Tu m’observes pendant que je me lave ! Espèce de petit pervers ! » s’écria Katérina sans pour autant bouger de sa position. Il répliqua aussitôt :

« Mais non ! Quand tu reviens, tes bandelettes sont toujours trempées ! »

« Ouais ouais … Peut-être … Peut-être. »

Elle avait fini par s’arrêter de crier, fermant les yeux avant de se pencher sur le côté, lui tournant le dos. De toute façon, s’il l’avait réellement vue, il ne serait déjà plus là. Elle le savait parfaitement. Au fond d’elle, ce n’était pas la voix de cet être qui la tourmentait, c’était ses propres pensées.

Ses propres paroles … Elle sentit que Kéran s’affaissait dans l’herbe à son tour, couché sur le dos. Il valait mieux pour elle qu’elle ne le regarde pas, cela serait tout simplement se faire du mal, beaucoup plus de mal qu’elle ne l’aurai cru. Mais si elle faisait une telle chose, c’était pour son bien. En fait, maintenant qu’elle y réfléchissait, il y avait quelque chose de très dérangeant depuis plus d’un mois.
Elle n’avait pas réellement fait d’attaque sexuelle sur l’adolescent. Pas d’attaque au point … d’être excitée elle-même par la situation. Est-ce qu’elle avait fini par se lasser ? Ou alors par se dire qu’il valait mieux arrêter ça ? Pourtant, elle continuait de le titiller mais … aucune excitation sur son propre corps. Oh, elle savait bien qu’il avait bandé plus d’une fois et s’était branlé plutôt souvent à cause de ça mais elle ? Elle ? Et bien rien du tout.
Pourquoi est-ce que ça la tourmentait ? Car elle avait fini par comprendre que tout cela n’était qu’un mensonge par rapport à son propre corps ? Qu’elle devait plutôt se rappeler la monstruosité qu’elle était réellement ? Peut-être … Peut-être … Il n’y avait aucune chance réelle que Kéran accepte cela. C’était tout simplement impossible. Aucun être un tant soit peu sensé et rationnel accepterait ce qu’elle était.

Une heure passa, puis une seconde. Finalement, elle se réveilla la première, le visage de Kéran à quelques centimètres du sien. Elle écarquilla les yeux, un peu étonnée de cette position sans pour autant paraître gênée. Elle resta ainsi pendant quelques instants, étudiant le visage de l’adolescent qu’elle avait en face d’elle.

« Vraiment quelle tête de con ce type. Il donne envie à ce qu’on le baffe. »

Pourtant, ça ne la démangeait pas contrairement à d’habitude. Elle s’était mise assise, attendant que l’adolescent se réveille, chose qui ne tarda pas. Il la salua d’un petit sourire amical et tendre, lui demandant si cela faisait longtemps qu’elle était réveillée.

« Arrête tes conneries et tes paroles de dragueur. Bouge ton cul et on retourne à ton Enceinte. Là-bas, on se sépare après que tu aies terminé ta mission. »

« Pfff … Dire que je dormais vraiment bien et voilà le réveil … »

Il marmonna cela avec un petit peu de dépit alors qu’elle haussait les épaules. Qu’est-ce qu’il croyait ? Que ça lui plaisait ? Même pas en rêve. Elle en avait pas rien à foutre, contrairement à d’habitude, c’était pas ça du tout … C’était différent ! OH PUTAIN ! QU’IL ARRÊTE DE LA TOURMENTER !

« BORDEL ! LÂCHEZ-MOI ! » hurla t-elle avec rage avant de prendre la main de Kéran dans la sienne. « TOI ! TU ME SUIS ! JE TE RACCOMPAGNE ! TU RENDS TA MISSION ET TE TU BARRES DE MON EXISTENCE POURRIE ! »

Sans lui laisse le temps de répondre, le traînant derrière elle, l’adolescent l’emmena à travers les arbres, jusqu’à ce qu’ils se rapprochent inexorablement du bâtiment principal de l’Enceinte aux Esclaves. Elle avait tellement envie de se débarrasser de lui ? Pourtant, elle le serrait avec une telle force … qu’il avait plutôt l’impression qu’elle ne voulait pas le lâcher.
Il se faisait encore des idées, ce n’était pas possible autrement. Katérina en avait rien à faire de son existence. C’était aussi simple que ça. Ah … Enfin bon, peut-être que là encore, il se faisait des illusions et que ce n’était pas le cas. Mais est-ce qu’il allait regretter ça ? Car c’était du tout ou rien quand il allait parler au chef de l’Enceinte.

D’ailleurs, le bâtiment était maintenant à portée d’après ce qu’il remarquait. Ah … Bon … Un peu de courage car il n’était pas sûr de la réaction du chef de l’Enceinte après qu’il ait fait son rapport. Alors qu’ils étaient devant l’entrée, il se demandait si Katérina allait le lâcher, l’adolescente semblant nager en pleine indécision.

« Katérina … Tu veux venir avec moi ? En plus, ça te concerne. »

« Ouais mais non … J’attends juste que tu aies terminé et ensuite, je me barre. »

Elle relâcha finalement sa main tandis qu’il soupirait. Soit … Comme elle voulait. Il comprenait son choix. Il pénétra dans le bâtiment, saluant brièvement les deux gardes avant de se diriger à travers les couloirs jusqu’à la salle où se trouvait habituellement le chef. Il demanda à le voir, l’autorisation lui étant donné. Quelques instants plus tard, il était face à Ranor, l’homme le regardant longuement.

« Tu n’as pas besoin de parler, la disparition même éphémère des nuages dans le ciel m’a déjà donné la finalité du combat que tu as mené. »

« Je me doutais bien que vous seriez au courant et que vous comprendriez, chef … mais je ne suis pas là uniquement pour vous parler de ça. »

« Hum ? Que veux-tu donc ? Une récompense ? Tu peux me la demander, tu as quand même réussi à abattre une créature plus que puissante, même si tu n’étais pas tout seul. »

« C’est autre chose … Enfin, je pense qu’il vaut mieux que je vous le demande dès maintenant et je vous expliquerais par contre le problème avec cet Absol. »

Hum ? Cela était intriguant de la part de l’adolescent. Il semblait avoir quelque chose qui le dérangeait et pourtant, il ne parlait pas. Pourquoi cela ? Qu’est-ce qui le bloquait ? L’adolescent prit plusieurs fois une profonde respiration, comme pour chercher les mots à dire alors qu’ils étaient si simples. Finalement, d’une voix forte, il annonça :

« Je veux quitter l’Enceinte aux Esclaves, chef Ranor. »

« Hum ? Tu veux quitter … l’organisation ? » répéta l’homme alors qu’il hochait la tête positivement. Il avait réussi à le dire.

C’était la décision qu’il avait prise après que Katérina lui avait dit qu’ils se sépareraient. Maintenant, il n’y avait plus besoin de cela … si elle était d’accord.

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