Chapitre 30 : Un geste regrettable

ShiroiRyu
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Chapitre 30 : Un geste regrettable

«  Terria, mets-toi derrière moi. Regarde par la fenêtre s’il y a des gardes. »

Il avait dit cela en tremblant, étant épris de terreur alors qu’il savait que c’était sa dernière heure qui venait d’arriver. Terria s’exécuta, signalant après quelques secondes :

« Il n’y a personne, Earnos. On pourrait toujours s’enfuir et … »

« Enfuis-toi toute seule. Je vais essayer de raisonner ton père. Je vais lui faire entendre raison. Et je pense que de toute façon, ça ne sera pas possible mais enfuis-toi et … »

Il en était tout simplement hors de question ! Sans hésiter, elle se plaça à côté d’Earnos, lui prenant le bras alors que la porte de la chambre éclatait en morceaux, laissant voir l’homme aux cheveux verts, le monarque à l’allure impériale mais surtout ivre de haine.

« TERRIA ! Qu’est-ce que cela veut dire ?! JE VEUX DES EXPLICATIONS ! »

« J’aime Earnos, père. Je l’aime et il m’aime. Nous avons décidé de nous enfuir puisque tu ne nous permets pas de nous aimer librement. » dit clairement la jeune femme aux cheveux blonds, un peu effrayée par les yeux rubis de son père.

« T’aimer librement ? Tu as besoin d’un insecte fort ! D’une personne capable de te protéger en toutes circonstances ! Capable de … »

« Ce n’est pas parce que tu n’as pas pu sauver maman que ça ne seras le cas d’Earnos avec moi ! Earnos a toujours veillé sur moi, depuis des années ! Autant que toi avec maman quand vous étiez encore adolescents ! Vous me racontiez toujours cette histoire ! »

« NE PARLE PLUS DE TA MERE ! EST-CE CLAIR ?! TU VIENS AVEC … »

« Je ne peux pas accepter cette requête, roi Théor. » coupa calmement l’adolescent aux cheveux blonds alors que le roi Yanmega posait ses yeux sur lui. Earnos s’était placé devant la princesse, tendant les bras comme pour la protéger. « La princesse et moi, nous refusons de vous suivre tant que nous ne sommes pas sûrs que nous puissions nous aimer. J’aime votre fille depuis des années, je l’ai protégée pendant des années et je continuerai à la protéger, que vous le vouliez ou non. »

« Petit impertinent, comment oses-tu me parler de la sorte ? Toi ? Le fils de mon meilleur ami ! Comment as-tu osé poignarder le roi des insectes dans le dos ?! Depuis … Depuis quand est-ce que vous avez fait cela ? Depuis quand vous vous cachiez ? » demanda le roi, ses poings serrés, ces derniers commençant à se modifier.

« Cela doit faire une année … Je dirai depuis la fête des Arakdos. » murmura Earnos.

« DEPUIS UN AN, VOUS VOUS VOYIEZ ?! Depuis un an, ma petite fille s’éclipsait en douce pour venir voir un simple Dardargnan ? Ah … Ah … Ah … Elle n’est pas en sécurité. Elle n’est pas en sécurité si elle est capable encore de s’enfuir. Je ne sais pas comment elle est sortie de la chambre hier soir mais je savais où elle pouvait se rendre. Je le savais ! Je savais où elle comptait se rendre ! Ce n’était pas la première fois qu’elle se rendait ici ! »

« Et cela fait des années qu’Earnos m’aide à faire des fugues, cela fait des années que nous nous retrouvons quand nous le pouvons. Cela fait des années qu’il est à mes côtés ! Cela fait des années qu’il est auprès de moi ! Père ! J’aime Earnos et tu ne pourras rien y changer ! Ce n’est pas en tentant de me forcer à épouser une personne que je n’aime pas que tu arrangeras les choses ! Laisse-moi aimer Earnos, laisse-moi l’épouser ! Tu auras le gendre idéal ! C’est le meilleur parti possible pour moi ! Au lieu d’être en colère, tu devrais être heureux pour moi ! Et aussi pour le fils de ton ami ! »

« Ma fille … Ma fille … Amoureuse d’un faible … D’un être qui ne pourra pas la protéger. Si moi, je n’ai pas réussi à protéger Seiry alors comment est-ce qu’un simple Dardargnan le pourrait ? Comment est-ce que ça serait possible ? »

« Papa, arrête de te tracasser pour rien. Repose-toi, tu as eu un grand règne mais c’est à moi de continuer l’œuvre de maman. » chuchota l’Apireine d’une voix douce pour le rassurer.

« TAIS-TOI TERRIA ! TAIS-TOI ! Comment est-ce que tu peux dire ça ? Ta mère … Ta mère est morte parce qu’elle avait justement fait un grand règne ! Parce qu’elle avait été merveilleuse ! Comme ta grand-mère … Comme ton arrière-grand-mère, comme chacune des Apireines de ce royaume ! Toi, tu suivrais le même chemin qu’elles … Le même chemin mais je le refuse … Je refuse que ça se comme ça ! Je refuse que ça se déroule ainsi ! »

Ses deux mains étaient devenues des griffes, de dangereuses griffes pointues. Celles d’un Yanmega qui avait encore toute sa puissance malgré son âge. Il jeta un regard à la tache de sang sur le lit, poussant un hurlement de rage et de colère. Aussitôt, Earnos se plaça correctement devant Terria. Il n’avait pas ses lances mais qu’importe, il n’allait quand même pas commettre un crime envers la monarchie.

« Je ne sais pas du tout de quoi vous parlez mais je ne vous laisserai pas faire du mal à Terria. Elle a décidé de m’accompagner et je suis bien décidé moi-même à ce qu’elle me suive. »

« Tu ne la suivras pas ! Elle va revenir avec moi, elle épousera l’insecte le plus fort de ce royaume et elle sera protégée … contrairement à sa mère que je n’ai pas pu protéger. »

« Je ne peux pas vous laisser faire ça. Je suis désolé … Je vais gagner du temps pour que Terria puisse s’enfuir mais je vous laisserai pas la reprendre si c’est pour l’obliger à une vie où elle serait menottée à un mariage qu’elle ne désire pas. Le but des Apireines est de servir le royaume qu’elles dirigent. Si ce royaume n’est pas capable d’accepter l’un de ses rares caprices personnels en ce qui concerne son choix amoureux alors ce royaume ne mérite pas d’avoir une Apireine comme souveraine. »

« Tu oses insulter le royaume ? Je ne te laisserai plus vivre même si tu es le fils de mon meilleur ami ! Même si tu es celui qui a réussi à réunir tous les insectes dans le royaume ! Je ne peux pas laisser tes paroles impunies ! »

« Papa ! Ne le touche surtout pas ! Ne touche pas à un seul cheveu d’Earnos ! »

C’est vrai. Il avait oublié cela. Ses lances étaient des armes … mais il était un insecte. Et en tant qu’insecte, il pouvait aussi utiliser son propre corps comme une arme ! Déjà deux petites pointes apparaissaient au bout de ses mains, semblant fusionner avec elles. Il était prêt … Il n’avait pas besoin de lances puisqu’elles étaient déjà là.

« Earnos ! Qu’est-ce que tu fais ? Tu ne vas quand même pas blesser mon père ! »

« Terria, je ne veux surtout pas … qu’il te fasse du mal. Recule s’il te plaît … Passe par la fenêtre. Enfuis-toi, tu sais où nous devons nous rendre. Je te rejoindrai plus tard, je te le promets. Je t’aime, Terria. » murmura Earnos, gardant ses yeux fixés sur le Yanmega.

« TERRIA ! Tu as intérêt à rester ici ! Je ne te punirai pas … Mais ce Dardargnan … mérite la peine de mort ! » hurla soudainement le Yanmega en réagissant au quart de tour. Il s’était déplacé avec vélocité vers Earnos, celui-ci ne s’étant pas attendu à une telle pointe de vitesse de la part du roi. Si avec cet âge, il se déplaçait aussi rapidement alors qu’est-ce que cela avait été il y a plus de vingt ans.
Mais ce n’était pas le moment. Il devait se protéger avant qu’il ne soit trop tard ! Pourtant, il sentait que son corps ne réagissait que trop lentement, incapable devenir parer la griffe droite qui fonçait vers lui, au niveau du ventre. Pourtant, la griffe s’arrêta à quelques centimètres de son ventre, recouverte de sang. Il écarquilla les yeux, voyant Terria qui avait le ventre traversé par le bras de son père.

« Terr … Terria ? » murmurèrent les deux hommes en même temps, les yeux grands ouverts alors que le roi retirait aussitôt son bras, sa griffe redevenant main. Il fit quelques pas en arrière, regardant le sang de son bras puis le trou béant dans le ventre de sa fille. Celle-ci avait les yeux à moitié-clos, du sang s’écoulant de ses lèvres mais plus aucune réaction. Le jeune homme s’approcha d’elle, lui tapotant doucement les joues avant d’avoir les larmes aux yeux. Ce n’était pas possible. Pas maintenant hein ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi ? Pourquoi ? POURQUOI ? POURQUOI MAINTENANT ? Il poussa un hurlement strident avant de regarder le roi, serrant les dents.

« Vous l’avez tuée ! Vous l’avez tuée ! Vous l’avez tuée car vous ne vouliez pas qu’elle soit heureuse ! Vous ne vouliez pas qu’elle m’aime ! »

« Tu as tué ma fille ! Tu l’as tuée ! Tu as tué ma fille ! Cet acte ne passera pas impuni ! A cause de toi, le royaume est perdu ! Le royaume des insectes est perdu ! » hurla le roi à son tour, rejetant la faute de son acte sur le jeune homme. « Ma fille est morte … Après ma femme, ma fille est morte. Je n’ai pas été capable de la protéger non plus, je n’ai pas été capable de la protéger. Mais sa mort ne restera pas impunie ! GARDES ! GARDES ! »

Le roi criait à se briser la voix alors que des bruits de pas se faisaient entendre dans la maison de Douély. Aussitôt, Earnos prit le corps de sa bien-aimée dans ses bras, sautant par la fenêtre alors que les soldats arrivaient.

« Cet homme ! Cet homme vient de tuer la princesse Terria ! Pourchassez-le avant qu’il ne s’enfuie ! Pourchassez-le et tuez-le si vous le voyez ! Le royaume est perdu par sa faute ! »

Earnos était en train de courir, son dos faisant apparaître deux bosses dont la chair se déchira, laissant voir deux ailes. Sans hésiter un instant, il s’envola, Terria dans ses bras alors que ses larmes s’écoulaient le long de ses joues. Terria … Terria … Plus que le royaume, c’est lui qui venait de la perdre.

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