Chapitre 94 : Dégoûté et en froid

ShiroiRyu
Les derniers articles par ShiroiRyu (tout voir)

Chapitre 94 : Dégoûté et en froid

« Qui est cette personne, Sélia ? » demanda calmement l’homme en face de Kéran.

« Je crois … que je dois vous présenter. Kéran, voilà monsieur Elian. Monsieur Elian, voilà Kéran. Si tu ne le savais pas encore, Kéran, tu te trouves en face du chef de la Sainte Alliance. » annonça la jeune femme aux cheveux bleus.

« Enchanté de te rencontrer. Il faut dire que le jeune Kéran est quelqu’un de très connu dans la Sainte Alliance mais plus car Sélia n’arrête pas de parler de toi. » déclara Elian, tendant sa main vers Kéran qui restait méfiant.

Cet homme était celui qui s’occupait … Qui s’occupait des Créateurs Elémentaires, n’est-ce pas ? Alors pourquoi est-ce qu’il prendrait la main d’un criminel hein ? Il n’était pas stupide à ce point mais … Pour ne pas faire perdre son travail à Sélia, il valait mieux ne pas prendre de risques. Il serra la main d’Elian avant de répondre :

« Ce n’est pas grand-chose … Il n’y a pas beaucoup à dire à mon sujet. Enfin, pas autant que Sélia aimerait en parler Je pense qu’elle en fait beaucoup trop par rapport à ma personne. »

« Je ne sais pas … Mais il semblerait que tu sois bien spécial pour elle. C’était donc pour cela que Sélia était partie du reste du groupe. Je vois, je vois, Sélia, tu as mon autorisation pour passer un peu de temps. De toute façon, la situation ne peut pas nous échapper maintenant que nous sommes là. D’ailleurs, Kéran, Sélia n’en a jamais parlé mais que fais-tu actuellement ? Tu es dans une organisation ? »

« Je ne crois pas non … » répondit en jeune homme en tentant de garder son calme.

« Hum, si cela t’intéresse, tu pourrais envisager de nous rejoindre. Si tu es aussi doué et motivé que Sélia le prétend, je suis sûr que tu trouveras ta place parmi nous rapidement. »

Kéran posa son regard sur Sélia, fronçant les sourcils. Ce n’était pas à cause de la remarque qu’elle avait faite par rapport à lui à ses collègues de travail. Non, c’était plutôt que son chef comme elle, espérait une chose impossible.

« Malheureusement, je ne peux pas rejoindre la Sainte Alliance. J’ai des préoccupations plus … personnelles dont je dois m’occuper. » déclara Kéran en restant le plus neutre possible.

« Dommage, c’est vraiment dommage mais je ne peux pas te forcer à cela. Sélia, j’ai une petite question, est-ce que tu veux bien me dire où se trouve le reste de la Sainte Alliance ? »

« Nous avons décidé de nous donner rendez-vous à l’auberge. Ils doivent donc se trouver là-bas. Suivez les panneaux pour vous guider. »

« D’accord, merci bien. Bon, je te laisse avec ton jeune ami voir un peu plus que ça d’après ce que j’ai cru comprendre. Au revoir, Kéran, enchanté de t’avoir rencontré. » dit l’homme avant de s’éloigner, le laissant seul avec Sélia.

« Ouais … Ouais … Bien entendu. Au revoir, au revoir. » marmonna Kéran avant de partir sans même un regard vers Sélia. Aussitôt, elle poussa un cri pour le rejoindre.

« Kéran ! Kéran ! Attends un peu ! Kéran ! KERAN ! »

« Ca ne sert à rien de discuter entre nous, Sélia. Tu le sais aussi bien que moi que ça ne mènera à rien du tout alors autant ne pas perdre de temps et … »

« Je veux que l’on parle, je veux que l’on mette les choses au clair ! Suis-moi s’il te plaît … Tu veux bien me donner une nouvelle chance ? »

Une nouvelle chance ? Pourquoi est-ce qu’elle parlait comme ça ? Il s’immobilisa, la regardant longuement pour voir si elle était sincère. Il savait pertinemment que c’était le cas mais il avait toujours du mal, beaucoup de mal à la croire.

« … … … C’est bien la dernière chose que l’on fera entre nous. »

Il avait dit cela sur un ton sec alors qu’elle le regardait avec stupéfaction. Elle parut attristée mais évita de trop en montrer, ne faisant qu’hocher la tête positivement avant de prendre les devants. Il la suivait à quelques mètres de là, Swar reprenant la parole :

« Kéran … Je t’ordonne de te comporter correctement envers elle. »

« Ça sera le cas, tu n’as pas besoin de me l’ordonner, loin de là. » répondit sèchement une nouvelle fois le jeune homme.

« Et évite de m’adresser la parole sur un ton irritable, je risquerai de très mal le prendre la prochaine fois, est-ce bien compris, Kéran ? »

« Oui, oui … Mais je pensais que tu détestais Sélia et Katérina ? » demanda le jeune homme, un peu étonné du comportement de son épée depuis quelques temps.

« Puisque tu sais que je suis une femme dorénavant, tu dois bien comprendre que mon but est d’éviter qu’elle ne souffre par ta faute. Est-ce bien compris ? »

« Oui oui … J’ai parfaitement compris. Tu te répètes par contre, Swar. »

Il le fallait bien pour que cela rentre dans le crâne de l’adolescent. Et ça, c’était beaucoup moins sûr au fur et à mesure que le temps s’écoulait. Sélia s’arrêta à une autre terrasse, invitant le jeune homme à faire de même.

« De quoi est-ce que tu veux parler ? Je pensais que nous avions terminé la conversation auparavant, non ? Alors pourquoi est-ce que tu veux continuer à me parler, Sélia ? »

« Car j’en ai la possibilité ? Car tu es l’unique personne qui est importante pour moi ? Tu ne comprends pas que je n’ai pas d’autre famille que toi, Kéran ? »

« … … … Oui, c’est vrai. J’ai été un peu vache sur ce coup. Nous pouvons parler tous les deux. » répondit le jeune homme en la regardant.

Pourquoi est-ce qu’elle paraissait intimidée par lui ? Ce n’était pas dans ses habitudes d’avoir une telle réaction non ? Peut-être qu’il devait revoir son jugement au cas où.

« Kéran, je veux que tu sois au courant d’une chose … Mais je le veux vraiment et … »

« D’abord, je pose ma question : Sélia, même si tu es au courant pour les Créateurs Elémentaires, est-ce que tu as déjà fait partie de ces derniers ? Participer à l’une de ces … excursions qui les font devenir ce que tu désires ? »

« NON ! PAS DU TOUT ! KERAN ! Je ne suis pas comme ça ! Je ne suis pas sanguinaire ! Je sais bien d’où ça vient mais ça ne veut pas dire que j’y participe ! Dans une même organisation, il existe plusieurs types de personnes ! »

« Comme des fous psychopathes et sanguinaires avec des idées absurdes ? »

« Je n’aurai pas dit cela comme ça mais c’est un peu ça … Enfin … Tu vois où je veux en venir, Kéran ? » murmura Sélia, posant sa main sur la sienne.

Il fixa de ses yeux la main de Sélia. Pourquoi un tel geste ? Elle voulait vraiment se faire pardonner n’est-ce pas ? Bon … Il avait été vraiment très radical auparavant, il devait le reconnaître. Voilà qu’il s’en voulait de son comportement.

« Et ensuite ? Qu’est-ce que ça changera, Sélia ? Qu’est-ce que ça changera entre nous deux, hein ? J’ai besoin de savoir … J’ai besoin de savoir ce qui va se passer. »

« Je vais ignorer ce que tu as dit au sujet des Créateurs Elémentaires, voilà tout. Du moins, je vais faire comme si je ne savais rien. Je ne veux pas que tu sois en danger et … »

« Sélia … Un peu de sérieux, entre nous deux. Sincèrement, tu penses vraiment que je suis en danger ? » demanda-t-il sur un ton neutre au possible bien qu’il pouvait paraître vaniteux.

« Tu as tellement changé depuis ce dernier mois, je ne sais pas ce qui s’est passé, j’aimerai tellement le savoir. J’aimerai tellement connaître cela mais je ne suis pas sûre que ça soit possible. Kéran, est-ce que tu veux bien tout me raconter s’il te plaît ? »

« Non, je ne préfère pas. Tu n’as pas besoin de savoir, Sélia. Tu ne veux pas savoir. » murmura le jeune homme en la regardant de ses yeux bleus.

Qu’est-ce qui … s’était passé durant ce dernier mois ? Elle savait que c’était cela qui avait changé radicalement le jeune homme. Lui qui était aussi joyeux et tendre auparavant semblait si froid maintenant envers elle. Elle ne voulait pas qu’il change. Elle ne voulait pas.

« Kéran, ne change pas … Ne change plus. Redeviens comme tu étais auparavant. »

« Ce n’est maintenant plus possible, Sélia. Il est bien trop tard pour cela. Il faudra que tu te l’inscrives. Dorénavant, tout cela est gravé en moi … à vie. »

Gravé en lui ? A vie ? Qu’est-ce qu’il voulait dire par là ? Elle tentait de lire dans les pensées du jeune homme mais c’était peine perdu. Il restait imperturbable et impassible. Impossible de savoir ce qui se tramait dans sa tête, ce qui s’était passé. Pourtant, elle avait besoin de savoir … Elle avait besoin de connaître. Pourquoi ne lui ouvrait-il pas son cœur comme auparavant ? Elle commençait à être sérieusement peinée.

Voilà que les secondes s’écoulaient, le jeune homme tapotant du doigt sur la table comme pour attendre le reste des paroles de Sélia. Les rôles avaient été inversés depuis le début de leurs retrouvailles. Dorénavant, c’était lui qui donnait l’impression d’être le grand frère et elle la petite sœur candide et gênée.

« Sélia ? Nous n’avons plus rien à nous dire, alors ? »

« Je … Si … Il y a surement quelque chose à dire … Il ne faut pas que l’on se sépare de la sorte, Kéran. Surtout pas ! »

« Est-ce que c’est vraiment si important que ça … toi et moi ? Je pensais que ça n’était pas le cas après ce qui a été dit et révélé. »

« Kéran, ne met jamais en doute mes sentiments pour toi. » déclara la jeune femme avec sincérité et sérieux, se redressant comme pour bien affirmer ses propos.

« Je n’ai jamais pensé cela … Mais je pense qu’il vaut mieux que nous ne parlons plus pendant quelques temps, le temps … que je mette un peu d’ordre à mes idées. »

« Si c’est ce que tu estimes être le mieux, je comprends et c’est peut-être mieux ainsi … Mais je ne t’oublierai pas contrairement à toi. Je ne suis pas sûre dans le fond que ça soit réciproque. Peut-être que toutes ces années n’ont au final servi à rien … si tu me juges aussi rapidement. »

Ils n’avaient rien commandé, ils n’avaient rien bu et elle partait déjà de son côté, marchant d’un pas lent comme pour être arrêtée. Dans un murmure, l’épée s’adressa à Kéran qui restait assis à fixer la jeune femme en armure.

« Kéran ? Est-ce que tu es un imbécile ? Tu viens de rater la chance d’avoir une petite amie. »

« Qu’est-ce que tu racontes encore, Swar ? Il n’est pas question de ça entre Sélia et moi. N’essaie pas de te mêler d’une conversation à laquelle tu n’as rien compris. »

« Ce que j’ai cru comprendre, c’est qu’elle t’a déclaré que tu étais bien plus importante pour elle que le reste du monde et toi, tout simplement comme un imbécile, tu la rejettes sans même chercher à dialoguer réellement entre elle. Comme elle l’a si bien dit, peut-être que dans le fond, elle ne compte pas autant pour toi. »

« Peut-être … Peut-être que c’est ça … Je ne sais pas vraiment … Je n’ai pas réfléchit à la question, je ne sais pas vraiment … Peut-être que … »

Peut-être qu’il commettait quand même une énorme bêtise. Sélia vivait dans la réalité, contrairement à lui qui avait vécu dans le mensonge pendant des années ! Mais là, il connaissait maintenant la vérité. Entre eux deux, il n’y aurait alors plus de mensonges.

« J’ai été trop hâtif. Je dois l’arrêter avant qu’il ne soit trop tard. »

« Elle n’est pas si éloignée que cela … Elle ne fait qu’attendre le moment où tu iras la rattraper. Ne perd donc pas trop de temps et vas-y. » déclara l’épée avant de se taire définitivement pour les prochaines minutes, Kéran se redressant.

« Sélia ! SELIA ! » hurla-t-il, se cassant à moitié la figure sur la table.

Aussitôt, la jeune femme se retourna vers lui, les yeux un peu rougis bien qu’aucune larme ne s’était écoulée. RAH ! Même s’il pouvait lui en vouloir de ne pas lui avoir dit la vérité pendant des années, il ne pouvait pas oublier tout le reste ! Il ne pouvait pas oublier tout ce qu’elle avait fait aussi de son côté !

Il revint vers elle, la jeune femme ne disant plus rien, regardant autour d’eux alors que quelques têtes les observaient. Comme il avait crié, cela était plus que normal. Enfin bon … Les personnes attendaient une réaction ou des paroles bien fortes. Ce fut la réaction de Sélia qui arriva la première, la jeune femme criant :

« Kéran ! Oh mon Kéran ! Mon petit Kéran à moi ! »

Hé Ho ! Hey ! Il se retrouva puissamment enlacé par la jeune femme, écrasé dans sa poitrine recouverte par le métal. Ca faisait atrocement mal là ! Il allait avoir beaucoup de mal à parler ou à se retirer mais il sentait les petits tremblements dans les mains de Sélia.

« Je savais bien que tu n’étais pas totalement parti. Si … Si tu m’avais laissée toute seule encore plus longtemps, je t’aurai perdu à jamais. »

Mais non, mais non. Quand même pas perdu à jamais. Ce n’était pas l’impression … Si ? C’était ça qu’il avait donné comme impression ? Oh punaise … C’était alors normal qu’elle s’inquiète autant. Ce n’était pas du tout voulu ! Ce n’était pas du tout cela qu’il désirait !

Il la laissa l’enlacer pendant pas mal de secondes car visiblement, elle ne comptait pas la lâcher. Même s’il lui en voulait terriblement, ce n’était pas une raison pour la rendre malheureuse. Même s’ils étaient en froid et qu’il était surement impossible de retrouver le bonheur perdu entre eux deux, il pouvait toujours essayer d’avoir une nouvelle relation entre Sélia et lui. Enfin, peut-être pas dans le sens que Swar parlait.

« Kéran … Kéran … Hum … Kéran, tu m’as fait terriblement peur. Même si tu es au courant de tout ça, ça ne change rien pour moi. Ça ne change rien … Ne me trahis pas … C’est tout ce que je te demande, Kéran. » murmura la jeune femme aux cheveux bleus tout en le libérant.

« Je ne compte pas trahir quelqu’un, loin de là. Ce n’est pas mon genre et ce n’est pas dans mes intentions même si j’ai aussi des choses à te dire … Mais il vaut mieux attendre quelques temps. » déclara le jeune homme alors qu’elle le regardait avec interrogation. Mais au moins, elle était « pardonnée », n’est-ce pas ?

Il hocha la tête pour répondre que oui, Sélia venant l’embrasser longuement sur les joues avant de lui caresser le sommet du crâne. Il lui en fallait vraiment peu n’est-ce pas pour qu’elle soit heureuse ? Mais c’était tant mieux … si tout avait été réparé. En même temps, il lui signalait quand même qu’il valait mieux qu’ils ne se voient pas trop pendant quelques temps car sinon, la Sainte Alliance serait suspicieuse et pourrait croire qu’elle avait épaulé le jeune homme à faire ceci. Même si ça ne lui plaisait pas, elle comprenait parfaitement ce qu’il voulait dire par là.

« Prend bien soin de toi. » répondirent les deux jeunes gens avant de se séparer.

Laisser un commentaire