Chapitre 79 : La fin d’une comédie

ShiroiRyu
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Chapitre 79 : La fin d’une comédie

« Ah … Je suis déjà en manque de confort. »


Elen avait fait une petite remarque sur le ton de la plaisanterie. Cela faisait à peine quelques heures qu’ils avaient quitté le village des rebelles. Avant de partir, Manelena avait récupéré un papier de la part de celui qui dirigeait les rebelles. Personne n’avait osé lui poser la question car cela ne les regardait pas le moins du monde.

« On fera une petite pause d’ici une heure, le temps de manger un peu. Comme on a fait quelques provisions, cela devrait être assez consistant. »

« Heureusement que Manelena était là pour les rebelles. Ils ont accepté de nous offrir tout cela gratuitement, comme si cela ne les dérangeait guère. »

« Pour atteindre mes objectifs, je suis prête à beaucoup de choses. Vous allez devoir l’apprendre très rapidement à vos risques et périls. »

« Pourquoi est-ce que tu prends ce ton menaçant, Manelena ? Je te rappelle que tu es avec nous, tu n’as pas à t’inquiéter ou à t’en faire pour ta sécurité. »

« Ce n’est pas une question de sécurité, Tery. » marmonna la femme aux cheveux argentés. Bon bon, au moins, elle lui avait décroché un mot. C’était toujours ça de gagné, non ?

Toujours ça … Oui, il faudrait qu’il positive de la sorte mais des fois, il a juste envie d’affaisser ses épaules. Manelena était redevenue la femme froide et sans émotions d’antan. Celle de leur début ? Peut-être même pire.

Il ne voulait pas que cela se reproduise mais il ne pouvait pas empêcher tout ça. Simplement, ce n’était pas une bonne chose que tout se dérouler de cette façon. Alors, il devait prendre sur lui-même et espérer que tout s’arrange. Pendant qu’il servait le repas, il fixait Manelena du regard ,espérant attirer son attention mais elle mangea paisiblement.

Humpf … Assis à côté d’Elen, il n’avait guère faim. Il sentait que cela inquiétait la jeune femme et les autres, même Clari avait perdu son sourire pour lui demander s’il voulait que sa grande sœur lui donne à manger. Il avait voulu la rassurer d’un grand sourire mais il sentait que ce n’était pas suffisant pour ça. Il fallait faire plus, toujours plus, encore plus. Plus jusqu’à ce que tout déborde. Plus jusqu’à l’épuisement total.

Au final, une première journée se déroula sans encombre. Ce n’était pas lui mais Manelena qui les guidait. Pourtant, il avait l’impression qu’ils ne se dirigeaient pas tout de suite vers Midès mais plutôt par quelques détours. Mais elle semblait être sûre de son idée donc il ne chercha pas à trouver où était le problème. Ce n’était pas le moment de faire du sentimentalisme et de se poser des questions.

« Je vais faire quelques tours de garde puis j’irais réveiller Séran pour qu’il prenne le tour ensuite. Aucun problème ? » déclara Tery en regardant l’imposant homme aux oreilles pointues. Celui-ci signala que ça ne le dérangeait pas, tous étant d’accord avec Tery. Bon … Alors, c’était parfait. Cela allait l’occuper.

Mais ça ne changerait pas une chose : le mal de ventre et le grognement qui sortait de ce dernier. Avachi sur le tronc d’arbre qui lui servait de siège, il regarda les branches se consumer dans le feu. Manelena. Il n’avait que la jeune femme en tête depuis cet instant dans le village des rebelles. Même si elle ne l’accepterait jamais, il la considérait comme une personne plus qu’importante dans sa vie.
Une personne à qui il la confierait justement, cette vie qui avait trop de fois rencontré des obstacles auxquels il n’aurait jamais pensé lorsqu’il avait décidé de s’enfuir de son village natal. Aujourd’hui, tout avait changé, tout était différent. Il n’était pas ce héros de conte pour enfants dont les ménestrels chantaient les louanges dans les auberges. Il n’avait pas une fille au village qui attendait impatiemment son retour. Il n’avait pas une vie amoureuse tranquille, il n’était pas un héros, sans peur, sans reproche, loin d’être parfait.
Il était tout simplement comme ça … et il n’arrivait pas à se dire que Manelena aussi. Lui qui voulait tant la voir comme une « femme », elle avait montré par ses paroles qu’elle l’était beaucoup plus qu’il ne le croyait. Alors pourquoi ?
Pourquoi est-ce que tout cela le dérangeait ? Pourquoi est-ce qu’il avait autant de mal à mettre correctement ses pensées dans tout ça ? Pourquoi est-ce qu’il se compliquait la vie avec … Ah ? Ses pensées furent d’ailleurs perturbées. Manelena avait quitté la tente qu’elle partageait avec Clari et Elise. Elle venait lui faire des reproches ?

« Je ne veux pas me bagarrer, Manelena. Je tiens à te le dire, tout simplement. »

« Mange un morceau au lieu. Entendre ton ventre me tape sur les nerfs … et méchamment. »

« Je n’ai vraiment pas faim du tout. Donc non, je ne penses pas le faire. »

Elle émit un nouveau grognement et se plaça en face de lui, venant s’accroupir que son visage se retrouve à la hauteur du sien. D’une pichenette sur le front, il eut à peine le temps de remarquer la minuscule ligne d’Alzar sur le doigt avant de se retrouver projeté en arrière.

« Tu n’as pas vraiment tout saisi, Tery Vanian. Ce n’était pas une réclamation ou un conseil, c’était un ordre que tu vas t’empresser d’obéir et vite fait. Je compte dormir correctement ce soir. Bon, qu’est-ce qu’il y a dans les sacs pour faire à manger ? »

Aie, aie, aie, il se frotta le front en gémissant de douleur. Elle n’y avait pas été avec le dos de la cuillère mais ça faisait mal ! Il se remit correctement debout. Il avait tant de mots à lui crier dessus mais il s’arrêta dans son mouvement, il n’était pas convaincu que cela arrange la situation. Puis surtout, elle était concentrée sur le casserole.
Elle faisait quoi ? Est-ce qu’elle était … vraiment en train de cuisiner ? Ou alors, il rêvait et ce n’était qu’une illusion ? Mais pourtant, c’était bel et bien le cas, lui tendant après quelques minutes une assiette remplie d’une mixture étrange et odorante. Le plus surprenant était le fait que le tout n’était pas déplaisant à regarder et sentir.

« Essaies de manger ça, ça devrait te permettre de tenir sans manger pendant une journée ou deux. Tu n’as pas besoin de plus de toute façon, n’est-ce pas ? »

« Je ne dirais pas ça comme ça. Et c’est quoi ça ? Depuis quand tu … »

« Depuis toujours. Espèce d’imbécile. Tu n’as pas l’air de saisir que je fus dans l’armée de Shunter dès mon plu jeune âge. En tant que tel, les missions à l’extérieur étaient très difficiles. Tu crois que je devais compter sur quelqu’un d’autre pour me nourrir ? »

« Non, je n’ai pas dit ça mais … ça semble plutôt bon. Je peux vraiment ? »

Qu’il ne la force pas à se répéter, elle détestait ça. Avec un peu de réticence, il enfonça une première bouchée entre ses lèvres, puis une seconde. C’est vrai que c’était assez lourd comme repas. Il avait l’impression qu’une seule cuillère suffisait à remplir son estomac, qui, pourtant en réclamait toujours plus. Manelena poussa un soupir avant de se redresser :

« Bon, normalement ,on ne devrait plus l’entendre dorénavant. Je repars me coucher. »

« Attends un peu. Je dois te remercier non ? Pour ce repas, tu ne crois pas ? »

« Quand c’est forcé, ça n’a aucun intérêt. Maintenant, fait que ton estomac se calme car la prochaine fois, je pense que j’irais l’extirper de ton corps à mains nues, compris ? »

« Message très bien passé mais Manelena … A quel point est-ce que tu es prête à tout perdre pour réussir à arriver jusqu’au roi ? »

« A quel point ? » répéta t-elle, ses yeux se plissant légèrement en regardant Tery. « Je verrais si je décide que tu es apte à l’apprendre ou non. Mais pour aujourd’hui, je n’ai pas encore oublié ce que nous nous sommes dit, tous les deux. »

« Je te ne considère pas comme une traîtresse à mes yeux, Manelena. »

« Qu’importe comment tu me vois, ce n’est pas bien grave. Je me contrefiche de tout cela. Mais pourtant, tu l’as déclaré ouvertement. »

Est-ce qu’elle allait lui laisser la possibilité de s’exprimer ? En la voyant s’enfoncer dans la tente, il comprenait que c’était parfaitement inutile et impossible. Finalement, quelques heures plus tard, Séran sortit de la tente, lui demandant pourquoi il n’avait pas été le chercher. Pour toute réponse, Tery haussa les épaules avant d’aller rejoindre Elen au pays des songes, même si ce n’était que pour quelques heures.

Le lendemain matin, ils avaient décidé de passer par les routes de terre de Shunter. C’était beaucoup moins sécurisé pour eux qui voulaient jouer la discrétion mais la distance et le temps gagné pour arriver au prochain camp des rebelles étaient grandement réduits.

« A cette allure, si on ne fait pas de mauvaises rencontres, on devrait arriver d’ici une journée ou deux, au grand maximum. »

« C’est plutôt honnête. J’imagine qu’ils ne s’attendront pas à nous voir arriver aussi tôt. » répondit Royan après les paroles de Tery.

« De toute façon, les rumeurs étant des rumeurs, l’armée impériale doit déjà être au courant que nous sommes maintenant du côté des rebelles. Du moins, d’après ce que les rebelles aurons transmis « par mégarde ». » compléta Manelena sur un ton froid.

« Cela permet de semer la confusion dans les troupes adverses. Même si je ne suis que moyennement d’accord avec cette méthode, il faut avouer qu’elle reste sacrément efficace. Enfin, on ne va pas leur reprocher ça non plus. » lui répondit Tery calmement.

« Je n’ai pas parler de reproche de la sorte. Mais bon, je ne vois pas pourquoi je m’efforce de continuer à discuter de tout ça pour le moment. »

« Car cela nous permettrait d’avoir une conversation raisonnée entre toi et moi. Mais aussi le reste du groupe, chose qui ne me paraît pas si étrange, non ? »

« Si tu le dis, Tery, si tu le dis. » soupira Manelena, visiblement épuisée par tout cela. Il est vrai que depuis quelques temps, elle avait l’air fatiguée et cela pour peu de choses. Il n’y avait aucune explication raisonnable à cet état, à part les conversations avec les rebelles qui semblaient interminables quand il la voyait avec eux.

« Je pense que nous devrions … » commença à reprendre Tery avant de s’arrêter. Comme à l’affût, il se positionna, sortant ses griffes pour attaquer.

« Oh ? Tu l’as aussi remarqué, Tery ? Le vent m’a prévenu. Ils doivent être une dizaine et vu le poids et le cliquetis du métal, j’imagine que ce sont des soldats de Shunter. »

Clari avait gardé son sourire aux lèvres tout en fixant le jeune homme aux cheveux bruns. Celui-ci hocha la tête positivement. S’il n’était pas le seul à l’avoir remarqué, cela voulait dire que la situation était encore contrôlable. Mais maintenant ? Ils n’avaient aucun endroit où se cacher. Est-ce qu’ils allaient devoir se battre ?

« Bon bon bon ! Visiblement, il va falloir que l’on s’occupe de quelques personnes. »

« S’ils ne sont pas menaçants, on ne fait rien du tout, d’accord ? »

Il préférait calmer aussitôt les ardeurs de Clari. Les autres acquiescèrent : pas besoin de faire autant de violence pour si peu. Surtout s’il n’y avait pas besoin d’en venir aux mains. Le groupe continua sa route, arrivant à la hauteur d’une troupe d’une dizaine de soldats, comme Clari l’avait annoncé quelques minutes auparavant.
Ils passèrent à côté d’eux, sans un mot et sans un regard. Le but était de ne pas montrer qu’ils avaient peur ou qu’ils étaient inquiets de leur réaction. Plus vite ils « ignoraient » les soldats, mieux ce serait pour tout le monde.

« HEY ! Vous ! Arrêtez-vous ! » s’exclama une voix derrière eux alors que le jeune homme se retournait presqu’aussitôt, demandant d’une voix calme :

« Oui ? Que pouvons-nous faire pour vous ? »

« On fait une tournée d’inspection car il paraîtrait que de nombreux rebelles se trouvent dans les environs. On va devoir fouiller vos sacs et que vous ouvriez vos vestes et autres vêtements. Pour être sûr que vous ne portez pas des artifices rebelles. Question de sécurité. »

« Comme vous le désirez, bien entendu. Bon ben, nos sacs. » répondit Tery.

Il se montra nonchalant alors que la fouille arrivait maintenant. Il ne fit qu’un simple regard envers les autres pour les laisser fouiller. Néanmoins, quand une main fût un peu trop baladeuse sur Elen au niveau de son épaule droite, le soldat poussa un cri.

« AH ! Mais qu’est-ce … Y a des insectes dans le coin ?! »

« Je ne crois pas ? Pourquoi ça ? Enfin bon, ils sont inoffensifs. Mais pourquoi est-ce que vous êtes aussi nombreux ? Ce n’est pas normal de voir un groupe aussi important. »

« Les Gnomolds hésiteront plus à nous attaquer si nous sommes tous ensembles. Plus nous sommes nombreux, plus ils sont inquiets alors. »

« C’est à double tranchant. Ils peuvent venir avec plus de membres et vous sauter dessus car vous êtes alors des cibles potentielles encore plus intéressantes à leurs yeux. »

« C’est vrai, c’est une chose mais merci de nous avoir prévenus. Y a t-il des détails que nous devrions apprendre ? Comme des zones à éviter ? »

« Les bois, principalement les bois. Mais ça, vous vous en doutiez si vous êtes préparés pour les Gnomolds. Et évitez les petits villages. Bonne route. »

« A vous aussi. Merci de nous avoir répondus. » finalisa Tery alors que tous les soldats partaient de leur côté, le groupe de Tery allant à l’opposé. Tout s’était très bien passé. Est-ce que Manelena était vraiment si méconnaissable que ça ? Et Royan ? C’était les habits qui devaient influencer en partie, vint se dire Tery pour lui-même.

Quelques minutes plus tard, lorsqu’ils s’étaient assez éloignés des autres, Tery poussa un profond soupir de soulagement, Clari lui tapotant doucement le dos comme pour le féliciter par rapport à ses réactions. Elle vint lui dire :

« Et bien ? Respires un bon coup, n’est-ce pas ? »

« Disons que le plus dur fût passé mais ce n’est pas suffisant. On ne sait pas si d’autres groupes, moins stupides que celui-ci, nous arrêtera. » reprit aussitôt Manelena.

« Oui, je reste méfiant par rapport à ça, On ne sait jamais sur quoi on peut tomber. Mais merci, Clari, ça me fait plaisir. Et Manelena, bien entendu. »

« De rien, si je le pense, c’est tant mieux, non ? »

« C’est exact, vu que c’est sincère. » répondit la jeune femme aux couettes blondes, sourire aux lèvres alors que Tery posait brièvement ses yeux sur Manelena. Il savait qu’elle n’aurait pas hésité à une seule et unique chose : éliminer les soldats de shunter. C’est pour ça qu’il avait voulu modérer les ardeurs de la femme aux cheveux argentés. S’il pouvait éviter de tuer gratuitement, surtout des personnes qui ne demandaient pas cela …

« Je sais à quoi tu penses, Tery. Et ça me répugne, que ça soit clair. »

« Et je le sais aussi de ton côté, Manelena, ça se lit dans ton regard. »

« Alors tant mieux, maintenant, arrêtes de m’observer comme ça. »

« Elise ? Royan ? Sérest ? Séran ? Vous n’avez rien à dire de votre côté ? D’ailleurs, Royan, je reste surpris qu’ils ne t’aient pas remarqué. » dit Tery en questionnant l’adolescent.

« Mon visage a changé, comme mon corps, depuis le jour où j’ai quitté le palais royal de Traslord. Les années passent et c’est pour cela que tous ne me reconnaissent pas. »

« C’est peut-être pour cela. Tu es un jeune adulte maintenant. Ou tu vas t’en rapprocher. »

« Disons qu’on ne fête guère nos anniversaires depuis que je suis avec vous, je ne sais pas quel âge je devrais avoir actuellement. Peut-être devrions-nous demander la date que nous sommes la prochaine fois que nous nous arrêterons ? »

Ah ? Ha… Hahahaha. Le jeune homme éclata de rire alors que Royan ne faisait qu’un faible sourire. Oui, il était totalement dans le vrai. Ils ne s’étaient jamais intéressés aux dates depuis ce jour et à part imaginer dans sa tête le fil des mois qui s’écoulaient, c’était difficile d’avoir une idée réelle de la date exacte. Même à Omnosmos, il n’avait jamais senti la nécessité.

« Ne vous préoccupez pas du temps passé mais plutôt du temps qu’il nous reste avant d’arriver jusqu’à Midès. A partir de là, cela sera beaucoup plus difficile. »

« Je le sais parfaitement, Manelena. Je le sais parfaitement mais bon … Je veux juste espérer que tout se passe bien. Rien d’anormal à cela, non ? »

« Pas le moins du monde, Tery. Pas le moins du monde. D’ailleurs, heureusement que ces imbéciles de soldats n’ont pas cherché trop loin chez moi. »

Manelena plaça une main dans le décolleté de sa tenue, extirpant le bout de papier qui contenait les informations sur la localisation du prochain camp des rebelles à atteindre, plus proche de Midès que celui où ils s’étaient reposés.

« Bien entendu, qu’ils tentent de passer la main à cet endroit et ils se retrouvaient manchots tellement rapidement qu’ils n’auraient même pas la sensation du toucher qui arrive jusqu’à leurs nerfs. Je ne suis pas là pour plaisanter. »

« Ça, je pense que tout le monde l’avait remarqué, si tu veux tout savoir. »

Il avait dit cela dans un sourire, ayant évité de trop s’attarder sur Manelena lorsqu’elle avait accomplit ce geste. Surtout qu’Elen était dans les environs. Manelena remit correctement le bout de papier là où il se trouvait avant de dire :

« Bref, d’après la carte, il devrait y avoir un village ou deux dans les environs. Nous pourrons nous reposer car l’armée de Shunter ne passe jamais par là. »

« Une bonne nouvelle même si ça ne sera pas gratuit contrairement au village des rebelles. Mais vu le peu qu’ils nous ont donné pour la route ainsi que les quelques vivres qui nous restaient, ça sera la meilleure solution possible. » vient conclure Sérest, son mari acquiesçant d’un marmonnement. Il était d’accord, cela était évident, surtout qu’ils manquaient de viande.

Dans la soirée, il avait décidé de reprendre son tour de garde. C’était l’un des rares moments où Manelena se réveillait pour venir discuter avec lui. Elle prétextait qu’elle n’arrivait pas à dormir mais il savait … enfin, il espérait que c’était pour parler avec lui qu’elle faisait tout cela. Il s’en contenterait, tout simplement.

« Je veux tuer mon père, Tery. Je veux tuer mon père et récupérer son trône. »

Il n’avait rien dit à l’annonce des propos de Manelena. Non pas qu’il ne le croyait pas … mais il n’avait pas posé la question. Il ne fit qu’hocher la tête positivement, comme pour signaler qu’il avait bien entendu tout en la regardant doucement. Si elle estimait que c’était la meilleure chose à faire, il n’allait pas l’en empêcher, loin de là.

« Je veux mettre un terme à son règne. Je veux permettre au royaume de Shunter de retrouver la paix dans laquelle il était plongé pendant de nombreuses années. »

Encore une fois, il ne lui répondait pas. Qu’est-ce qu’il aurait put dire ? Qu’il était d’accord avec elle ? Qu’il approuvait ses actes et paroles ? Non, il n’était pas comme ça et elle devait s’en douter. Il la fixe de ses yeux verts avant de chuchoter finalement :

« Tu es prête à tout pour le royaume, n’est-ce pas ? »

« C’est exact. Je n’aurai aucune hésitation pour arriver à mes fins. Mais maintenant, tu sais pourquoi je noues des contacts avec les rebelles. Satisfait ? Tu vas pouvoir dormir paisiblement sur tes deux oreilles cette nuit ? »

« On va dire que oui … mais j’ai encore mon tour de garde à terminer. »

« Bien entendu. Alors, tu vas aller te coucher et moi-même, je vais m’occuper de finir ta nuit plutôt que de te laisser te crever de fatigue. »

« Ou alors, je peux rester une heure de plus pour que tu te sentes moins seule. Même si plonger dans nos pensées les plus profondes en regardant un feu de camp, ça a quelque chose de poétique, tu ne crois pas ? »

Elle émit un petit rictus à cette idée, signe qu’elle n’appréciait guère l’humour du jeune homme. Pourtant, elle ne vint pas le contredire. Elle commença à fixer le feu de camp devant elle, à l’opposé du jeune homme en face. Elle grogna entre ses dents :

« Tout ce qui est lyrique et poétique est inutile, Tery. »

« Je ne sais pas. Des fois ,cela fait du bien d’entendre quelques mots, qui, reliés entre eux, forment une belle phrase ou rime. Tu ne crois pas ? Bon, par contre, il ne faut pas espérer cela de ma part. Je n’ai pas la carrure pour. »

« Je ne me suis jamais posé la question de toute façon. »

Le jeune homme aux cheveux bruns haussa les épaules, amusé par la réponse de Manelena. Bon, une heure avec elle et il allait au lit. Au moins, il savait exactement ce qu’elle désirait, c’était une bonne chose, une très bonne chose. Ah … Oui. Il aimait mieux la connaître.

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