Chapitre 8 : Déchu

ShiroiRyu
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Chapitre 8 : Déchu

« Ric ! Ils arrivent quand les autres ?! Je ne suis pas sûr qu’on va pouvoir rouler pendant des heures ! On doit se rendre au commissariat ! »

« Je fais ce que je peux, dis-je, mais je ne suis pas sûr qu’il y a beaucoup de personnes en fonction à cette heure ! On est mal barré ! »

Il le sait aussi bien que moi que ça ne s’annonce pas bien du tout. Mais qu’est-ce qu’on peut y faire ? J’aurai dû m’en douter qu’il y aurait un problème. Lorsqu’un plan se déroule sans anicroches, il y a TOUJOURS un problème ! TOUJOURS ! Alors pourquoi n’ai-je pas pensé que tout ça pouvait mal tourner ? Et cette Gardevoir … Pourquoi est-ce qu’elle n’a pas pensé à s’enfuir ? Je pensais qu’elle était plus … intelligente que ça mais après réflexion … Non. Quel idiot. Elle est sûrement dans le même cas qu’eux : elle aime le sexe. Ce sexe impur, dégoûtant, malsain … Ca doit l’exciter !

« RIC ! REGARDE LA ROUTE ! » hurle soudainement Alphonse alors que je sors de mes pensées. La route ? UN CAMION ?!

Je freine de toutes mes forces, appuyant au maximum sur la pédale alors que la voiture fait un tour sur elle-même. Les pneus quittent le sol, la voiture tournoyant sur plusieurs mètres avant d’être percuté par le camion qui coupait la route. Me voilà bien secoué, au même titre qu’Alphonse. Néanmoins, un rapide regard et je vois que nous sommes tous les deux conscients, sauf qu’avec le front en sang et des entailles sur le bras pour l’autre, on n’est pas vraiment dans un bel état. La faute aux vitres de la voiture qui se sont brisées.

« Ca … Ca peut aller ? » demandé-je à Alphonse, celui-ci me souriant.

« Affirmatif … Même si … Ca pourrait aller mieux. »

Puis sonne enfin le cor de la victoire … ou plutôt les gyrophares des voitures de police. Nous nous extirpons avec difficulté de la voiture. Même si la chance ne nous sourit pas, il faut remarquer que la voiture ne va pas exploser. Enfin une bonne nouvelle … Mais je ne me fais pas d’illusions. Bien que les sirènes de la police sifflent à mes oreilles, les hommes et femmes qui descendent des nombreuses voitures qui nous poursuivaient font leurs apparitions. Bloqués derrière par la camion dont le conducteur est descendu, nous n’avons pas vraiment d’échappatoire, moi et Alphonse.

« Quand même … Foutre le bordel à des heures pas possibles, je ne savais pas qu’i y avait encore quelques crétins dans la police. Je pensais qu’on s’en était débarrassés ? »

Je ne cherche même pas à savoir quelle personne a pris la parole. Je n’ai pas cette idée en tête. La seule chose que je désire, c’est m’enfuir … Car il n’y a pas d’autres solutions. Alphonse à mes côtés, je n’oublie pas qu’il me reste le Ninjask et le Roucoups dans le cas d’Alphonse. Peut-être que l’on peut s’enfuir par la voie des airs ? Non … Le Roucoups le pourrait mais quant au Ninjask, même pas en rêve. J’entends maintenant le bruit caractéristique des pistolets dont on enlève la sécurité. Je fais appel au Ninjask, Alphonse faisant de même avec le Roucoups. De l’autre main, nous sortons nos propres armes. Deux contre … une bonne vingtaine ? Ils étaient bien cachés auparavant car je ne me rappelle pas les avoir vus dans les hangars. J’ai visé beaucoup trop gros cette …

« PONCHIEN ! PONPON ! » aboie le canidé, me laissant stupéfait. Rérox ? Qu’est-ce qu’il fait dehors ? Je ne l’ai pas sorti de sa pokéball ! Je tente de le rappeler mais la lumière rouge l’absorbe pour le faire réapparaitre tout aussitôt. Qu’est-ce … Il ne compte quand même pas me protéger ! C’est le dernier souvenir de mon père !

« Et il compte faire quoi avec ces trois pokémons ? Sortez les vôtres. »

C’est maintenant un déluge de cris qui se fait entendre autour de moi et d’Alphonse. Ils ont combien de pokémons ? S’il y en a au minimum deux par personnes … Il vaut mieux que je ne compte pas. Finalement, les sirènes de la police se rapprochent et de nouvelles voitures apparaissent. Des renforts ! Plusieurs hommes et femmes en descendent, des passants et divers citoyens observant la situation par les fenêtres. On peut presque croire à une guerre des clans … sauf que d’un côté, il y a la police qui fait régner la loi et de l’autre …

« Police ! Les mains en l’air ! Ne faites plus un geste et si … »

L’homme qui s’exprime fut arrêté aussitôt … d’une balle dans la tête. Son collègue avait pointé l’arme en sa direction avant de tirer. Et il n’est pas le seul ! Plusieurs corps tombent au sol devant mes yeux et ceux d’Alphonse. Qu’est-ce … Non … C’est donc ça ? Maintenant, les coups de feu résonnent tout autour de moi et Alphonse alors que je lui crie :

« Il faut s’enfuir ! On n’a pas le choix ! Viens par-là ! »

Pendant qu’ils sont occupés à se tirer entre eux, on doit aller ailleurs ! Nous sommes les seuls à savoir où se trouvent l’une des planques qui permettent de faire les transferts de marchandises humaines et pokémons ! Le Roucoups et le Ninjask utilisent leurs ailes pour créer des souffles qui repoussent les balles vers nous tandis que nous passons par les portières du camion. Nous voilà de l’autre côté avec Rérox ! Ici, on a un peu le temps de souffler, personne ne se combat. Mais bon … Je ne me sens pas plus rassuré qu’avant. Pourquoi j’ai mal au cœur ? Pourquoi je suis aussi anxieux ? Car je sais que les policiers de cette ville viennent de mourir, tués par leurs confrères ? Parce que j’ai l’impression que je viens de les abandonner ? Comme les deux pokémons du commissariat ? Rérox est toujours là, c’est le plus important. Mais alors que nous faisons à peine trois cents mètres, une voiture déboule devant nos yeux par la droite. Elle freine vivement, les pneus crissant sur le sol. Je commence à comprendre le malaise qui m’envahit lorsque je vois la portière s’ouvrir. La Gardevoir aux yeux dorés et à la chevelure saphir en sort. Du moins, ses yeux sont bandés et ses mains sont attachées par des menottes métalliques de couleur rose. Mais ce malaise ne provient pas seulement d’elle mais de l’autre personne qui quitte la voiture.

« Papa ? Qu’est-ce que tu fais là ? C’est dangereux ! » s’écrit Alphonse alors que son père est en face de nous, habillé élégamment. Veste noire, chemise blanche, pantalon noir et cravate rouge. Le parfait homme d’affaires ou …

« Alphonse ! Ton père n’est pas de … » tenté-je de dire avant qu’une balle ne vienne se loger dans le ventre de mon meilleur ami. Celui-ci s’écroule au sol, un dernier regard vers l’homme qui lui avait donné la vie avant de la lui retirer.

« Lania ? Est-ce bien Ric Auré que tu connais ? » demande paisiblement l’homme qui ne semble même pas s’intéresser à ce qu’il vient d’accomplir.

« J’ai entendu sa voix. C’est bien lui, l’homme qui voulut me sauver. »

« Monsieur … Monsieur Loïc. » commencé-je à balbutier, tentant de contrôler mes émotions.

« Ne perdons pas plus de temps. Je ne peux pas laisser le fils de mon ancien meilleur ami en vie … après ce qui vient de se passer. »

Il pointe une nouvelle fois l’arme devant lui … mais en sa direction. Je fais de même bien que ma tremblante est contrairement à celle de l’homme d’âge mur. J’ai un petit regard posé vers la Gardevoir, me demandant pourquoi elle est à côté de lui. Et j’ai aussi une pensée pour Alphonse, je ne peux même pas vérifier s’il va bien … mais avec la flaque de sang autour de lui… Je sais qu’il y a peu de chances qu’il s’en sorte.

« Hum ? Tu voudrais des explications ? Savoir ce qui se passe ? Je ne pense pas qu’il faille perdre mon temps avec tout ça. »

« Est-ce vous … qui avez fait ça ? Qui est responsable de cette ville ? Ils parlaient d’une personne dans la police … qui devait inséminer cette Gardevoir ! C’est donc vous, Loïc ? Et votre fils ! Vous savez ce que vous venez de faire ? Inséminer … cette créature … »

« Je te sens un peu perturbé, dit-il calmement, tes paroles n’ont aucun sens ou presque. C’est mon fils et alors ? Si vous vous mettez en travers de mon chemin, je ne vois pas pourquoi je devrais appréhender de mettre un terme à l’existence d’Alphonse. Quant à l’insémination, cela décuplera les pouvoirs de cette Gardevoir … et me permettra alors de me faire reconnaître dans cet autre monde, celui dans lequel tu as osé poser un pied il y a de cela quelques semaines. Tu es stupide, Ric, très stupide. Pourquoi n’as-tu pas continué ta petite vie tranquille de policier ? Tu n’aurais jamais alors connu ce monde. »

« De quel monde parlez-vous ? Qu’est-ce que vous cachez ? Depuis quand … est-ce que tout cela dure ? Est-ce que … tout le commissariat ? Toute la police ? »

« Non … Cet idiot de Casior est aussi têtu qu’une mule. Pourtant, on l’a souvent menacé, on a souvent essayé de l’abattre, mais rien à faire, il a la vie dure, très dure. Si cette ville n’est pas encore tombée, c’est bien grâce à lui. Depuis quand ça dure ? Plus d’une vingtaine d’années … Mais assez parlé … Cette Gardevoir est bien trop précieuse pour être avec quelqu’un pour toi. Tu ferais mieux de disparaître … »

« Cette Gardevoir est importante ? Bien trop importante ? »

Je ne sais plus comment raisonner correctement. Comme il l’a annoncé, j’ai du mal à me concentrer. Mais une idée parcoure mon cerveau, une seule idée … Une unique idée … Il m’a trahit … Il nous a trahit … Cet homme que j’idolâtrais … Je ne peux pas m’empêcher de ruminer ma vengeance. Une vengeance absurde et stupide ! Je pousse un cri de rage avant de courir à toute vitesse vers Loïc. Celui-ci ne s’attend pas à ce que je fasse une telle chose et met du temps à réagir. Mais la distance entre lui et moi est trop grande, bien trop grande. Une balle quitte son pistolet, venant se loger dans le flanc recouvert de poils de Rérox.

« PON PON PON ! » hurle mon fidèle animal alors que je percute Loïc d’un coup de coude dans le torse. J’en ai les larmes aux yeux. Je n’arrive toujours pas à raisonner correctement.

J’arrache ce bandeau qui cache les yeux de la Gardevoir, celle-ci posant son regard doré sur moi. Elle est émue mais surtout remplie d’une émotion que je ne lui connais pas. Je me tourne vers mon Ponchien, remarquant qu’il se tient difficilement debout. Du sang s’écoule de son flanc, il faut que je le rappelle mais avant …

« ENFUIS-TOI LANIA ! ENFUIS-TOI ABSOLUMENT ! Ne les laisse plus t’attraper ! Tu dois t’en sortir ! Je vais le retenir ! Je l’empêcherai de mettre cette ville à … »

« Un idiot … comme ton père. Un idiot qui est prêt à mourir pour accomplir ce qu’il pense être bon. » murmure faiblement Loïc avant de se redresser. Le coup que je lui ai donné ne lui a rien fait ? Et pourquoi est-ce qu’il parle de mon père maintenant ? Il veut encore plus jouer avec mes émotions ? Je m’apprête à utiliser mon arme mais il est le plus rapide. Une balle pénètre la chair de ma cuisse, me forçant à m’agenouiller tout en serrant les dents.

La Gardevoir n’a pas pris la parole. Elle ne fait que me regarder alors que Loïc arrive à ma hauteur. Il est heureux … Je le vois dans son regard qu’il est heureux. Je ne peux même pas utiliser mon arme, la douleur étant trop forte mais surtout … car je n’y arrive pas. Je n’arrive pas à m’imaginer tirer sur Loïc, c’est tout simplement impossible !

« Terminons-en maintenant. Sais-tu pourquoi cette Gardevoir a les mains liées ? Pour être sûr qu’elle ne commette pas d’imbécilités. Elle ne cherche pas à l’exprimer maintenant mais il semblerait qu’elle te voulait comme maître. Cette idiote … Je suis son unique propriétaire car j’ai la clé qui lui permettrait d’utiliser une partie de ses pouvoirs ? Là ? C’est à peine si elle arrive à se tenir debout. Elle est aussi frêle qu’une humaine. C’est dommage, Ric. Vraiment dommage … Tu étais un bon élément, très prometteur mais tu t’immisces dans des affaires bien trop grandes pour toi. Qu’est-ce que tu espérais faire ? Tu aurais pu chercher à t’enfuir avec cette Gardevoir et l’emmener loin d’ici non ? Car si elle tente de quitter la ville toute seule, elle n’y arrivera pas. Hahaha … Tu es trop naïf. Tu penses vraiment que tu as affaire à une petite bande de quartiers ? C’est bien plus grand … Tu aurais dû te douter que dès l’instant où la génétique est en jeu, ce n’est pas une affaire qui intègre simplement cette ville. C’est beaucoup plus grand, beaucoup plus important ! Ce n’est pas que dans ce pays mais dans le monde entier ! »

« Et toi ? Un simple policier d’une petite ville comme ça … Tu en ferais partie ? » répliqué-je, cherchant à faire de l’ironie. Pourquoi est-ce qu’il parle autant ? Pourquoi ? Je ne sais pas mais … Mais … Il faut que je réagisse. Derrière ses longues paroles, il m’a donné une excellente idée. Je dois m’enfuir de cet endroit. Je dois emporter cette Gardevoir ailleurs. Elle est l’une des clés de cette histoire ! Je tente de me mouvoir mais un coup de crosse me fait tomber au sol. Je ne remarque pas que la Gardevoir a réagi, tentant d’empêcher Loïc d’en terminer avec moi. Voilà qu’elle se prend elle aussi un coup au visage, la faisant s’écroulant juste à côté de moi. Elle m’observe, me faisant un petit sourire. Cette Gardevoir … Lania … Elle n’a jamais voulu ça elle aussi. Même si je souffre, il faut que je puisse dans cette colère d’avoir été trahi pour en terminer avec Loïc !

« PON ! PONCHIEN ! PONPON ! »

« Votre pokémon veut nous faire gagner du temps. » dit-elle finalement avant qu’une ombre ne passe au-dessus de moi. Un peu de sang tombe sur mes cheveux tandis que Rérox s’est lancé sur Loïc, le plaquant au sol tout en lui mordant le bras.
Je me relève, aidant la Gardevoir à faire de même. Je tente de m’approcher de Rérox pour l’aider mais Lania m’arrête, hochant la tête négativement. Au-dessus de nous, j’entends des cris de la part des quelques citoyens un peu trop curieux.

« C’est un vrai carnage ! Il n’y a plus aucun policier vivant de l’autre côté ! »

« Vous feriez mieux de vous dépêcher ! Y en a d’autres qui arrivent ! »

Je n’ai pas le temps. Je sais parfaitement que je n’ai pas le temps ! Mais je ne peux pas aband… Je ne peux pas abandonner Alphonse ! Je ne peux pas abandonner Rérox ! Le dernier souvenir de mon père ! Mais je …

« Ce Ponchien est prêt à se sacrifier. Il ne faut pas gâcher cette chance … si vous voulez vraiment me sauver. » chuchote Lania. Je l’arrête d’une gifle d’une violence inouïe, n’arrivant même plus à sentir la douleur dans ma cuisse.

« Ne m’adresse pas la parole comme ça ! C’est compris ? C’est … Tout ça … C’est de ta faute ! C’est de ta faute ! TOUT CA ! REROX ! PA … PARDON ! » m’égosillé-je avant de prendre la Gardevoir par le bras. Comment je peux faire ça ? Si je m’en sors, je ne pourrais plus jamais me regarder dans un miroir. Je vois mon Ponchien, ses yeux noirs fixant Loïc qui tente de se débattre pour retirer les crocs de Rérox sur son bras. Comment ? Comme je peux … L’abandonner ? Ce n’est pas pour moi … Ce n’est pas parce que je suis en colère. C’est pour le regard de Rérox qui se pose brièvement sur moi. C’est pour la justice … Je me bats pour la justice, une justice absurde et pourrie jusqu’à la moelle … mais pour la justice que mon père a continué de servir jusqu’à la fin … comme le fait en ce moment Rérox. Je ne peux pas perdre cette chance qu’il m’offre. Je cours quitte à en perdre le souffle, tenant par le bras la Gardevoir à la joue rougie par ma claque. Il faut que je quitte cet endroit, cette ville ce pays. Que j’aille ailleurs … Autre part. Je ne sais pas où, je ne sais pas comment.

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