L’Ombre

ShiroiRyu
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L’Ombre

Je suis L’Ombre. Si tel était mon réel nom, je serais bien ridicule mais je ne suis pas à prendre à la légère. Créateur de cauchemars, manipulateur de rêves, envahisseur de l’obscurité, tous mes actes se déroulent dans les nuits. Je n’aime pas le jour, je hais ce monde de lumière où tous ces êtres vivants prennent plaisir à y régner. Je suis détesté et rejeté de tous.

*Pourquoi ai-je fait ça ?*

Ce fut l’unique question que je me posais à cet instant. L’un des rares pokémons à pouvoir prendre une forme humaine. Je suis unique en ce monde, nul ne me ressemble et nul ne peut tenter de m’imiter sans prendre d’immenses risques. Nombreux sont ceux capables de dévorer les rêves de leurs adversaires, moi seul suis capable de transformer ces rêves si paisibles en d’horribles cauchemars. Moi seul suis capable de tuer quiconque dans ses rêves. Je vais et je viens dans ce monde à la recherche d’une nouvelle proie. Humain, Pokémon, qu’importe la nature vivante de ce qui se trouve en face de moi, je ne lui laisse aucune chance.

*Etait-ce prémédité ? Etait-ce que je voulais réellement ?*

Plus le temps s’écoulait et plus je me demandais si je n’avais pas commis une bêtise. Intérieurement, je ne regrettais pas ce que je venais d’accomplir. Je ne savais pas pourquoi mais peut-être que celui qui était à l’origine de mon existence avait décidé dès le départ toute cette histoire. C’était vrai…A quoi se résumait mon existence ? A des mensonges, des tromperies, des manipulations. Je créais des rivalités entre des frères, je fomentais des assassinats dans les rêves d’hommes influents, j’étais à l’origine de nombreux conflits destructeurs et meurtriers.

*Comment en suis-je arrivé là ? Pourquoi est-ce… comme cela ?*

Jamais je n’aurais dut réagir de la sorte. Jamais je n’aurais pensé en arriver là un jour. Ce jour… Le Soleil… Cet astre brûlant que je hais. Un pokémon en était responsable et je n’avais pas hésité à aller l’affronter un jour. Quelle cuisante déculottée je m’étais pris. Condamné à vivre dans un océan de ténèbres, à l’ombre des arbres. Ces pauvres enfants humains qui pensaient voir leurs propres ombres qui prenaient vie. Tsss… Ces enfants humains… C’était ceux que je préférais envahir. Ils étaient si malléables, si faciles à pénétrer.

*Combien de temps avait-je attendu une telle chose ?*

Trop d’années, trop de décennies, trop de siècles… Je ne pouvais pas compter cette période. Le temps de mes cauchemars ? Je pouvais les faire durer pour l’éternité… Un cauchemar éternel et impossible à soigner, un cauchemar que nul n’aimerait connaître. Pourtant, tout le monde savait mon existence, l’engeance du Malheur et du Désespoir. Voilà ce que j’étais et sous quel nom j’apparaissais. Encore, fallait-il qu’ils me voient. Rares étaient les êtres vivants ayant déjà vu l’une de mes apparences.

*Et sa raison ? Pourquoi avoir accepté ça ? Etait-ce son choix ?*

C’est vrai… Dans ce monde, il existait toujours une personne qui vous ressemble… Un jumeau qui était votre copie exacte. Néanmoins, dans d’autres cas, il y avait ce qu’on pouvait appeler un opposé : Un être qui était l’extrême contraire de votre personne, jusqu’à votre existence primaire. Moi-même, je n’ai pas de jumeau… simplement un être opposé à moi, un être dont je me serais passé volontiers. Cet être était capable de contrecarrer mes cauchemars et mes manipulations. Cet être était toujours à ma poursuite, telle mon Ombre. Que c’était spirituel de penser une chose de ce genre : Le manipulateur des Ombres ayant peur de sa propre Ombre. Oui, j’avais peur… Non pas de la puissance de mon opposé mais d’autre chose… de ce qu’il était capable de faire. Chaque nuit était une perpétuelle fuite pour lui échapper, chaque nuit était une perpétuelle bataille pour savoir si j’allais réussir à disparaître avant qu’elle ne m’attrape.

« Cresselia, encore toi ? Arrête donc cette futile poursuite. »

« Je n’aurais de cesse de mettre un terme à cette chasse tant que tu n’arrêteras pas tes méfaits. »

Combien de fois avait-je répété ces paroles ? Combien de fois avait-je écouté les siennes ? Cette voix féminine qui provenait de cette créature avec un croissant de lune sur la tête. Quel être ridicule. Toujours à vouloir le bonheur et la joie pour les êtres vivants peuplant ce monde. Et ses yeux améthyste qui m’observaient avec colère à chaque fois qu’elle me voyait, une colère qu’elle dissimulait dans ses paroles. Encore une fois, j’avais commis le crime de m’approprier le rêve d’un humain pour le transformer en un cauchemar. Encore une fois, elle s’était mise en travers de ma route. Elle se tenait devant moi, comme un geste que l’on accomplissait au quotidien :

« Ne te fatigue pas inutilement. Qu’importe ce que tu accompliras, tu ne pourras réussir à m’arrêter. Tu es faible et tu le sais. »

« Ma faiblesse est une force. Je suis porteuse d’espoir pour ces êtres vivants. Tu sais de qui je parle… Ceux qui sont privés de leurs rêves qui leur permettent d’obtenir un répit pour reposer leurs corps. Je suis là pour eux, telle est la raison de mon existence, Darkrai. »

« Stupide Cresselia, tu ne veux donc pas comprendre de ne pas te mettre en travers de ma route. Je vais te montrer ce qu’il en coûte de vouloir me gêner. »

« Qu’est-ce que tu veux faire, Darkrai ? »

« Ceci… Un concentré de pures ténèbres. Je vais te donner un aperçu de ce que ces êtres subissent pendant mon message. »

« Cela ne sert à rien, tu ne peux m’affecter. »

C’était ce qu’elle avait dit alors qu’une sphère était apparue entre mes deux mains griffues de noir. Elle pensait vraiment que j’allais l’emporter dans un cauchemar ? Non… Ce n’était pas ce que je voulais, j’avais une autre idée en tête. L’anéantir ne me servirait à rien, ce n’était pas là mon but. Des runes étaient apparues autour d’elle : Elle s’était mise à penser que j’allais l’endormir mais ce n’était pas le cas. Ma sphère noire l’avait frappé de plein fouet, la faisant tomber au sol alors qu’elle gémissait de douleur. Je m’étais approché d’elle, sans sourire, sans changer de timbre de voix, je ne suis pas apte à montrer mes sentiments facilement.

« Dorénavant, ne t’approche plus de moi. La prochaine fois, je ne serais pas aussi gentil. »

Elle ne m’avait pas répondu, affaiblie par l’attaque je venais de lui lancer. Elle était frêle, si chétive… et si fragile. Ses yeux améthyste et larmoyants s’étaient tournés vers moi. Des yeux exprimant une tristesse que je ne lui connaissais pas. Je m’étais éloigné sans un mot, disparaissant dans le sol, l’un de mes nombreux moyens pour me mouvoir. Ce fut la première et unique fois où j’avais osé levé la main sur elle…Cette créature nommée Cresselia.


Plusieurs semaines s’étaient écoulées et je n’avais plus de traces d’elle. Je surveillais mes victimes pendant de nombreuses heures, attendant de voir une pokémon aux anneaux violets autour d’elle. Elle n’était pas venue… Avait-je été trop fort dans cette attaque ? Je m’étais posé la question et j’avais annulé les cauchemars que j’avais établis sur les quelques humains de cette ville isolée. Où était-elle passée ?

Je ne le savais pas et je l’oubliais au fur et à mesure des mois qui passaient. J’accomplissais mes noirs desseins sans que nul ne me gêne. Je ne me cachais plus, apparaissant complètement dans les rêves de mes victimes. Cette fois-ci, je marquais mon passage, devenant de plus en plus dangereux au fil du temps. Si elle ne se dépêchait pas de réapparaître le plus tôt possible, tout allait très mal se terminer. Finalement, elle était revenue après plus d’une année, elle était en pleine forme et se tenait devant moi.

« De retour ? Tu n’as donc pas compris la leçon. »

« Pourquoi ? Pourquoi commets-tu toutes ces choses affreuses ? »

« Car c’est la raison de mon existence, celle qui donne un sens à ma vie. Si je ne commettais pas ces choses, qui s’en chargeraient ? Il faut bien un être maléfique dans cette histoire, je suis cet être maléfique. N’as-tu donc point remarqué mon corps ? Je ne suis pas fait de chair et de sang comme toi. »

« Ne masque pas ton apparence sous ces paroles, tu n’es pas un fantôme. Tu devrais arrêter avant qu’il ne soit trop tard. Un jour, tu franchiras les limites interdites et nul ne pourra t’accorder son pardon. »

« Quelles belles paroles que voilà. Penses-tu sincèrement que je vais les croire ? Qui pourrait se mettre en travers de mon chemin ? Toi ? Tu as remarqué ton manque de puissance. Tu ne te risquerais pas à recommencer une seconde fois sauf si tu es folle… »

« Je recommencerais autant de fois que possible. Ne comprends-tu pas que tu fais souffrir des familles par tes gestes ? En quoi cela te satisfait de faire cauchemarder des jeunes enfants qui n’ont rien demandé ? A cet âge, il faut les laisser vivre leurs rêves. Le pire est que tu te sers de tes pouvoirs pour manipuler les hommes et les pokémons… les liguer les uns contre les autres. Je dois t’arrêter. »

« Pas aujourd’hui. Je suis fatigué de ce petit jeu. »

J’avais décidé de disparaître dans le sol, un endroit qu’elle ne pouvait rejoindre. Je n’étais pas un spectre, ce n’était pas pour ça que j’étais pour autant quelque chose de continuellement physique. Elle se trouvait toujours dans mes pattes, n’arrivait-elle pas à saisir la portée de mes paroles ? Je me demandais ce qui la poussait à toujours me suivre. Voulait-elle vraiment m’arrêter ? Se croyait-elle capable de me battre ?

Et ce qui devait arriver arriva… Moi-même, je ne savais pas pourquoi j’avais commis cet acte, pourquoi je m’étais décidé à accomplir cette chose… et pourtant… J’avais agit d’une façon plus que bizarre. Peut-être était-ce en remerciement de ce que cette humaine avait accompli pour moi ? Une mauvaise trouvaille sous la forme d’une colonie de Tyranocif et j’avais été blessé assez gravement malgré ma force. Je n’arrivais pas à le savoir mais je lui étais redevable et c’était si rare de l’être envers quelqu’un. Je l’avais déjà été…mais cela datait.
Je me chargeais de la protéger, elle et ses descendants tout en accomplissant mes vils actes sans qu’ils ne s’en aperçoivent. Je n’avais pas abandonné cette idée mais je savais que mes pouvoirs n’étaient pas forcément pour le mal. Comme je pouvais créer des cauchemars, j’étais capable de donner aux êtres vivants de formidables rêves en les berçant. AH ! Si cette Cresselia me voyait, qu’est-ce qu’elle aurait dit ? Je ne tenais pas à le savoir.
Finalement, après plusieurs siècles, je décidais de quitter cette famille, ils n’avaient plus besoin de moi et je me trouvais un peu mollasson. Je m’étais laissé aller à une vie tranquille et paisible, installé la majorité du temps sous l’ombre d’un arbre sans pour autant me montrer à ceux que je protégeais. Je devrais paraître bien ridicule à ce moment. Je n’avais utilisé qu’en de rares moments mes pouvoirs pour apaiser les rêves des personnes troublées et je n’aimais pas cela. Ce n’était pas moi.

« Darkrai. »

Tiens… Elle était encore là. Toujours dans mon dos, toujours derrière moi. Elle ne s’arrêtait donc pas ? Je me retournais pour l’observer… Elle… Ses petits yeux améthyste qui ne cessaient de se diriger vers moi. Elle tendait vers moi ses deux ridicules pattes violettes tout en disant d’une voix douce :

« Tu n’es pas foncièrement mauvais. Je sais… Je t’ai observé pendant ces décennies. Ne cache pas la nature profonde de ton être. »

« Ha… Tu étais donc bel et bien là ? Tu n’as donc vraiment pas peur de ma réaction. Tant mieux, cela sera évitera de perdre du temps. »

Ainsi, elle avait tout vu depuis le départ… Ce visage que nuls ne pouvaient connaître sauf quelques rares humains et pokémons, cette personnalité que je cachais à la majorité des êtres vivants. Et elle l’avait vu. J’aurais dut m’en douter mais je pouvais corriger tout ça. J’allais l’emmener dans un endroit qu’elle ne connaissait pas. Tout autour de moi et elle, le décor s’était mis à changer, prenant une tournure noire et vide. Il n’y avait rien… rien à part moi et elle. Elle s’était mise à légèrement trembler, regardant autour pour savoir où elle se trouvait, prenant la parole d’une voix inquiète.

« Où… Où est-ce que l’on est ? »

« Tu veux vraiment le savoir ? Je vais te le dire… »

Nul besoin de cacher la vérité, j’allais tout lui dévoiler. Je n’hésiterais pas un instant à l’engloutir dans cet endroit dont nul n’était revenu. Cet endroit était celui que je gardais précieusement en moi…Je lui souriais avant de dire :

« Bienvenue dans mon Cauchemar. »

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